La Revue du Spectacle, le magazine des arts de la scène et du spectacle vivant. Infos théâtre, chanson, café-théâtre, cirque, arts de la rue, agenda, CD, etc.



Augmenter la taille du texte
Diminuer la taille du texte
Partager
Cirque & Rue

"F(r)iction"… poétique du sol et des airs

La CNAC, trentième promotion cette année, présente son spectacle de fin d'études à la Villette. Autour d'une mise en scène d'Antoine Rigot et d'Alice Ronflard, un travail d'écriture et d'improvisation a été effectué pour faire éclore une identité autant de groupe qu'individuelle.



© Christophe Raynaud de Lage.
© Christophe Raynaud de Lage.
C'est léger, aérien soutenu par des chants en solo ou en chœur accompagnés de jeux théâtraux et de musique. Tous les ingrédients sont réunis pour offrir une représentation sous le couvert du rêve et du réalisme. Rêve avec ce camaïeu beige où des voiles et un portique coréen, qui balance en hauteur des éléments tels que des filets, des cordes, font la scénographie. La représentation débute dans un mini chahut des interprètes enfermés dans une bulle plastique. Ils l'entrouvrent pour débouler sur la scène, comme s'ils s'éveillaient, prêts à jouer de leur liberté corporelle.

Le premier numéro est un mélange de contorsions et de banquine avec plusieurs artistes tenant par le bout des membres supérieurs Lucille Chalopin. Elle marche sur une vague de mains qui semble être un tissu mouvant sur lequel elle se déplace. Telle une tigresse, son corps dessine des courbures dans une mer instable.

Le spectacle est basé sur l'équilibre, les cabrioles, le chant et la musique. Ces deux derniers sont très présents et très contrastés. Ils sont comme des rappels à la réalité, une réalité soit enfantine avec les comptines théâtralisées, soit un brin révolté avec des chansons tranchantes dans leur interprétation pop rock. Nous sommes continuellement à la croisée des univers du sol et des airs. Le premier où le chant et la musique ont leur pré carré. Le deuxième où le corps est dans son élément.

© Christophe Raynaud de Lage.
© Christophe Raynaud de Lage.
Bien que ce ne soit pas le seul, la bascule coréenne est un moment très réussi autour de deux partenaires qui se jouent de celle-ci pour créer une relation faite d'équilibres dans une maîtrise où l'habilité taquine la zenitude avec soin.

L'humour est aussi au rendez-vous dans les attitudes. Des acrobaties sont effectuées dans un montage humain représentant un bateau où se tient, à la proue, un interprète qui fait avec son acolyte, à l'aide de ses mains en appui pour le premier et de son corps pour le deuxième, des sauts acrobatiques.

Le mât chinois est utilisé avec une prise des mains et des pieds par deux personnes au même moment. L'exercice devient une gymnastique où la prise de contact simultanée est bien coordonnée afin que les partenaires appréhendent chacun leur distance. Il y a tant d'agilités entre les acrobates que leur aisance en est animale, quasiment comme des singes.

Le numéro du fil souple sur lequel Poppy Plowman se déplace avec, autour d'elle, un artiste se balançant dans les hauteurs, crée un jeu constant de déséquilibres maîtrisés. C'est ce décalage constant entre le sol et les airs qui fait le cœur de la représentation dans une belle mise en scène où rêve et réalité sont les deux faces d'une même pièce.

"F(r)iction"

© Christophe Raynaud de Lage.
© Christophe Raynaud de Lage.
Mise en scène, dramaturgie et scénographie : Antoine Rigot et Alice Ronfard/Les Colporteurs.
Avec : Rémi Auzanneau, Hernan Elencwajg, Tanguy Pelayo, Baptiste Petit, Johannes Holm Veje, Martin Richard, Hamza Benlabied, Gwenn Buczkowski, Joad Caron, Lucille Chalopin, Noémie Deumié, Léa Leprêtre, Lili Parson, Poppy Plowman, Sandra Reichenberger, Jules Sadoughi, Léon Volet.
Composition musicale : Gaspard Panfiloff.
Création lumière : Julie Basse.
Création costumes : Fanny Gautreau.
Assistante costumes : Irène Bernaud.
Régie générale : Julien Mugica.
Régie plateau : Jacques Girier.
Régie lumière : Vincent Griffaut.
Régie son : Robert Benz.

