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Avignon 2024

•Off 2024• "La Danse du Poisson" Un seul en scène sensible révèlant un jeu épuré mais largement émouvant

François, la trentaine, célibataire sans enfant, est un employé de banque à la vie bien rangée et routinière. Un jour, il s'inquiète au sujet de son voisin de palier, Arno, un individu qu'il juge étrange, et dont les volets sont fermés depuis au moins deux mois. Il apprend par sa mère que ce dernier est hospitalisé.



© Fanny Masson.
© Fanny Masson.
Pour lui rendre service, François accepte d'arroser les plantes de l'appartement d'Arno, de relever le courrier et va régulièrement tenir compagnie à cet homme qui s'avère totalement aphasique, peut-être dans le coma… François prend goût aux visites qu'il rend à Arno et, rapidement, naît entre eux une forme d'intimité.

C'est une voix off qui interpelle le public dès l'ouverture du spectacle. Celle du comédien ? Du metteur en scène ? Fiction du propos ? Réalité ? Peu importe après tout ! Laissons-nous porter par la suite, quand bien même cette intention en coulisses peut surprendre ou dérouter…

"J'ai fait ce pari fou de rejouer "La Danse du Poisson". Ce texte, je l'ai écrit il y a trente ans. C'est ma première écriture, même si je me suis fait aider par une amie, Véronique Joessel, qui a été mon autorisante et qui a peaufiné mon improvisation. Certains d'entre vous ont peut-être déjà vu mon spectacle à Bruxelles ou à Paris, ou à Limoges, ou encore à Genève. À la veille de mes soixante ans, je me suis replongé dans cette écriture. Je n'ai rien changé du texte. Alors, un peu d'imagination. Ce soir, nous avons tous et toutes trente ans de moins (…). Je dédie ce spectacle à Renaud et à tous les autres".

Cette annonce-préambule, à bien y regarder, revêtira toute sa consistance au fil du spectacle, quelque chose de tout personnel et d'universel conjugué.

Puis le spectacle débute véritablement et le spectateur découvre un décor épuré avec, au centre du plateau, un simple banc de bois sur lequel est posé un oreiller. Dès son entrée, le comédien va s'adresser à ce banc, dont on imagine bien qu'il s'agit du lit d'hôpital de ce fameux Arno. Une bulle de "présence absence" qui en dit long sur le propos autobiographique de l'écriture, pour peu que l'on ait pu en avoir connaissance au préalable.

Puis les scènes s'enchaînent qui convoquent rapidement une allure douce amère à l'ensemble de la représentation et, surtout, au jeu tout en finesse de Christophe Guichet.

© Fanny Masson.
© Fanny Masson.
"Toi, tu es toujours dans le même sens", dit à un moment le comédien, laissant entendre, avec une grande sensibilité toute nuancée, qu'en ce qui le concerne, ce n'est pas le cas. À compter de ce moment-là semble s'installer une ambiance à la fois lourde et pesante, non dépourvue d'humour. Mais on "rit jaune". Quelques éclats de rire timides émergent de la salle, comme gênés de se manifester…

Dans cette chambre 211 où Arno repose, chaque spectateur et spectatrice peut se projeter, car qui n'a pas connu au moins une fois l'univers de l'hôpital pour y être allé rendre visite à un proche ? Dans cette chambre 211, c'est la solitude du comédien qui envahit le plateau, sensiblement, comme la nôtre d'ailleurs lors de ces visites dont on se passerait bien… Il essaiera d'y pallier, pourtant, par le biais d'un flot de paroles proche d'une logorrhée incontrôlable, presque psychotique.

À bien y regarder, "La Danse du Poisson" est un spectacle qui fait honneur au verbe et à la parole, aux mots et aux dires qui, parfois, sont juste là pour combler un vide existentiel, la gêne ou encore l'impuissance face à "la" maladie.

Mais de quelle maladie Arno est-il atteint ? Dans ce spectacle autobiographique, il en est une en particulier, mais il pourrait s'agir d'une autre. "La" maladie qui détruit tout sur son chemin, brise les amours, l'amitié, chamboule, voire déconstruit l'être que nous sommes avant de l'avoir regardé droit dans les yeux. Celle qu'on ne veut ou ne peut pas affronter bien souvent, mais qui est pourtant bien au centre du monde de l'humain…

© Fanny Masson.
© Fanny Masson.
Le jeu de Christophe Guichet, au risque de se répéter, est d'une finesse absolue, tout en abordant pourtant plusieurs thèmes qui auraient pu le fragiliser tant ils sont nombreux : l'impact du métier sur nos vies personnelles, les collègues, amis et amies, qui ne le sont pas toujours, des amis, le chômage, la bureaucratie déconcertante, la lâcheté pour tenter de se sauver, le quotidien qui plombe les rêves, sans oublier l'homosexualité abordée ici de façon détournée, mais finement scénographiée, non sans un trait d'humour subtil.

