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Avignon 2024

•Off 2024• "Comment te dire ?" Un moment de théâtre introspectif bouleversant… Dire pour ne pas sombrer !

Guillaume rêve de jouer le rôle de Cyrano… mais son père ne voit pas les choses de la même façon. C'est un père exigeant qui considère que les performances scolaires sont une priorité ! De plus, la première histoire d'amour de Guillaume le fait énormément souffrir. Pour se faire entendre, il écrit, devient Rimbaud et essaie se donner un sens à tout ce qui lui arrive : ses luttes, ses joies, ses peines, l'accomplissement de ses rêves…



© Cassiopée Simon-Hubert.
© Cassiopée Simon-Hubert.
Son désir de vivre lui fera rencontrer des gens hors norme, et il nous entraîne dans un combat contre les influences familiales, sociétales, pour préserver sa sensibilité, son honnêteté, sa sincérité et sa foi en l'amour.

Dans la célèbre pièce d'Edmond Rostand, "Cyrano de Bergerac", le personnage éponyme est quelqu'un qui ne ment pas. Il ne se laisse pas faire par les autres. Sa sincérité et sa transparence sont toutes à son honneur d'homme éperdument amoureux chez qui l'intériorité est plus importante que la transparence. C'est probablement la raison pour laquelle il nous émeut tant et qu'il fait de lui un personnage de fiction attachant, qu'on aime, tout simplement.

Les choses de l'acte théâtral sont parfois ainsi faites et curieuses, à bien y regarder, parce que le personnage de Guillaume dans "Comment te dire" a de nombreux points communs avec son inspirateur. Lui aussi nous émeut dans cette interprétation mêlant réalité et fiction dramaturgique.

"Cette histoire est entièrement vraie parce que je l'ai imaginé d'un bout à l'autre", a dit Boris Vian. Frontières subtiles que cet acte créatif mêlant invention et parts de vérité… Peu importe, après tout. C'est le résultat qui compte et "l'important, c'est de participer" à cet acte créatif, pour le plus grand bonheur du public…

© Cassiopée Simon-Hubert.
© Cassiopée Simon-Hubert.
À douze ans, Guillaume assiste à une représentation de la célèbre pièce avec pour rôle titre, Jean Marais. "La magie du Théâtre m'a conquis à jamais". C'est une révélation pour lui, mais un père castrateur, peu ouvert aux choses artistiques, le brigue dans ses désirs de planches et d'apprentissage théâtral.

Qu'à cela ne tienne… Le théâtre est une révolution qui tourne et galope. Un monde à part que Guillaume sait désormais ancré en lui à tout jamais, avec son désir de toujours vaincre, comme en amour d'ailleurs. Mais là non plus, les choses ne sont guère simples…

À quinze ans, il tombe amoureux pour la première fois. C'est un échec cinglant. Dès lors, il se concentre sur la littérature, la poésie, dévorera les surréalistes, et ne jure que par le fait de devenir comédien.

La pièce de Gérald Hubert est une immersion dans la conscience d'un homme qui a toujours cru en lui, pour lequel "avoir conscience de ce que l'on vit peut transformer les choses de la vie, nous amener vers la Paix en nous, et éveiller aussi le besoin de partage". Il s'agit là d'un moment de spectacle très émouvant dont on perçoit le besoin vital et organique intrinsèque, tant dans la construction que dans le jeu.

Gérald Hubert, Sabine Lenoël, en alternance avec Dominique Vannod, interprètent avec élégance différents personnages durant cette heure et demie de représentation où l'émotion est bien présente.

© Christophe Lutz.
© Christophe Lutz.
À nos yeux, peut-être trop par moments. La frontière entre la dimension autobiographique, encore une fois, et l'acte créatif n'est pas toujours facile à franchir. Loin de là. Donner une part de liberté au miroir pour que le Théâtre l'emporte dans sa seule force est généralement souhaitable à cette enseigne.

L'écriture de cette pièce semble avoir été impérieuse, de toute évidence. Elle a dû mûrir longuement, faisant ressurgir du passé des événements enfouis qui ne demandaient qu'à éclore. Comment doser la charge émotionnelle pour en faire un "acte public" universel destiné à toutes et à tous, finalement, et qui aura d'évidents échos chez celles et ceux qui y assistent ? Il n'est pas certain que quelqu'un ou quelqu'une détienne la réponse… Pas même un Pierre Notte, un Tiago Rodrigues ou un Michalik, probablement !

Cela dit, la sincérité du jeu de Gérald Hubert est palpable tout au long de ce spectacle et, au risque de nous répéter, extrêmement sincère… Il paraît comme resté fidèlement semblable à celui qu'on imagine qu'il a pu être à 12 ans ou à 15, quand il a découvert Jean Marais ou qu'il est tombé amoureux : candide, estomaqué, emporté comme dans un tourbillon, et faisant la roue à la fin de la représentation pour se sauver de la réalité du père, de la société ou des diktats en tout genre. La roue, il l'a fait sur le plateau aux côtés des deux comédiennes en alternance et, il nous émeut infiniment.

Dominique Vannod, sur scène le jour où nous avons vu le spectacle, interprète sans excès et avec élégance ses différents rôles. Le duo fonctionne bien au sein d'un décor sobre et épuré où un simple bureau en bois rappelle que l'écriture est essentielle. "Dire" pour ne pas sombrer ! Comment vous dire que " Comment te dire" reste un moment de théâtre introspectif bouleversant, qui constituera à n'en point douter un bien joli moment dans ce Festival d'Avignon 2024 tourmenté et contrarié.

