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Festivals

Festival de Caves, inventivité et audace pour des spectacles ô combien singuliers et étonnants

Venue de Besançon, une rumeur court, discrète et persistante, se répandant dans quatre-vingt-douze communes. Le chuchotis est joyeux. Le festival de Caves (né en 2005) connaît sa nouvelle saison avec trente-huit spectacles hors-normes. Il ne faudra pas rater l'occasion.



Damien Houssier, "La Visite" © DR.
Damien Houssier, "La Visite" © DR.
Le répertoire est riche, contemporain. Écrit et joué par des compagnons de route de l'initiateur Guillaume Dujardin, les pièces proposées sont adaptées aux lieux et recèlent toutes leur part d'originalité et de création. En symbiose avec les acteurs principaux que sont les caves elles-mêmes. Dans leur configuration et leur singularité, elles dictent la dramaturgie, la scénographie et le jeu ; et renvoient le spectateur au rôle qui devrait être toujours le sien. Savoir frissonner devant le mystère.

C'est une expérience troublante que de descendre à la cave. La fraicheur, une forme d'obscurité, un cheminement quelquefois difficultueux. Descendre en ces lieux reculés et profonds de la maison où s'exhale l'oubli dans un temps lent et obscur. Dans un monde assourdi d'ombres en refuge. Un tel y accompagne joyeux le vieillissement de son vin, tel autre redécouvre le jouet d'une enfance évanouie, celui-ci découvre l'humeur amère du temps. La cave est un lieu en repos des peurs primitives. Grotte abri ou antre. En puissance de retrouvailles.

Dans cette part d'obscurité de la maison se joue la cinématique des hommes en œuvre depuis toujours, depuis qu'à Lascaux ont été agitées des torches et découvertes les ombres mouvantes et les traces de passages antérieurs.

Pearl Manifold, "Temps universel" © DR.
Pearl Manifold, "Temps universel" © DR.
Pour reprendre les mots de Gaston Bachelard dans "La poétique de l'espace" : "Descendre à la cave, c'est rêver, c'est se perdre dans les lointains couloirs d'une étymologie incertaine, c'est chercher dans les mots des trésors introuvables. Monter et descendre dans les mots même, c'est la vie du poète". Le monde du théâtre.

Et il faut remercier Guillaume Dujardin de rendre sensible dans l'intimité d'un public (par nécessité fortement restreint), ces lieux de Transmutation de la Valeur que sont la cave et la représentation théâtrale.

C'est pourquoi la revue du spectacle aime le Festival de Caves.

Le Programme est joint. Il faut réserver tôt car s'invitant en d'authentiques caves ouvertes exclusivement pour lui, le festival offre un nombre de places restreintes.

Et si par accident un spectateur est empêché, il a la délicatesse de prévenir de son absence.

Festival de Caves

Anaïs Marty, "Toussaint" © DR.
Anaïs Marty, "Toussaint" © DR.
Du 28 avril au 24 juin 2017.
Théâtre souterrain.
38 spectacles, 92 communes.
Réservations
• par téléphone au 03 63 35 71 04,
de 10 h à 19 h tous les jours,
pas de réservation sur la messagerie.
• au bureau du Festival,
ouvert de 10 h à 18 h,
Chapelle du Scènacle,
6 rue de la vieille monnaie, Besançon.
>> festivaldecaves.fr

Jean Grapin
Jeudi 27 Avril 2017

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•Off 2024• "Mon Petit Grand Frère" Récit salvateur d'un enfant traumatisé au bénéfice du devenir apaisé de l'adulte qu'il est devenu

Comment dire l'indicible, comment formuler les vagues souvenirs, les incertaines sensations qui furent captés, partiellement mémorisés à la petite enfance. Accoucher de cette résurgence voilée, diffuse, d'un drame familial ayant eu lieu à l'âge de deux ans est le parcours théâtral, étonnamment réussie, que nous offre Miguel-Ange Sarmiento avec "Mon petit grand frère". Ce qui aurait pu paraître une psychanalyse impudique devient alors une parole salvatrice porteuse d'un écho libératoire pour nos propres histoires douloureuses.

© Ève Pinel.
9 mars 1971, un petit bonhomme, dans les premiers pas de sa vie, goûte aux derniers instants du ravissement juvénile de voir sa maman souriante, heureuse. Mais, dans peu de temps, la fenêtre du bonheur va se refermer. Le drame n'est pas loin et le bonheur fait ses valises. À ce moment-là, personne ne le sait encore, mais les affres du destin se sont mis en marche, et plus rien ne sera comme avant.

