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"Panique dans le seizième !" Les bons gens vous montrent du doigt Porte toujours ce que tu crois Même s'ils disent que ça ne se fait pas*

Angélique Kidjo, la "diva africaine" est sans doute écoutée dans les salons des hôtels particuliers du XVIᵉ. Elle est artiste, riche et noire aussi. Et ça, pour l'entre soi du monde bourgeois, ce n'est pas pareil que voir soudain défiler, sous un double vitrage étincelant, des migrants du monde entier, pour rejoindre un centre d'hébergement d'urgence qui leur est destiné.



© Manuel Panaget.
© Manuel Panaget.
Angélique Kidjo n'a pas été invitée à chanter lorsque cette racaille (aucune raison que cela ne fonctionne que pour les méchants délinquants des cités) blindée aux as s'est fortement opposée au projet mené par la ville de Paris et l'association "Aurore" d'installer ce centre Porte de Passy, à la lisière du bois de Boulogne.

Panique dans le seizième ! Pas contents les gens. Lors d'une réunion publique, en 2016, la violence des riverains opposés à cette installation considérée de leur point de vue comme "le nouveau Sangatte" avait fait grand bruit. Pas de jungle dans nos quartiers ! Et autres insultes envers les élus bien motivés à tenir cette promesse face aux délinquants bourgeois du XVIᵉ.

Le célèbre couple Pinçon-Charlot, délicieux à la ville comme à l'écran, en avait, à l'époque, tiré une bande dessinée humoristique et caustique à souhaits. Ce couple, depuis toujours, axe le cœur de leur travail autour de la grande bourgeoisie.

© Manuel Panaget.
© Manuel Panaget.
Ils y étaient donc en 2016, ont entendu et vu les cris des habitants du XVIᵉ, ils y ont même squatté, munis de leurs dépliants de campings devant l'Université Dauphine, pour ne rien rater de cette colère fortement exagérée des riches, soudains bousculés dans leurs vies quotidiennes.

Panique dans le seizième ! Proprios, costards et tailleurs cinq étoiles sont allés jusqu'à menacer d'un incendie !

Cette BD, "Panique dans le seizième !", est adaptée par la Compagnie Sémaphore et Compagnie du Chameau. La pièce se joue actuellement au Théâtre Essaïon jusqu'à fin novembre. Je conseille vivement ce spectacle pour plusieurs raisons :
L'hommage vibrant au couple Pinçon-Charlot, car si Michel Pinçon a quitté ce monde, il est indispensable de se rappeler à son combat.

Le souvenir d'une résistance de haut vol face à l'entre-soi bourgeois pâlot qui, de l'exotisme, n'aime que les safaris, les hôtels de luxe et les SPA ! Et que ce centre d'hébergement est né, perdure et continue d'exister. Hip hip hourra !

© Manuel Panaget.
© Manuel Panaget.
David Ruellan, comédien incarnant divers personnages, dont celui de Michel Pinçon, aussi, parce que, dans la vie, il est un homme engagé et un artiste ancré dans la réalité. Anne Veyry, metteure en scène d'une subtilité et sobriété impeccables, mettant en valeur le combat de mots sur le plateau avec justesse et fantaisie.

Béatrice Vincent, comédienne, qui s'en donne à corps et à cœur, incarnant parfaitement tous les personnages féminins, à commencer par Monique Pinçon-Charlot.

Ce centre d'hébergement se nomme "La promesse de l'aube", c'est bien trouvé, car, grâce à toute la persévérance mise dans ce projet, le pari a été gagné.
◙ Isabelle Lauriou

* Angélique Kidjo.

"Panique dans le seizième !"

© Manuel Panaget.
© Manuel Panaget.
Texte : Michel Pinçon et Monique Pinçon-Charlot.
Mise en scène : Anne Veyry.
Distribution : David Ruellan, Béatrice Vincent.
Par la Compagnie Sémaphore et la Compagnie du Chameau.
Durée : 60 minutes.

Du 10 au 12 octobre 2024.
Du 17 octobre au 23 novembre 2024.
Jeudi, vendredi et samedi à 21 h.
Théâtre Essaïon, Paris 4ᵉ, 01 42 78 46 42.
>> essaion-theatre.com

Isabelle Lauriou
Lundi 21 Octobre 2024

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•Off 2024• "Mon Petit Grand Frère" Récit salvateur d'un enfant traumatisé au bénéfice du devenir apaisé de l'adulte qu'il est devenu

Comment dire l'indicible, comment formuler les vagues souvenirs, les incertaines sensations qui furent captés, partiellement mémorisés à la petite enfance. Accoucher de cette résurgence voilée, diffuse, d'un drame familial ayant eu lieu à l'âge de deux ans est le parcours théâtral, étonnamment réussie, que nous offre Miguel-Ange Sarmiento avec "Mon petit grand frère". Ce qui aurait pu paraître une psychanalyse impudique devient alors une parole salvatrice porteuse d'un écho libératoire pour nos propres histoires douloureuses.

© Ève Pinel.
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Gil Chauveau
14/06/2024
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© Betül Balkan.
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On retrouve dans cet album une réelle intensité pour chaque interprétation, une profondeur dans la tessiture, dans les tonalités exprimées dont on sent qu'elles puisent tant dans l'âme créatrice des illustres auteurs que dans les recoins intimes, les chemins de vie personnelle de Marc Casa, pour y mettre, dans une manière discrète et maîtrisée, emplie de sincérité, un peu de sa propre histoire.

"Nous mettons en écho des chansons de Barbara et Brel qui ont abordé les mêmes thèmes mais de manières différentes. L'idée est juste d'utiliser leur matière, leur art, tout en gardant une distance, en s'affranchissant de ce qu'ils sont, de ce qu'ils représentent aujourd'hui dans la culture populaire, dans la culture en général… qui est énorme !"

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© Philippe Hanula.
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Gil Chauveau
26/03/2024