La Revue du Spectacle, le magazine des arts de la scène et du spectacle vivant. Infos théâtre, chanson, café-théâtre, cirque, arts de la rue, agenda, CD, etc.



Augmenter la taille du texte
Diminuer la taille du texte
Partager
Danse

La fluide contemporanéité aux accents jazzy des chorégraphies d'Alvin Ailey

Avec l'Alvin Ailey American Dance Theater et autour des chorégraphies d'Alvin Ailey, la danse classique est bousculée par une expression corporelle moderne, portée par des chants traditionnels de negro-spiritual et le jazz de Duke Ellington.



"Night Creature" d'Alvin Ailey © Gert Krautbauer.
"Night Creature" d'Alvin Ailey © Gert Krautbauer.
Pour cette neuvième journée des "Étés de la Danse", qui en compte vingt-sept, "Night Creature", "Pas de Duke", "The River" et "Revelation" composaient le spectacle du jour avec des chorégraphies d'Alvin Ailey et des musiques de Duke Ellington, à l'exception de "Revelation" (chants traditionnels).

"Night Creature" est une danse de groupe avec de très élégants mouvements chorégraphiques où, autour de déplacements rapides et gracieux de talons, pointes et plats des pieds, les enchaînements s'effectuent de façon très élégante. La chorégraphie met en exergue aussi de façon humoristique le postérieur des danseurs dans leurs mouvements et leurs déplacements avec des déhanchés très délicats.

"Pas de Duke" est un pas de 2 dans lequel viennent se glisser les solos des danseurs. Nous sommes dans une gestuelle et une mise en espace qui allient des mouvements de séparation et de rencontre entre les deux interprètes. Ceux-ci sont amples, bien dirigés vers le haut avec de longs étirements sur les côtés qui donnent une présence et de l'amplitude corporelle aux artistes.

"The River" d'Alvin Ailey © Paul Kolnik.
"The River" d'Alvin Ailey © Paul Kolnik.
"The River" est dans une ambiance aquatique. La scénographie fait penser au tableau de Vallotton, "Le bain au soir d'été", où des danseurs, en lieu et place des baigneurs(es), jouent de mouvements qui se déhanchent graduellement, tout le long du corps, comme pour savourer une étendue d'eau que la mise en scène inspire. Ils ont des expressions unisexes, très fluides où est gommée leur masculinité car appuyée par une féminité très marquée. Ils se déplacent sur trois axes horizontaux. Un danseur se détache du groupe et incarne une femme dans ses déplacements. La danse se moque ainsi du sexe de l'interprète qui peut incarner un autre sexe par des mouvements et une gestuelle appropriés.

"Revelation" finit le spectacle. La chorégraphie est découpée en séquences très différentes les unes des autres avec le negro-spiritual comme trame de fond. Celles-ci sont soit sous forme de recueillement, presque religieux, soit de solo enchaînant des mouvements de danse classique habillés de contemporanéité, soit de danses très rythmées où le groupe existe au-delà de l'identité de chaque artiste. C'est ce qui fait la caractéristique de "Revelation" où, sur du negro-spiritual, les danses s'enchaînent aussi singulières artistiquement et rythmiquement les unes que les autres.

"Pas de Duke" d'Alvin Ailey © Siggul Visual Arts Masters.
"Pas de Duke" d'Alvin Ailey © Siggul Visual Arts Masters.
La musique est chez Alvin Ailey l'un des éléments fondateurs, avec des danseurs qui suivent toujours le rythme de celle-ci. Dans des mouvements où la rectitude nourrit à la base la gestuelle, l'interprète fait de son corps un média élastique, malléable où la fluidité devient reine.

Alvin Ailey American Dance Theater.
Directeur artistique : Robert Battle.
Directeur artistique associé : Masazumi Chaya.

