En cette période pour le moins troublée de notre pays qui vacille, il va sans dire que la pièce de Clémence Baron, "Les Enfants du Diable", aura quelques échos bien sonores lors de ce Festival d'Avignon 2024. Le totalitarisme est aux portes de notre pays. Ne le laissons pas entrer, comme il a pu le faire dans l'Histoire européenne pas si lointaine. En Roumanie, par exemple, deux mois après la chute du mur de Berlin, alors que le pays était dirigé par un couple fou et sanguinaire : le couple Elena et Nicolae Ceaușescu, surnommé Dracula, ou encore "le génie des Carpates".
Leur politique communiste nataliste sinistre, contre l'avortement et la contraception, était des plus extrêmes – cinq enfants minimum par foyer sous peine d'amende –, et surtout la création des pouponnières d'enfants dits "oligophrènes" dont les témoignages des ONG soulèvent l'horreur absolue à leur découverte : régime carcéral réservé à des enfants au crâne rasé, enfants abandonnés, parqués comme du bétail humain dans des établissements aux sanitaires inutilisables, baignant dans leurs excréments, attendant la mort, soumis à des hurlements incessants et des violences récurrentes, isolés, hébétés, se balançant d'avant en arrière à longueur de journée…
C'est ce pan de l'Histoire européenne, plutôt méconnu, qui a inspiré la comédienne et metteure en scène Clémence Baron, autrice de "Fallacia", une comédie digne de Feydeau, selon les critiques, et qui retiendra l'attention de la maison d'édition des Cygnes qui la publiera.
Leur politique communiste nataliste sinistre, contre l'avortement et la contraception, était des plus extrêmes – cinq enfants minimum par foyer sous peine d'amende –, et surtout la création des pouponnières d'enfants dits "oligophrènes" dont les témoignages des ONG soulèvent l'horreur absolue à leur découverte : régime carcéral réservé à des enfants au crâne rasé, enfants abandonnés, parqués comme du bétail humain dans des établissements aux sanitaires inutilisables, baignant dans leurs excréments, attendant la mort, soumis à des hurlements incessants et des violences récurrentes, isolés, hébétés, se balançant d'avant en arrière à longueur de journée…
C'est ce pan de l'Histoire européenne, plutôt méconnu, qui a inspiré la comédienne et metteure en scène Clémence Baron, autrice de "Fallacia", une comédie digne de Feydeau, selon les critiques, et qui retiendra l'attention de la maison d'édition des Cygnes qui la publiera.
Avec "Les Enfants du Diable", on est bien loin de la comédie et le texte de Clémence Baron, d'une grande justesse, sonne dramatiquement à nos oreilles. "Toute ressemblance avec des faits réels, n'est ni pure ni fortuite coïncidence".
Veronica, jeune femme de trente ans adoptée à ses dix ans à l'étranger, et son frère se retrouvent après de longues années sans s'être vu, tous deux ayant poursuivi leur chemin chacun de leur côté, tant bien que mal. Mais Niki est plein de reproches envers Veronica qu'il accuse de les avoir abandonnés, Mirela et lui. Il apprend des nouvelles à son sujet qui l'excèdent. À peine commence-t-on à en comprendre les raisons que Veronica réapparaît, rouvrant les blessures encore douloureuses. Pourtant, Mirela les réunira, à la fois présente et absente, car elle vient juste de décéder… Un nouveau drame pour la fratrie.
D'ordinaire, nous sommes toujours un peu sur nos gardes dès lors que des images d'archives ou autres vidéos s'insèrent dès le départ dans un spectacle, car, à nos yeux, le pouvoir intrinsèque de l'acte théâtral, simple et pur, doit se suffire à lui-même !
Dans "Les Enfants du Diable", le spectacle s'ouvre en effet par une vidéo d'enfants qui fixent la caméra, regards hallucinés qui nous bouleversent d'emblée. Rien d'ostentatoire, ici, par contre. Juste l'évidence d'un apport nécessaire à la construction dramaturgique de la pièce. Le rôle du Théâtre n'est-il pas aussi de nous informer au-delà de l'émotion ?
C'est un remarquable hommage que Clémence Baron rend dans cette pièce à ces orphelins Roumains et le binôme des comédiens (avec Antoine Cafaro) fonctionne parfaitement. Celle-ci est habitée par le personnage et apprendre que Mirela est sa sœur autiste explique certaines choses. Ce qui n'enlève rien, cela dit, au jeu de la comédienne en soi : une performance juste et sensible. Antoine Cafaro n'est pas en reste. Cofondateur en 2016 de la compagnie "Les Buveurs de thé", il incarne avec brio ce frère en révolte contre sa sœur. Le tout est porté par la mise en scène unique, hyperréaliste et soignée de Patrick Zard, aux allures d'un roman de Zola ou d'un Balzac.
