Lumières bleutées des éclairages, lilliputien baquet d'eau au premier plan évoquant dans une autre dimension la mer immense (une Alice au pays des désastres), cubes esthétiquement entassés figurant la cabine de pilotage du rafiot… le décor offrant le cadre de ce récit des profondeurs étant planté, Shauba, la jeune fille africaine, va pouvoir raconter - se raconter - l'histoire de ses origines et de ses rêves "échoués".
Mahama au grand cœur, qui faisait siffler les f et les autres consonnes comme seuls les "Afffricains" n'étant pas passés par l'école savent le faire, c'est à elle, à cette tante bien-aimée qu'elle adresse ses dernières paroles. C'est elle à qui elle doit son "évasion" de la terre bénie d'Afrique où elle avait cependant faim, trois années d'économie et de préparatifs. C'est elle qu'elle implore maintenant pour l'aider à mourir dans les eaux de la Mare nostrum des Romains, faute de ne pouvoir atteindre la Ville éternelle et d'y réaliser ses rêves fous d'études et de travail.
Effrayants, les poissons qui tournent autour d'elle mêlant leur danse au ballet des cadavres en suspension. Et pourtant "le voyage" avait été minutieusement préparé… Jusqu'aux lunettes de soleil pour affronter la lumière vive du pont et pouvoir ainsi contrôler que les passeurs s'acquittent de la destination prévue, Lampedusa, aisé à reconnaître grâce aux cartes postales montrées. Et la mer était calme et le temps serein… Alors pourquoi ce naufrage ?
La lubricité des passeurs qui s'étaient plu à entasser les femmes et les hommes en les accouplant créant une pyramide instable, elle "convoitée" par un jeune matelot bientôt mis en concurrence avec un plus vieux qui entendait bien profiter de celle qui veut venir en Europe pour s'enrichir avec les "capitttalllistes", la lutte des deux hommes pour s'approprier le corps de la jeune fille, et le déséquilibre fatal de la gîte qui s'ensuivit, jusqu'à en faire chavirer l'embarcation.
Mahama au grand cœur, qui faisait siffler les f et les autres consonnes comme seuls les "Afffricains" n'étant pas passés par l'école savent le faire, c'est à elle, à cette tante bien-aimée qu'elle adresse ses dernières paroles. C'est elle à qui elle doit son "évasion" de la terre bénie d'Afrique où elle avait cependant faim, trois années d'économie et de préparatifs. C'est elle qu'elle implore maintenant pour l'aider à mourir dans les eaux de la Mare nostrum des Romains, faute de ne pouvoir atteindre la Ville éternelle et d'y réaliser ses rêves fous d'études et de travail.
Effrayants, les poissons qui tournent autour d'elle mêlant leur danse au ballet des cadavres en suspension. Et pourtant "le voyage" avait été minutieusement préparé… Jusqu'aux lunettes de soleil pour affronter la lumière vive du pont et pouvoir ainsi contrôler que les passeurs s'acquittent de la destination prévue, Lampedusa, aisé à reconnaître grâce aux cartes postales montrées. Et la mer était calme et le temps serein… Alors pourquoi ce naufrage ?
La lubricité des passeurs qui s'étaient plu à entasser les femmes et les hommes en les accouplant créant une pyramide instable, elle "convoitée" par un jeune matelot bientôt mis en concurrence avec un plus vieux qui entendait bien profiter de celle qui veut venir en Europe pour s'enrichir avec les "capitttalllistes", la lutte des deux hommes pour s'approprier le corps de la jeune fille, et le déséquilibre fatal de la gîte qui s'ensuivit, jusqu'à en faire chavirer l'embarcation.
La jeune fille, réfugiée tout en haut des cubes instables de la cabine de pilotage pour tenter en vain d'échapper à ses prédateurs, le jeu de miroirs reflétant les profondeurs des eaux mouvantes sous leurs pieds, tout dans la scénographie sert l'illusion du réel présenté à notre imaginaire. De même, lorsque plongeant sa tête dans le baquet d'eau, on entend sa respiration s'étouffer, le bruit des bulles d'air venant crever à la surface, la mise en jeu se révèle d'une étonnante efficacité.
Et puis ce cri empreint d'humour décalé qui, en créant une rupture de ton, nous permet à nous de reprendre notre respiration altérée par le tragique des situations représentées… I["Au moment où je me noie, j'ai besoin de te le dire, les Africaines doivent aller en Europe en avion, pas en bateau !"]I. Pause vite interrompue par la vision monstrueuse d'un espadon dévorant le contenu encore chaud de l'estomac d'un cadavre dépecé.