"Night Creature" (1974).
Chorégraphie : Alvin Ailey.
Musique : Duke Ellington.
Costumes : Jane Greenwood (costumes recréés par Barbara Forbes).
Lumières : Chenault Spence.
1e partie avec Linda Celeste Sims, Vernard J. Gilmore et la compagnie.
2e partie avec Linda Celeste Sims, Glenn Allen Sims, Elisa Clark, Samantha Figgins, Danica Paulos, Fana Tesfagiorgis, Jacquelin Harris, Belen Pereyra, Renaldo Maurice, Kanji Segawa, Jeroboam Bozeman, Collin Heyward, Daniel Harder, Michael Jackson, Jr.
3e partie avec Linda Celeste Sims, Vernard J. Gilmore et la compagnie.

"Revelations" d'Alvin Ailey © Nan Melville.
"Revelations" d'Alvin Ailey © Nan Melville.
"Pas de Duke" (1976).
Chorégraphie : Alvin Ailey (ballet remonté par Masazumi Chaya).
Musique : Duke Ellington.
Costumes : Rouen Ter-Arutunian.
Lumières : Chenault Spence.
Avec : Jacqueline Green, Kriven Douthit-Boyd.

"The River" (1970).
Chorégraphie : Alvin Ailey (ballet remonté par Masazumi Chaya).
Musique : Duke Ellington.
Arrangements : Martha Johnson.
Costumes : A. Christina Giannini.
Lumières : Chenault Spence.
Avec la compagnie.

"Revelations" (1960).
Chorégraphie : Alvin Ailey.
Musique : Chants traditionnels.
Costumes : Ves Harper (costumes pour "Rocka My Soul" redessinés par Barbara Forbes).
Lumières : Nicola Cernovitch.
Avec la Compagnie.

Du 7 juillet au 1er août 2015.
Du lundi au vendredi à 20 h, samedi à 15 h et 20 h.
Théâtre du Châtelet, Paris 1er, 01 40 28 28 40.
>> chatelet-theatre.com
>> lesetesdeladanse.com

Safidin Alouache
Mardi 28 Juillet 2015

Théâtre | Danse | Concerts & Lyrique | À l'affiche | À l'affiche bis | Cirque & Rue | Humour | Festivals | Pitchouns | Paroles & Musique | Avignon 2017 | Avignon 2018 | Avignon 2019 | CédéDévédé | Trib'Une | RV du Jour | Pièce du boucher | Coulisses & Cie | Coin de l’œil | Archives | Avignon 2021 | Avignon 2022 | Avignon 2023 | Avignon 2024 | À l'affiche ter




Numéros Papier

Anciens Numéros de La Revue du Spectacle (10)

Vente des numéros "Collectors" de La Revue du Spectacle.
10 euros l'exemplaire, frais de port compris.






À Découvrir

"La Chute" Une adaptation réussie portée par un jeu d'une force organique hors du commun

Dans un bar à matelots d'Amsterdam, le Mexico-City, un homme interpelle un autre homme.
Une longue conversation s'initie entre eux. Jean-Baptiste Clamence, le narrateur, exerçant dans ce bar l'intriguant métier de juge-pénitent, fait lui-même les questions et les réponses face à son interlocuteur muet.

© Philippe Hanula.
Il commence alors à lever le voile sur son passé glorieux et sa vie d'avocat parisien. Une vie réussie et brillante, jusqu'au jour où il croise une jeune femme sur le pont Royal à Paris, et qu'elle se jette dans la Seine juste après son passage. Il ne fera rien pour tenter de la sauver. Dès lors, Clamence commence sa "chute" et finit par se remémorer les événements noirs de son passé.

Il en est ainsi à chaque fois que nous prévoyons d'assister à une adaptation d'une œuvre d'Albert Camus : un frémissement d'incertitude et la crainte bien tangible d'être déçue nous titillent systématiquement. Car nous portons l'auteur en question au pinacle, tout comme Jacques Galaud, l'enseignant-initiateur bien inspiré auprès du comédien auquel, il a proposé, un jour, cette adaptation.