Du 23 janvier au 17 février 2019.
Du mercredi au vendredi à 20 h, samedi à 19 h, dimanche à 16 h.
La Villette, Espace Chapiteau, Paris 19e, 01 40 03 75 75.
>> lavillette.com

© Christophe Raynaud de Lage.
© Christophe Raynaud de Lage.
Tournée
29, 30 et 31 mars : Cirque-Théâtre d'Elbeuf, Elbeuf (76).
19, 20, 21 et 22 mars :/ Théâtre municipal, Charleville-Mézières (08).
12, 13 et 14 avril : Le manège, Reims (51).
20, 21 et 22 avril : Cirk'Eole, Montigny-lès-Metz (57).

Safidin Alouache
Mardi 5 Février 2019

Nouveau commentaire :

Théâtre | Danse | Concerts & Lyrique | À l'affiche | À l'affiche bis | Cirque & Rue | Humour | Festivals | Pitchouns | Paroles & Musique | Avignon 2017 | Avignon 2018 | Avignon 2019 | CédéDévédé | Trib'Une | RV du Jour | Pièce du boucher | Coulisses & Cie | Coin de l’œil | Archives | Avignon 2021 | Avignon 2022 | Avignon 2023 | Avignon 2024 | À l'affiche ter





Numéros Papier

Anciens Numéros de La Revue du Spectacle (10)

Vente des numéros "Collectors" de La Revue du Spectacle.
10 euros l'exemplaire, frais de port compris.






À Découvrir

•Off 2024• "Mon Petit Grand Frère" Récit salvateur d'un enfant traumatisé au bénéfice du devenir apaisé de l'adulte qu'il est devenu

Comment dire l'indicible, comment formuler les vagues souvenirs, les incertaines sensations qui furent captés, partiellement mémorisés à la petite enfance. Accoucher de cette résurgence voilée, diffuse, d'un drame familial ayant eu lieu à l'âge de deux ans est le parcours théâtral, étonnamment réussie, que nous offre Miguel-Ange Sarmiento avec "Mon petit grand frère". Ce qui aurait pu paraître une psychanalyse impudique devient alors une parole salvatrice porteuse d'un écho libératoire pour nos propres histoires douloureuses.

© Ève Pinel.
9 mars 1971, un petit bonhomme, dans les premiers pas de sa vie, goûte aux derniers instants du ravissement juvénile de voir sa maman souriante, heureuse. Mais, dans peu de temps, la fenêtre du bonheur va se refermer. Le drame n'est pas loin et le bonheur fait ses valises. À ce moment-là, personne ne le sait encore, mais les affres du destin se sont mis en marche, et plus rien ne sera comme avant.

En préambule du malheur à venir, le texte, traversant en permanence le pont entre narration réaliste et phrasé poétique, nous conduit à la découverte du quotidien plein de joie et de tendresse du pitchoun qu'est Miguel-Ange. Jeux d'enfants faits de marelle, de dinette, de billes, et de couchers sur la musique de Nounours et de "bonne nuit les petits". L'enfant est affectueux. "Je suis un garçon raisonnable. Je fais attention à ma maman. Je suis un bon garçon." Le bonheur est simple, mais joyeux et empli de tendresse.

Puis, entre dans la narration la disparition du grand frère de trois ans son aîné. La mort n'ayant, on le sait, aucune morale et aucun scrupule à commettre ses actes, antinaturelles lorsqu'il s'agit d'ôter la vie à un bambin. L'accident est acté et deux gamins dans le bassin sont décédés, ceux-ci n'ayant pu être ramenés à la vie. Là, se révèle l'avant et l'après. Le bonheur s'est enfui et rien ne sera plus comme avant.

