La Revue du Spectacle, le magazine des arts de la scène et du spectacle vivant. Infos théâtre, chanson, café-théâtre, cirque, arts de la rue, agenda, CD, etc.



Augmenter la taille du texte
Diminuer la taille du texte
Partager
Coulisses & Cie

Day first ou la découverte des "enfants terribles", alias les Géotrupes…

Les Géotrupes chez Euripide, épisode 1

Débarquement au milieu d’une troupe qu’on découvre tout juste, pour une pièce qu’on n’a jamais entendue, d’un auteur si peu joué et dont il ne nous reste en mémoire que les bribes d’un mythe. Pour Christian Esnay, ce sont les premiers jours de répétition d’un spectacle qui ne sera présenté que fin janvier. Pour la troupe (les Géotrupes), c’est plusieurs semaines d’échanges, de doutes, mais aussi de fous rires. Cinq mois, c’est long. Et c’est court, aussi. Surtout pour un tel projet.



Salle de répétition du Théâtre © S.L.
Salle de répétition du Théâtre © S.L.
Début septembre. C’est la rentrée. Ou presque. La scène châtillonnaise est encore silencieuse. Tout à coup, un rire éclate comme des bulles de cristal, c’est celui d’une certaine Pauline. La tonalité est puissante. Il détonne au milieu de ce plateau vide. Puis, c’est Bello qu’on appelle, on le cherche, il est l’éternel absent. Mais jamais très loin, il déboule en chantant, le sourire aux lèvres, l’œil brillant et le bonjour généreux. Côté jardin, Sylvie pianote sur un accordéon, elle écrit, chantonne, gomme quelques notes puis recommence. Rose, assise au milieu du plateau, relit son texte et jette au hasard quelques mots qui parviennent jusqu’à nous. Christian, antithèse du metteur en scène tout-puissant et perché dans toute sa hauteur, est assis dans la salle. Il lève à peine la tête, car il tente désespérément de comprendre le fonctionnement de son téléphone portable...

Règne un léger vent de mauvais élèves et d’école buissonnière. Ah ! Qu’on s’y sent bien. Le théâtre s’éveille à peine que déjà on aime ces voix colorées et ces billes de clown.

Christian Esnay © S.L.
Christian Esnay © S.L.
Mais les présentations, on s’les fera plus tard…On aura tout le temps de faire connaissance.
Et puis, les enfants terribles, ça ne se découvre pas comme ça.

En attendant, essayons de garder notre sérieux puisqu’il s’agit tout de même de :
- tragédie,
- de meurtres d’enfants,
- de mère désœuvrée,
- et de règne déchu.

Chez Euripide, le sang coule à flots et les Grecs demeurent intraitables face au désespoir d’Hécube, cette fameuse reine qui a perdu ses 50 enfants lors de la guerre de Troie.

C’est vraiment pas gai tout ça. On retient donc son sourire et on tente de rester sérieux. Pourtant, pas facile avec les Géotrupes, le rire n’est jamais loin. Il effleure les babines, et titille la jolie frimousse des comédiens.

- Ah, mais Christian, c’est parce que c’est le premier jour que c’est comme ça ?
- Mais non, pas du tout. Je suis surtout convaincu que c’est comme ça qu’Euripide voyait la tragédie…

Je relis donc "Hécube" dans la traduction de Jean Delabroy. Après celle des éditions Gallimard, les différences sont notables dans la variation, le rythme et la modernité du vocabulaire choisi. Euripide en devient presque un jeu... d'enfants terribles (!), drôle, sinon coloré. Ici on "perfuse" le malheur à coups de chansons.

Christian Esnay nous explique alors qu’Euripide est tout sauf morose. Il serait la version anglo-saxonne du théâtre, le Shakespeare des temps antiques qu’on doit absolument réhabiliter. En bref, la monstruosité à l’état pur, une forme de grotesque (comme dirait Hugo), un théâtre à la fois varié et béant.

Là on parle de "Hécube", mais qu’en est-il des trois autres pièces ("Hélène", "Oreste" et le "Cyclope"), constitutives de la tétralogie et de ces 5 h 30 de spectacles attendues ?

Le premier jour se termine. On a réussi à entrouvrir la porte des Géotrupes. L’entrebâillement est encore modeste, mais on a au moins compris qu’on n’allait pas s’ennuyer…

À venir : Du projet aux répétitions, entre rires et chansons.