Mais le plus inacceptable peut-être pour celle qui sait que les minutes lui sont comptées, c'est de mourir accompagnée par les mots assénés par le passeur prédateur afin de l'humilier. Ces mots résonnent en elle comme une vérité effrayante : n'a-t-elle pas trahi elle-même son Afrique en cédant aux chants des sirènes du "capitttalllisme" triomphant ? Quitter sa terre pour l'appât de l'argent ?... Et touchant alors le fond, elle rejoint le sable sous-marin de Lampedusa Beach, sa dernière demeure humide, elle dont les derniers désirs furent pour le soleil d'Afrique.
Émouvante traversée d'une odyssée fictionnelle faisant écho à celle vécue réellement par les I["18 400 personnes mortes ou disparues en Méditerranée depuis 2014"]I - chiffre donné par Amnesty International -, Lampedusa Beach "réalise" un exploit. Celui de nous immerger dans un univers dont la beauté scénographique et les éclairages bleutés contrastent avec l'inhumanité du sort réservé aux réfugiés I["qui crèvent comme des chiens, des chiens qui disparaissent au fil de l'eau, et vont pourrir au loin"]I.
Et puis ce cri empreint d'humour décalé qui, en créant une rupture de ton, nous permet à nous de reprendre notre respiration altérée par le tragique des situations représentées… I["Au moment où je me noie, j'ai besoin de te le dire, les Africaines doivent aller en Europe en avion, pas en bateau !"]I. Pause vite interrompue par la vision monstrueuse d'un espadon dévorant le contenu encore chaud de l'estomac d'un cadavre dépecé.
Mais le plus inacceptable peut-être pour celle qui sait que les minutes lui sont comptées, c'est de mourir accompagnée par les mots assénés par le passeur prédateur afin de l'humilier. Ces mots résonnent en elle comme une vérité effrayante : n'a-t-elle pas trahi elle-même son Afrique en cédant aux chants des sirènes du "capitttalllisme" triomphant ? Quitter sa terre pour l'appât de l'argent ?... Et touchant alors le fond, elle rejoint le sable sous-marin de Lampedusa Beach, sa dernière demeure humide, elle dont les derniers désirs furent pour le soleil d'Afrique.
Émouvante traversée d'une odyssée fictionnelle faisant écho à celle vécue réellement par les I["18 400 personnes mortes ou disparues en Méditerranée depuis 2014"]I - chiffre donné par Amnesty International -, Lampedusa Beach "réalise" un exploit. Celui de nous immerger dans un univers dont la beauté scénographique et les éclairages bleutés contrastent avec l'inhumanité du sort réservé aux réfugiés I["qui crèvent comme des chiens, des chiens qui disparaissent au fil de l'eau, et vont pourrir au loin"]I.
"Lampedusa Beach"
Premier volet de "La Trilogie du Naufrage de Lina Prosa".
Traduction de l'italien : Jean-Paul Manganaro.
Mise en scène : Eleonora Romeo.
Interprétation : Stefania Ventura.
Création lumière : Damien Gandolfo et Franck Michallet.
Musiques originales : Jamespange et Éric Craviatto.
Conception graphique : Johann Fournier.
Cie ERRE.
Production Le Buro Avignon.
Durée : 1 h 10.
Tout public à partir de 14 ans.
•Avignon Off 2019•
Du 5 au 24 juillet 2019.
Tous les jours à 22 h 30, relâche les 11 et 18.
Théâtre des Carmes André Benedetto
6, place des Carmes.
Réservations : 04 90 82 20 47.
>> theatredescarmes.com
Traduction de l'italien : Jean-Paul Manganaro.
Mise en scène : Eleonora Romeo.
Interprétation : Stefania Ventura.
Création lumière : Damien Gandolfo et Franck Michallet.
Musiques originales : Jamespange et Éric Craviatto.
Conception graphique : Johann Fournier.
Cie ERRE.
Production Le Buro Avignon.
Durée : 1 h 10.
Tout public à partir de 14 ans.
•Avignon Off 2019•
Du 5 au 24 juillet 2019.
Tous les jours à 22 h 30, relâche les 11 et 18.
Théâtre des Carmes André Benedetto
6, place des Carmes.
Réservations : 04 90 82 20 47.
>> theatredescarmes.com