La Revue du Spectacle, le magazine des arts de la scène et du spectacle vivant. Infos théâtre, chanson, café-théâtre, cirque, arts de la rue, agenda, CD, etc.
Théâtre

"Les gestes d'après", du théâtre poétique fort et bouleversant - 10/09/2024

Après avoir porté les textes de Svetlana Alexievitch dans "Valentina-Tchernobyl", les mots de Brigitte Barbier dans "Là où tu es", ceux de Chariff Ghattas, de Maïa Brami et d'autres auteurs encore, Coralie Émilion-Languille s'empare cette fois de textes qu'elle a elle-même écrits. Exercice encore plus exigeant que celui d'incarner des personnages extérieurs à soi, que celui de donner à entendre...  

"Lieux communs" Extension du domaine de la lutte… je doute, donc je suis - 05/09/2024

La double entrée du titre de la pièce écrite et mise en jeu par Baptiste Amann préfigure son dessein. Loin d'être univoque, ce titre – "Lieux communs" –, pour être appréhendé dans sa pluralité de sens, invite à une suspension du jugement… Deux pistes non contradictoires, mais complémentaires se présentent. Il peut être entendu comme la réaffirmation dans l'œuvre de l'auteur metteur en scène de...  

"La vie secrète des vieux" Aimer même trop, même mal… Aimer jusqu'à la déchirure - 30/08/2024

"Telle est ma quête", ainsi parlait l'Homme de la Mancha de Jacques Brel au Théâtre des Champs-Élysées en 1968… Une quête qu'ont fait leur cette troupe de vieux messieurs et vieilles dames "indignes" (cf. "La vieille dame indigne" de René Allio, 1965, véritable ode à la liberté) avides de vivre "jusqu'au bout" (ouaf… la crudité revendiquée de leur langue émancipée y autorise) ce qui constitue,...  

"Le fléau" Immersion théâtrale shakespearienne totale ! - 29/08/2024

Dans une très belle adaptation, reprenant en grande partie "Mesure pour mesure", Léonard Matton fait de Shakespeare un grand moment d'intensité de théâtre immersif où le spectateur se retrouve au beau milieu de la cour d'honneur du Palais-Royal, entouré de personnages en proie à des passions aussi contraires que la pruderie, la débauche, la fidélité et la trahison. Cela démarre comme un récit,...  

"Passeport"… À bas le racisme ! - 21/08/2024

Pour sa dernière création théâtrale, Alexis Michalik traite de l'identité en abordant le racisme au travers de ses reniements, raccourcis et contradictions. Avec, entre autres, les personnages d'Issa, venu d'Érythrée, et de Lucas, né à Mayotte, c'est toute la question de l'appartenance et de l'acceptation de soi et de l'autre qui est posée dans un cadre géographique qui aurait pu donner lieu...  

"Truffaut Correspondance" L'enfant sauvage du cinéma français, l'homme qui aimait que la vérité soit dite - 24/08/2024

François Truffaut tel qu'en lui-même, c'est l'enjeu du passage au plateau des morceaux choisis de la correspondance du cinéaste phare de la nouvelle vague… grand amoureux du genre épistolaire, homme dans toute la vérité de sa nature, homme doué d'une sensibilité blessée mâtinée d'une intelligence aiguisée et d'un caractère ne souffrant aucune concession. Lui qui vécut en effet jusqu'à ses douze...  

"Le Radeau de la méduse" Traverser l'histoire de l'œuvre, entre érudition finement dosée et jeu théâtral maîtrisé - 22/08/2024

Grâce à une drôle de conférencière, plutôt autoritaire et désabusée, mais pleine d'humour, découvrez les secrets de ce gigantesque tableau du Louvre qui choqua et ébranla le trône en 1819, sous le règne de Louis XVIII. Revivez parallèlement les bouleversements artistiques et politiques du début du XIXe siècle. Décidément, le théâtre en a du pouvoir ! Ce n'est pas le Festival d'Avignon qui nous...  