Pas de raison particulière pour que, cette fois-ci, il en eût été autrement… D'autant plus qu'à nos yeux, ce roman de Camus recèle en lui bien des considérations qui nous sont propres depuis toujours : le moi, la conscience, le sens de la vie, l'absurdité de cette dernière, la solitude, la culpabilité. Entre autres.

Brigitte Corrigou
09/10/2024
Spectacle à la Une

"Dub" Unité et harmonie dans la différence !

La dernière création d'Amala Dianor nous plonge dans l'univers du Dub. Au travers de différents tableaux, le chorégraphe manie avec rythme et subtilité les multiples visages du 6ᵉ art dans lequel il bâtit un puzzle artistique où ce qui lie l'ensemble est une gestuelle en opposition de styles, à la fois virevoltante et hachée, qu'ondulante et courbe.

© Pierre Gondard.
En arrière-scène, dans une lumière un peu sombre, la scénographie laisse découvrir sept grands carrés vides disposés les uns sur les autres. Celui situé en bas et au centre dessine une entrée. L'ensemble représente ainsi une maison, grande demeure avec ses pièces vides.

Devant cette scénographie, onze danseurs investissent les planches à tour de rôle, chacun y apportant sa griffe, sa marque par le style de danse qu'il incarne, comme à l'image du Dub, genre musical issu du reggae jamaïcain dont l'origine est due à une erreur de gravure de disque de l'ingénieur du son Osbourne Ruddock, alias King Tubby, en mettant du reggae en version instrumentale. En 1967, en Jamaïque, le disc-jockey Rudy Redwood va le diffuser dans un dance floor. Le succès est immédiat.

L'apogée du Dub a eu lieu dans les années soixante-dix jusqu'au milieu des années quatre-vingt. Les codes ont changé depuis, le mariage d'une hétérogénéité de tendances musicales est, depuis de nombreuses années, devenu courant. Le Dub met en exergue le couple rythmique basse et batterie en lui incorporant des effets sonores. Awir Leon, situé côté jardin derrière sa table de mixage, est aux commandes.

Safidin Alouache
17/12/2024
Spectacle à la Une

"R.O.B.I.N." Un spectacle jeune public intelligent et porteur de sens

Le trio d'auteurs, Clémence Barbier, Paul Moulin, Maïa Sandoz, s'emparent du mythique Robin des Bois avec une totale liberté. L'histoire ne se situe plus dans un passé lointain fait de combats de flèches et d'épées, mais dans une réalité explicitement beaucoup plus proche de nous : une ville moderne, sécuritaire. Dans cette adaptation destinée au jeune public, Robin est un enfant vivant pauvrement avec sa mère et sa sœur dans une sorte de cité tenue d'une main de fer par un être sans scrupules, richissime et profiteur.

© DR.
C'est l'injustice sociale que les auteurs et la metteure en scène Maïa Sandoz veulent mettre au premier plan des thèmes abordés. Notre époque, qui veut que les riches soient de plus en plus riches et les pauvres de plus pauvres, sert de caisse de résonance extrêmement puissante à cette intention. Rien n'étonne, en fait, lorsque la mère de Robin et de sa sœur, Christabelle, est jetée en prison pour avoir volé un peu de nourriture dans un supermarché pour nourrir ses enfants suite à la perte de son emploi et la disparition du père. Une histoire presque banale dans notre monde, mais un acte que le bon sens répugne à condamner, tandis que les lois économiques et politiques condamnent sans aucune conscience.

Le spectacle s'adresse au sens inné de la justice que portent en eux les enfants pour, en partant de cette situation aux allures tristement documentaires et réalistes, les emporter vers une fiction porteuse d'espoir, de rires et de rêves. Les enfants Robin et Christabelle échappent aux services sociaux d'aide à l'enfance pour s'introduire dans la forêt interdite et commencer une vie affranchie des règles injustes de la cité et de leur maître, quitte à risquer les foudres de la justice.

Bruno Fougniès
13/12/2024