En préambule du malheur à venir, le texte, traversant en permanence le pont entre narration réaliste et phrasé poétique, nous conduit à la découverte du quotidien plein de joie et de tendresse du pitchoun qu'est Miguel-Ange. Jeux d'enfants faits de marelle, de dinette, de billes, et de couchers sur la musique de Nounours et de "bonne nuit les petits". L'enfant est affectueux. "Je suis un garçon raisonnable. Je fais attention à ma maman. Je suis un bon garçon." Le bonheur est simple, mais joyeux et empli de tendresse.

Puis, entre dans la narration la disparition du grand frère de trois ans son aîné. La mort n'ayant, on le sait, aucune morale et aucun scrupule à commettre ses actes, antinaturelles lorsqu'il s'agit d'ôter la vie à un bambin. L'accident est acté et deux gamins dans le bassin sont décédés, ceux-ci n'ayant pu être ramenés à la vie. Là, se révèle l'avant et l'après. Le bonheur s'est enfui et rien ne sera plus comme avant.

Gil Chauveau
14/06/2024
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•Off 2024• Lou Casa "Barbara & Brel" À nouveau un souffle singulier et virtuose passe sur l'œuvre de Barbara et de Brel

Ils sont peu nombreux ceux qui ont une réelle vision d'interprétation d'œuvres d'artistes "monuments" tels Brel, Barbara, Brassens, Piaf et bien d'autres. Lou Casa fait partie de ces rares virtuoses qui arrivent à imprimer leur signature sans effacer le filigrane du monstre sacré interprété. Après une relecture lumineuse en 2016 de quelques chansons de Barbara, voici le profond et solaire "Barbara & Brel".

© Betül Balkan.
Comme dans son précédent opus "À ce jour" (consacré à Barbara), Marc Casa est habité par ses choix, donnant un souffle original et unique à chaque titre choisi. Évitant musicalement l'écueil des orchestrations "datées" en optant systématiquement pour des sonorités contemporaines, chaque chanson est synonyme d'une grande richesse et variété instrumentales. Le timbre de la voix est prenant et fait montre à chaque fois d'une émouvante et artistique sincérité.

On retrouve dans cet album une réelle intensité pour chaque interprétation, une profondeur dans la tessiture, dans les tonalités exprimées dont on sent qu'elles puisent tant dans l'âme créatrice des illustres auteurs que dans les recoins intimes, les chemins de vie personnelle de Marc Casa, pour y mettre, dans une manière discrète et maîtrisée, emplie de sincérité, un peu de sa propre histoire.

"Nous mettons en écho des chansons de Barbara et Brel qui ont abordé les mêmes thèmes mais de manières différentes. L'idée est juste d'utiliser leur matière, leur art, tout en gardant une distance, en s'affranchissant de ce qu'ils sont, de ce qu'ils représentent aujourd'hui dans la culture populaire, dans la culture en général… qui est énorme !"

Gil Chauveau
19/06/2024
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•Off 2024• "Un Chapeau de paille d'Italie" Une version singulière et explosive interrogeant nos libertés individuelles…

… face aux normalisations sociétales et idéologiques

Si l'art de générer des productions enthousiastes et inventives est incontestablement dans l'ADN de la compagnie L'Éternel Été, l'engagement citoyen fait aussi partie de la démarche créative de ses membres. La présente proposition ne déroge pas à la règle. Ainsi, Emmanuel Besnault et Benoît Gruel nous offrent une version décoiffante, vive, presque juvénile, mais diablement ancrée dans les problématiques actuelles, du "Chapeau de paille d'Italie"… pièce d'Eugène Labiche, véritable référence du vaudeville.

© Philippe Hanula.
L'argument, simple, n'en reste pas moins source de quiproquos, de riantes ficelles propres à la comédie et d'une bonne dose de situations grotesques, burlesques, voire absurdes. À l'aube d'un mariage des plus prometteurs avec la très florale Hélène – née sans doute dans les roses… ornant les pépinières parentales –, le fringant Fadinard se lance dans une quête effrénée pour récupérer un chapeau de paille d'Italie… Pour remplacer celui croqué – en guise de petit-déj ! – par un membre de la gent équestre, moteur exclusif de son hippomobile, ci-devant fiacre. À noter que le chapeau alimentaire appartenait à une belle – porteuse d'une alliance – en rendez-vous coupable avec un soldat, sans doute Apollon à ses heures perdues.

N'ayant pas vocation à pérenniser toute forme d'adaptation académique, nos deux metteurs en scène vont imaginer que cette histoire absurde est un songe, le songe d'une nuit… niché au creux du voyage ensommeillé de l'aimable Fadinard. Accrochez-vous à votre oreiller ! La pièce la plus célèbre de Labiche se transforme en une nouvelle comédie explosive, électro-onirique ! Comme un rêve habité de nounours dans un sommeil moelleux peuplé d'êtres extravagants en doudounes orange.

Gil Chauveau
26/03/2024