"Gaviota" (d'après "La Mouette" de Tchekhov) Les âmes fantômes incarnées par la grâce de cinq belles interprétations - 26/06/2024

Le dispositif mêle les interprètes aux spectateurs dans cette petite cabane de toile, la cabane Napo, montée au bord de la pinède du Domaine d'O, lors de ce Printemps des Comédiens 2024. Ici pas de scène, pas d'entrées et de sorties des personnages, pas de décors évolutifs, ni de changements de costumes, ni de projections vidéos, à part le texte en français projeté aux quatre horizons (le...  

Maria Casarès et Albert Camus se retrouvent pour une heure dans un nouveau théâtre de Poitiers - 18/06/2024

Ouverte en septembre 2023, cette nouvelle salle finit sa saison en rendant hommage à celle qui lui a donné son nom : Maria Casarès. Une salle citadine née de la volonté des deux codirecteurs de la Maison Maria Casarès, Matthieu Roy et Johanna Silberstein. C'est dans les anciennes écuries de la caserne de Poitiers que deux grandes salles voûtées abritent maintenant ce nouveau lieu destiné à...  

Avec "Villa", l'héritage des exactions de Pinochet deviennent corps - 17/06/2024

Il y a des théâtres qui ont la mémoire à vif, des spectacles où les acteurs ne sont jamais très loin, sous la carapace des textes à dire, de puiser dans leurs propres réminiscences, dans les propres traumatismes de leurs familles, dans l'histoire proche et cuisante du pays. "Villa", toujours hanté par les fantômes de la dictature, est de ceux-là. C'est une simple réunion comme il en existe dans...  
1 2 3 4 5 » ... 122






À Découvrir

•Off 2024• "Mon Petit Grand Frère" Récit salvateur d'un enfant traumatisé au bénéfice du devenir apaisé de l'adulte qu'il est devenu

Comment dire l'indicible, comment formuler les vagues souvenirs, les incertaines sensations qui furent captés, partiellement mémorisés à la petite enfance. Accoucher de cette résurgence voilée, diffuse, d'un drame familial ayant eu lieu à l'âge de deux ans est le parcours théâtral, étonnamment réussie, que nous offre Miguel-Ange Sarmiento avec "Mon petit grand frère". Ce qui aurait pu paraître une psychanalyse impudique devient alors une parole salvatrice porteuse d'un écho libératoire pour nos propres histoires douloureuses.

© Ève Pinel.
9 mars 1971, un petit bonhomme, dans les premiers pas de sa vie, goûte aux derniers instants du ravissement juvénile de voir sa maman souriante, heureuse. Mais, dans peu de temps, la fenêtre du bonheur va se refermer. Le drame n'est pas loin et le bonheur fait ses valises. À ce moment-là, personne ne le sait encore, mais les affres du destin se sont mis en marche, et plus rien ne sera comme avant.

En préambule du malheur à venir, le texte, traversant en permanence le pont entre narration réaliste et phrasé poétique, nous conduit à la découverte du quotidien plein de joie et de tendresse du pitchoun qu'est Miguel-Ange. Jeux d'enfants faits de marelle, de dinette, de billes, et de couchers sur la musique de Nounours et de "bonne nuit les petits". L'enfant est affectueux. "Je suis un garçon raisonnable. Je fais attention à ma maman. Je suis un bon garçon." Le bonheur est simple, mais joyeux et empli de tendresse.

Puis, entre dans la narration la disparition du grand frère de trois ans son aîné. La mort n'ayant, on le sait, aucune morale et aucun scrupule à commettre ses actes, antinaturelles lorsqu'il s'agit d'ôter la vie à un bambin. L'accident est acté et deux gamins dans le bassin sont décédés, ceux-ci n'ayant pu être ramenés à la vie. Là, se révèle l'avant et l'après. Le bonheur s'est enfui et rien ne sera plus comme avant.