Tétralogie : "Hécube", "Hélène, "Oreste" et "le Cyclope"

Pauline Dubreuil © S.L.
Pauline Dubreuil © S.L.
Textes : Euripide.
Traduction : Jean Delabroy.
Mise en scène : Christian Esnay.
Avec : Belaïd Boudellal, Rose Mary D’Orros, Pauline Dubreuil, Christian Esnay, Sylvie Magand.
Musiques : Martine-Joséphine Thomas, Isabelle Van Brabant, Rose Mary D’orros.
Arrangements musicaux : Sylvie Magand.
Scénographie : François Mercier.
Lumière : Bruno Goubert.
Costumes : Rose Mary D’orros.
Son : Jean-Baptiste Lecomte, Régis Sagot.

Du 21 janvier au 5 février 2012.
Jeudi 26 et vendredi 27 janvier à 20 h 30 : "Hélène" et "Hécube".
Jeudi 2 et vendredi 3 février à 20 h 30 : "Oreste" et "Le Cyclope".
Les samedis à 15 h 30 : intégrale.
Les dimanches à 13 h : intégrale.
Relâche les lundi, mardi et mercredi.
Théâtre à Châtillon, Châtillon (92), 01 55 48 06 90.
Bar et restaurant ouvert dès 19 h et après le spectacle.

>> theatreachatillon.com
>> theatreachatillon.blogspot.com

>> Lire aussi : Avant-billet pour une avant avant-première : allons, en coulisses ! Et que les souris dansent !

Mardi 13 Décembre 2011

Théâtre | Danse | Concerts & Lyrique | À l'affiche | À l'affiche bis | Cirque & Rue | Humour | Festivals | Pitchouns | Paroles & Musique | Avignon 2017 | Avignon 2018 | Avignon 2019 | CédéDévédé | Trib'Une | RV du Jour | Pièce du boucher | Coulisses & Cie | Coin de l’œil | Archives | Avignon 2021 | Avignon 2022 | Avignon 2023 | Avignon 2024 | À l'affiche ter





Numéros Papier

Anciens Numéros de La Revue du Spectacle (10)

Vente des numéros "Collectors" de La Revue du Spectacle.
10 euros l'exemplaire, frais de port compris.






À Découvrir

"Différente" Carolina ou "Cada uno es un mundo (Chacun est un monde)"

Star internationale à la frange rouge, Carolina est de retour en France, après sa tournée mondiale. Heureuse de retrouver son public préféré, elle interprète en live des chansons populaires qui touchent le cœur de toutes les générations.

© Audrey Bären.
Mais qui est donc cette incontournable Carolina ? Ou, plus exactement, qui se cache derrière cette artiste plutôt extravagante, à la folie douce ? De qui est-elle l'extension, au juste ?

L'éternelle question autour de l'acte créatif nous interpelle souvent, et nous amène à nous demander quelles influences l'homme ou la femme ont-ils sur leurs "créatures" fabriquées de toutes pièces ! Quelles inspirations les ont portées ! Autant de questions qui peuvent nous traverser particulièrement l'esprit si tant est que l'on connaisse un peu l'histoire de Miguel-Ange Sarmiento !

Parce que ce n'est pas la première fois que Carolina monte sur scène… Décidément, elle en a des choses à nous dire, à chaque fois. Elle est intarissable. Ce n'est pas Rémi Cotta qui dira le contraire, lui qui l'accompagne depuis déjà dix ans et tire sur les ficelles bien huilées de sa vie bien remplie.

Rémi Cotta, artiste plasticien, graphiste, comédien, chanteur lyrique, ou encore metteur en scène, sait jouer de ses multiples talents artistiques pour confier une parole virevoltante à notre Carolina. Il suffit de se souvenir du très original "Carolina Show", en 2010, première émission de télé sans caméra ayant reçu de nombreux artistes connus ou moins connus ou le "Happy Show de Carolina", ainsi que les spectacles musicaux "Carolina, naissance d'une étoile", "Le Cabaret de Carolina", ou encore " Carolina, L'Intelligence Artificielle".

"Différente" est en réalité la maturation de plusieurs années de cabarets et de spectacles où Carolina chante pourquoi et comment elle est devenue une star internationale tout en traversant sa vie avec sa différence". Miguel-Ange Sarmiento.