Gil Chauveau
14/06/2024
Spectacle à la Une

•Off 2024• Lou Casa "Barbara & Brel" À nouveau un souffle singulier et virtuose passe sur l'œuvre de Barbara et de Brel

Ils sont peu nombreux ceux qui ont une réelle vision d'interprétation d'œuvres d'artistes "monuments" tels Brel, Barbara, Brassens, Piaf et bien d'autres. Lou Casa fait partie de ces rares virtuoses qui arrivent à imprimer leur signature sans effacer le filigrane du monstre sacré interprété. Après une relecture lumineuse en 2016 de quelques chansons de Barbara, voici le profond et solaire "Barbara & Brel".

© Betül Balkan.
Comme dans son précédent opus "À ce jour" (consacré à Barbara), Marc Casa est habité par ses choix, donnant un souffle original et unique à chaque titre choisi. Évitant musicalement l'écueil des orchestrations "datées" en optant systématiquement pour des sonorités contemporaines, chaque chanson est synonyme d'une grande richesse et variété instrumentales. Le timbre de la voix est prenant et fait montre à chaque fois d'une émouvante et artistique sincérité.

On retrouve dans cet album une réelle intensité pour chaque interprétation, une profondeur dans la tessiture, dans les tonalités exprimées dont on sent qu'elles puisent tant dans l'âme créatrice des illustres auteurs que dans les recoins intimes, les chemins de vie personnelle de Marc Casa, pour y mettre, dans une manière discrète et maîtrisée, emplie de sincérité, un peu de sa propre histoire.

"Nous mettons en écho des chansons de Barbara et Brel qui ont abordé les mêmes thèmes mais de manières différentes. L'idée est juste d'utiliser leur matière, leur art, tout en gardant une distance, en s'affranchissant de ce qu'ils sont, de ce qu'ils représentent aujourd'hui dans la culture populaire, dans la culture en général… qui est énorme !"

Gil Chauveau
19/06/2024
Spectacle à la Une

•Off 2024• "Un Chapeau de paille d'Italie" Une version singulière et explosive interrogeant nos libertés individuelles…

… face aux normalisations sociétales et idéologiques

Si l'art de générer des productions enthousiastes et inventives est incontestablement dans l'ADN de la compagnie L'Éternel Été, l'engagement citoyen fait aussi partie de la démarche créative de ses membres. La présente proposition ne déroge pas à la règle. Ainsi, Emmanuel Besnault et Benoît Gruel nous offrent une version décoiffante, vive, presque juvénile, mais diablement ancrée dans les problématiques actuelles, du "Chapeau de paille d'Italie"… pièce d'Eugène Labiche, véritable référence du vaudeville.

© Philippe Hanula.
L'argument, simple, n'en reste pas moins source de quiproquos, de riantes ficelles propres à la comédie et d'une bonne dose de situations grotesques, burlesques, voire absurdes. À l'aube d'un mariage des plus prometteurs avec la très florale Hélène – née sans doute dans les roses… ornant les pépinières parentales –, le fringant Fadinard se lance dans une quête effrénée pour récupérer un chapeau de paille d'Italie… Pour remplacer celui croqué – en guise de petit-déj ! – par un membre de la gent équestre, moteur exclusif de son hippomobile, ci-devant fiacre. À noter que le chapeau alimentaire appartenait à une belle – porteuse d'une alliance – en rendez-vous coupable avec un soldat, sans doute Apollon à ses heures perdues.

N'ayant pas vocation à pérenniser toute forme d'adaptation académique, nos deux metteurs en scène vont imaginer que cette histoire absurde est un songe, le songe d'une nuit… niché au creux du voyage ensommeillé de l'aimable Fadinard. Accrochez-vous à votre oreiller ! La pièce la plus célèbre de Labiche se transforme en une nouvelle comédie explosive, électro-onirique ! Comme un rêve habité de nounours dans un sommeil moelleux peuplé d'êtres extravagants en doudounes orange.

Gil Chauveau
26/03/2024