Gil Chauveau
14/06/2024
Spectacle à la Une

•Off 2024• Lou Casa "Barbara & Brel" À nouveau un souffle singulier et virtuose passe sur l'œuvre de Barbara et de Brel

Ils sont peu nombreux ceux qui ont une réelle vision d'interprétation d'œuvres d'artistes "monuments" tels Brel, Barbara, Brassens, Piaf et bien d'autres. Lou Casa fait partie de ces rares virtuoses qui arrivent à imprimer leur signature sans effacer le filigrane du monstre sacré interprété. Après une relecture lumineuse en 2016 de quelques chansons de Barbara, voici le profond et solaire "Barbara & Brel".

© Betül Balkan.
Comme dans son précédent opus "À ce jour" (consacré à Barbara), Marc Casa est habité par ses choix, donnant un souffle original et unique à chaque titre choisi. Évitant musicalement l'écueil des orchestrations "datées" en optant systématiquement pour des sonorités contemporaines, chaque chanson est synonyme d'une grande richesse et variété instrumentales. Le timbre de la voix est prenant et fait montre à chaque fois d'une émouvante et artistique sincérité.

On retrouve dans cet album une réelle intensité pour chaque interprétation, une profondeur dans la tessiture, dans les tonalités exprimées dont on sent qu'elles puisent tant dans l'âme créatrice des illustres auteurs que dans les recoins intimes, les chemins de vie personnelle de Marc Casa, pour y mettre, dans une manière discrète et maîtrisée, emplie de sincérité, un peu de sa propre histoire.

"Nous mettons en écho des chansons de Barbara et Brel qui ont abordé les mêmes thèmes mais de manières différentes. L'idée est juste d'utiliser leur matière, leur art, tout en gardant une distance, en s'affranchissant de ce qu'ils sont, de ce qu'ils représentent aujourd'hui dans la culture populaire, dans la culture en général… qui est énorme !"

Gil Chauveau
19/06/2024
Spectacle à la Une

•Off 2024• "Un Chapeau de paille d'Italie" Une version singulière et explosive interrogeant nos libertés individuelles…

… face aux normalisations sociétales et idéologiques

Si l'art de générer des productions enthousiastes et inventives est incontestablement dans l'ADN de la compagnie L'Éternel Été, l'engagement citoyen fait aussi partie de la démarche créative de ses membres. La présente proposition ne déroge pas à la règle. Ainsi, Emmanuel Besnault et Benoît Gruel nous offrent une version décoiffante, vive, presque juvénile, mais diablement ancrée dans les problématiques actuelles, du "Chapeau de paille d'Italie"… pièce d'Eugène Labiche, véritable référence du vaudeville.

© Philippe Hanula.
L'argument, simple, n'en reste pas moins source de quiproquos, de riantes ficelles propres à la comédie et d'une bonne dose de situations grotesques, burlesques, voire absurdes. À l'aube d'un mariage des plus prometteurs avec la très florale Hélène – née sans doute dans les roses… ornant les pépinières parentales –, le fringant Fadinard se lance dans une quête effrénée pour récupérer un chapeau de paille d'Italie… Pour remplacer celui croqué – en guise de petit-déj ! – par un membre de la gent équestre, moteur exclusif de son hippomobile, ci-devant fiacre. À noter que le chapeau alimentaire appartenait à une belle – porteuse d'une alliance – en rendez-vous coupable avec un soldat, sans doute Apollon à ses heures perdues.

N'ayant pas vocation à pérenniser toute forme d'adaptation académique, nos deux metteurs en scène vont imaginer que cette histoire absurde est un songe, le songe d'une nuit… niché au creux du voyage ensommeillé de l'aimable Fadinard. Accrochez-vous à votre oreiller ! La pièce la plus célèbre de Labiche se transforme en une nouvelle comédie explosive, électro-onirique ! Comme un rêve habité de nounours dans un sommeil moelleux peuplé d'êtres extravagants en doudounes orange.

Gil Chauveau
26/03/2024