Brigitte Corrigou
08/11/2024
Spectacle à la Une

"Tout va très bien !" Le Grand Orchestre du Splendid, bon pied bon œil, revient avec de la musique sur tous les fronts

Voir les choses en grand tout en restant léger ! Prendre du plaisir et, surtout, en donner ! Voilà la philosophie du Grand orchestre du Splendid qui régale le public depuis 1977. Bientôt 50 ans… Bientôt le jubilé. "De la musique avant toute chose" et vivre, vivre, vivre…

© Aurélie Courteille.
En 1977, quelques amis musiciens professionnels se retrouvent entre eux et décident de s'amuser en réinterprétant des classiques tels que ceux de Ray Ventura ou de Duke Ellington. Ce qui ne devait être qu'un plaisir entre copains devient vite un succès immédiat qui dure depuis presque 50 ans. Mais quel est donc le secret de cette longévité entre rythmes endiablés, joyeuses cadences et show totalement désopilants ?

Ne le leur demandez pas ! Ils ne vous en diront rien… Si tant est qu'ils le sachent eux-mêmes, tant cette énergie semble ancrée en eux depuis toutes ces années, indéfectible, salvatrice et impérissable.

Entre swing, jazz, salsa, reggae – quatre de leurs principales influences –, ou encore fiesta et mises en scène délirantes, les quatorze chanteuses et musiciens de l'Orchestre mythique enchantent le public, sur la scène du Café de la Gare, depuis le 11 novembre. Comme à leurs premières heures, et en échappant pourtant aux codes et impératifs de la mode, ils nous donnent irrésistiblement envie de monter sur scène pour danser à leurs côtés sur le plateau, frétiller, sautiller, et tout oublier l'espace de quelques instants. Leur énergie communicative est sans failles, et gagne sans commune mesure toutes les générations. Les cuivres étincellent. Les voix brillent de mille feux sonores.

Brigitte Corrigou
13/11/2024
Spectacle à la Une

"Jacques et Chirac" Un "Magouille blues"* décapant et burlesque n'occultant pas le mythe du président sympa et séducteur

Une comédie satirique enjouée sur le pouvoir, le mensonge et la Cinquième République portée par une distribution tonitruante et enthousiaste, dégustant avec gourmandise le texte de Régis Vlachos pour en offrir la clownesque et didactique substantifique moelle aux spectateurs. Cela est rendu aussi possible grâce à l'art sensible et maîtrisé de l'écriture de l'auteur qui mêle recherche documentaire affinée, humour décapant et bouffonnerie chamarrée pour dévoiler les tours et contours d'un Jacques sans qui Chirac ne serait rien.

© Fabienne Rappeneau.
Portraitiste décalé et impertinent d'une Histoire de France ou de l'Humanité aux galbes pas toujours gracieux dont surgissent parfois les affres de notre condition humaine, Régis Vlachos, "Cabaret Louise" (Louise Michel), "Dieu est mort" (Dieu, mieux vaut en rire)"Little Boy" (nom de la bombe larguée sur Hiroshima), revient avec un nouveau spectacle (création 2023) inspiré d'un des plus grands scandales de notre histoire contemporaine : la Françafrique. Et qui d'autre que Jacques Chirac – l'homme qui faisait la bise aux dictateurs – pouvait être convoqué au "tribunal" du rire et de la fantaisie par l'auteur facétieux, mais doté d'une conscience politique aiguë, qu'est Régis Vlachos.

Le président disparu en 2019 fut un homme complexe composé du Chirac "bulldozer" en politique, menteur, magouilleur, et du Jacques, individu affable, charmeur, mettant autant la main au cul des vaches que des femmes. Celui-ci fut d'abord attiré le communisme pour ses idéaux pacifistes. Il vendra même L'Humanité-dimanche devant l'église Saint-Sulpice.

La diversité des personnalités importantes qui marquèrent le début de son chemin politique joue tout autant la complexité : Michel Rocard, André Malraux et, bien sûr, Georges Pompidou comme modèle, Marie-France Garaud, Pierre Juillet… et Dassault comme portefeuille ! Le tout agrémenté de nombre de symboles forts et de cafouillages désastreux : le bruit et l'odeur, la pomme, le cul des vaches, les vacances à l'île Maurice, les amitiés avec les despotes infréquentables, l'affaire ELF, etc.

Gil Chauveau
03/11/2024