Sur scène, Mirela est présente via un simple fauteuil à bascule sur le dossier duquel est posé un châle coloré, allégorie du trouble physique de ces enfants traumatisés. "Se balancer, c'est rester en mouvement. Rester en mouvement, c'est vivre. Donc, se balancer, c'est vivre. Je veux rester en mouvement. Je veux vivre".
Ne ratez pas "Les Enfants du Diable" en ce nouveau festival Off 2024 qui aura débuté sous de bien sombres auspices et ayons une pensée pour tous ces enfants abandonnés de la Roumanie de Ceausescu.
Le thème de la résilience, les effets réalistes incomparables du jeu des comédiens, le texte taillé au cordeau et une bien jolie mise en scène font de ce spectacle un moment très fort où notre conscience de spectateur est fortement sollicitée.
Le Théâtre, c'est ça aussi !
Veronica, jeune femme de trente ans adoptée à ses dix ans à l'étranger, et son frère se retrouvent après de longues années sans s'être vu, tous deux ayant poursuivi leur chemin chacun de leur côté, tant bien que mal. Mais Niki est plein de reproches envers Veronica qu'il accuse de les avoir abandonnés, Mirela et lui. Il apprend des nouvelles à son sujet qui l'excèdent. À peine commence-t-on à en comprendre les raisons que Veronica réapparaît, rouvrant les blessures encore douloureuses. Pourtant, Mirela les réunira, à la fois présente et absente, car elle vient juste de décéder… Un nouveau drame pour la fratrie.
D'ordinaire, nous sommes toujours un peu sur nos gardes dès lors que des images d'archives ou autres vidéos s'insèrent dès le départ dans un spectacle, car, à nos yeux, le pouvoir intrinsèque de l'acte théâtral, simple et pur, doit se suffire à lui-même !
Dans "Les Enfants du Diable", le spectacle s'ouvre en effet par une vidéo d'enfants qui fixent la caméra, regards hallucinés qui nous bouleversent d'emblée. Rien d'ostentatoire, ici, par contre. Juste l'évidence d'un apport nécessaire à la construction dramaturgique de la pièce. Le rôle du Théâtre n'est-il pas aussi de nous informer au-delà de l'émotion ?
C'est un remarquable hommage que Clémence Baron rend dans cette pièce à ces orphelins Roumains et le binôme des comédiens (avec Antoine Cafaro) fonctionne parfaitement. Celle-ci est habitée par le personnage et apprendre que Mirela est sa sœur autiste explique certaines choses. Ce qui n'enlève rien, cela dit, au jeu de la comédienne en soi : une performance juste et sensible. Antoine Cafaro n'est pas en reste. Cofondateur en 2016 de la compagnie "Les Buveurs de thé", il incarne avec brio ce frère en révolte contre sa sœur. Le tout est porté par la mise en scène unique, hyperréaliste et soignée de Patrick Zard, aux allures d'un roman de Zola ou d'un Balzac.
Sur scène, Mirela est présente via un simple fauteuil à bascule sur le dossier duquel est posé un châle coloré, allégorie du trouble physique de ces enfants traumatisés. "Se balancer, c'est rester en mouvement. Rester en mouvement, c'est vivre. Donc, se balancer, c'est vivre. Je veux rester en mouvement. Je veux vivre".
Ne ratez pas "Les Enfants du Diable" en ce nouveau festival Off 2024 qui aura débuté sous de bien sombres auspices et ayons une pensée pour tous ces enfants abandonnés de la Roumanie de Ceausescu.
Le thème de la résilience, les effets réalistes incomparables du jeu des comédiens, le texte taillé au cordeau et une bien jolie mise en scène font de ce spectacle un moment très fort où notre conscience de spectateur est fortement sollicitée.
Le Théâtre, c'est ça aussi !
"Les Enfants du Diable"
Comédie dramatique.
Texte : Clémence Baron.
Mise en scène : Patrick Zard.
Assistante à la mise en scène : Marie Nardon.
Avec : Clémence Baron et Antoine Cafaro.
Durée : 1 h 15.
Compagnie de la Baronnerie.
•Avignon Off 2024•
Du 3 au 21 juillet 2024.
Tous les jours à 11 h 30. Relâche le lundi.
Théâtre de l'Oriflamme, 3-5, rue du portail Matheron, Avignon.
Réservations : 04 88 61 17 75.
>> loriflamme-avignon.fr
Texte : Clémence Baron.
Mise en scène : Patrick Zard.
Assistante à la mise en scène : Marie Nardon.
Avec : Clémence Baron et Antoine Cafaro.
Durée : 1 h 15.
Compagnie de la Baronnerie.
•Avignon Off 2024•
Du 3 au 21 juillet 2024.
Tous les jours à 11 h 30. Relâche le lundi.
Théâtre de l'Oriflamme, 3-5, rue du portail Matheron, Avignon.
Réservations : 04 88 61 17 75.
>> loriflamme-avignon.fr