Fuir ou rester ? Regarder la vérité en face ou partir aux Canaries ? Toutes ces questions qui placent une forme de désespérance humaine au cœur du spectacle. L'écriture de Christophe Guichet, via son interprétation, s'approche par moments d'un hyperréalisme à la Edgar Hooper, sans le caddie ni les bigoudis néanmoins. Entre autres.

"La Danse du Poisson" est un bien joli spectacle qui résonnera longtemps en vous. "J'imagine des poissons qui chantent sur l'herbe. Il y a un carrosse et les poissons s'en vont à Saint-Pétersbourg".

Inutile d'aller à Saint-Pétersbourg pour suivre ce carrosse, d'autant qu'en ce moment, cela risque d'être compromis ! Mais rendez-vous simplement au Théâtre de l'Oriflamme, à Avignon, ouvrez le portail de la rue et celui de la chambre 211 et vous y découvrirez, pendant une heure, un seul en scène émouvant, d'une grande poésie malgré le propos plutôt sombre, mais tellement réaliste à plusieurs niveaux.

"La Danse du Poisson"

Spectacle pour un homme seul. En dix visites.
Texte : Christophe Guichet et Véronique Le Mauff.
Mise en scène : Christophe Guichet.
Avec : Christophe Guichet.
Regard extérieur : Claire Cafaro.
Scénographie et costumes : Christophe Guichet
Lumières : Sara Cornu.
Musique : Tom Lemann.
Création du costume du poisson : Joëlle Bondil.
Production Gaby Théâtre (1996) en co-production avec Drôles de Dames.
Durée : 1 heure.

•Avignon Off 2024•
Du 3 au 21 juillet 2024.
Tous les jours à 10 h. Relâche le lundi.
Théâtre L'Oriflamme, 3-5, rue du Portail Matheron, Avignon.
Réservations : 04 88 61 17 75.
>> loriflamme-avignon.fr

Brigitte Corrigou
Jeudi 16 Mai 2024

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Comment dire l'indicible, comment formuler les vagues souvenirs, les incertaines sensations qui furent captés, partiellement mémorisés à la petite enfance. Accoucher de cette résurgence voilée, diffuse, d'un drame familial ayant eu lieu à l'âge de deux ans est le parcours théâtral, étonnamment réussie, que nous offre Miguel-Ange Sarmiento avec "Mon petit grand frère". Ce qui aurait pu paraître une psychanalyse impudique devient alors une parole salvatrice porteuse d'un écho libératoire pour nos propres histoires douloureuses.

© Ève Pinel.
9 mars 1971, un petit bonhomme, dans les premiers pas de sa vie, goûte aux derniers instants du ravissement juvénile de voir sa maman souriante, heureuse. Mais, dans peu de temps, la fenêtre du bonheur va se refermer. Le drame n'est pas loin et le bonheur fait ses valises. À ce moment-là, personne ne le sait encore, mais les affres du destin se sont mis en marche, et plus rien ne sera comme avant.

En préambule du malheur à venir, le texte, traversant en permanence le pont entre narration réaliste et phrasé poétique, nous conduit à la découverte du quotidien plein de joie et de tendresse du pitchoun qu'est Miguel-Ange. Jeux d'enfants faits de marelle, de dinette, de billes, et de couchers sur la musique de Nounours et de "bonne nuit les petits". L'enfant est affectueux. "Je suis un garçon raisonnable. Je fais attention à ma maman. Je suis un bon garçon." Le bonheur est simple, mais joyeux et empli de tendresse.

Puis, entre dans la narration la disparition du grand frère de trois ans son aîné. La mort n'ayant, on le sait, aucune morale et aucun scrupule à commettre ses actes, antinaturelles lorsqu'il s'agit d'ôter la vie à un bambin. L'accident est acté et deux gamins dans le bassin sont décédés, ceux-ci n'ayant pu être ramenés à la vie. Là, se révèle l'avant et l'après. Le bonheur s'est enfui et rien ne sera plus comme avant.

Gil Chauveau
14/06/2024
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© Betül Balkan.
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On retrouve dans cet album une réelle intensité pour chaque interprétation, une profondeur dans la tessiture, dans les tonalités exprimées dont on sent qu'elles puisent tant dans l'âme créatrice des illustres auteurs que dans les recoins intimes, les chemins de vie personnelle de Marc Casa, pour y mettre, dans une manière discrète et maîtrisée, emplie de sincérité, un peu de sa propre histoire.

"Nous mettons en écho des chansons de Barbara et Brel qui ont abordé les mêmes thèmes mais de manières différentes. L'idée est juste d'utiliser leur matière, leur art, tout en gardant une distance, en s'affranchissant de ce qu'ils sont, de ce qu'ils représentent aujourd'hui dans la culture populaire, dans la culture en général… qui est énorme !"

Gil Chauveau
19/06/2024
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© Philippe Hanula.
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Gil Chauveau
26/03/2024