Puisse Gérald Hubert ne pas vociférer à la lecture de cet article contre les méandres critiques et journalistiques, contrairement à une certaine Angélica Liddell au Palais des Papes ! La sensibilité de l'homme, au-delà simplement de celle de l'artiste, laisse à présager qu'il ne le fera pas, à coup sûr !
◙ Brigitte Corrigou

"Comment te dire ?"

Texte et mise en scène : Gérald Hubert.
Avec : Gérald Hubert, Sabine Lenoël ou Dominique Vannod.
Lumières : Sofresh.
Par la Compagnie Théâtre Fuchsia.
À partir de 16 ans.
Durée : 1 h 10.

•Avignon Off 2024•
Du 3 au 21 juillet 2024.
Tous les jours à 15 h. Relâche le mardi.
Théâtre du Centre, 13, rue Louis Pasteur, Avignon.
Réservations : 06 58 64 33 88.
>> theatreducentre-avignon.com

Brigitte Corrigou
Mercredi 10 Juillet 2024

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•Off 2024• "Mon Petit Grand Frère" Récit salvateur d'un enfant traumatisé au bénéfice du devenir apaisé de l'adulte qu'il est devenu

Comment dire l'indicible, comment formuler les vagues souvenirs, les incertaines sensations qui furent captés, partiellement mémorisés à la petite enfance. Accoucher de cette résurgence voilée, diffuse, d'un drame familial ayant eu lieu à l'âge de deux ans est le parcours théâtral, étonnamment réussie, que nous offre Miguel-Ange Sarmiento avec "Mon petit grand frère". Ce qui aurait pu paraître une psychanalyse impudique devient alors une parole salvatrice porteuse d'un écho libératoire pour nos propres histoires douloureuses.

© Ève Pinel.
9 mars 1971, un petit bonhomme, dans les premiers pas de sa vie, goûte aux derniers instants du ravissement juvénile de voir sa maman souriante, heureuse. Mais, dans peu de temps, la fenêtre du bonheur va se refermer. Le drame n'est pas loin et le bonheur fait ses valises. À ce moment-là, personne ne le sait encore, mais les affres du destin se sont mis en marche, et plus rien ne sera comme avant.

En préambule du malheur à venir, le texte, traversant en permanence le pont entre narration réaliste et phrasé poétique, nous conduit à la découverte du quotidien plein de joie et de tendresse du pitchoun qu'est Miguel-Ange. Jeux d'enfants faits de marelle, de dinette, de billes, et de couchers sur la musique de Nounours et de "bonne nuit les petits". L'enfant est affectueux. "Je suis un garçon raisonnable. Je fais attention à ma maman. Je suis un bon garçon." Le bonheur est simple, mais joyeux et empli de tendresse.

Puis, entre dans la narration la disparition du grand frère de trois ans son aîné. La mort n'ayant, on le sait, aucune morale et aucun scrupule à commettre ses actes, antinaturelles lorsqu'il s'agit d'ôter la vie à un bambin. L'accident est acté et deux gamins dans le bassin sont décédés, ceux-ci n'ayant pu être ramenés à la vie. Là, se révèle l'avant et l'après. Le bonheur s'est enfui et rien ne sera plus comme avant.

Gil Chauveau
14/06/2024
Spectacle à la Une

•Off 2024• Lou Casa "Barbara & Brel" À nouveau un souffle singulier et virtuose passe sur l'œuvre de Barbara et de Brel

Ils sont peu nombreux ceux qui ont une réelle vision d'interprétation d'œuvres d'artistes "monuments" tels Brel, Barbara, Brassens, Piaf et bien d'autres. Lou Casa fait partie de ces rares virtuoses qui arrivent à imprimer leur signature sans effacer le filigrane du monstre sacré interprété. Après une relecture lumineuse en 2016 de quelques chansons de Barbara, voici le profond et solaire "Barbara & Brel".

© Betül Balkan.
Comme dans son précédent opus "À ce jour" (consacré à Barbara), Marc Casa est habité par ses choix, donnant un souffle original et unique à chaque titre choisi. Évitant musicalement l'écueil des orchestrations "datées" en optant systématiquement pour des sonorités contemporaines, chaque chanson est synonyme d'une grande richesse et variété instrumentales. Le timbre de la voix est prenant et fait montre à chaque fois d'une émouvante et artistique sincérité.

On retrouve dans cet album une réelle intensité pour chaque interprétation, une profondeur dans la tessiture, dans les tonalités exprimées dont on sent qu'elles puisent tant dans l'âme créatrice des illustres auteurs que dans les recoins intimes, les chemins de vie personnelle de Marc Casa, pour y mettre, dans une manière discrète et maîtrisée, emplie de sincérité, un peu de sa propre histoire.

"Nous mettons en écho des chansons de Barbara et Brel qui ont abordé les mêmes thèmes mais de manières différentes. L'idée est juste d'utiliser leur matière, leur art, tout en gardant une distance, en s'affranchissant de ce qu'ils sont, de ce qu'ils représentent aujourd'hui dans la culture populaire, dans la culture en général… qui est énorme !"

Gil Chauveau
19/06/2024
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… face aux normalisations sociétales et idéologiques

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© Philippe Hanula.
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Gil Chauveau
26/03/2024