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Cirque & Rue

Cirque et arts culinaires... Quand les saltimbanques québécois passent à table

Ça fleure bon les recettes de grand-mère, les odeurs des plats du dimanche, des gâteaux gourmands et les saveurs douces des tisanes des veillées d'hiver. Souvenirs d'enfances, astuces culinaires transmises en forme d'héritage universel, savoir-faire sans frontières… Mais, attention ! Ce n'est pas "top chef" mais du cirque, unique, élaboré entre petites histoires et secrets de cuisine partagés et numéros virtuoses exécutés dans une impertinente gaîté... Un spectacle créatif, odorant et festif signé les 7 doigts de la main.



© Alexandre Galliez.
© Alexandre Galliez.
Se réunir, toutes cultures confondues, autour de la cuisine, se nourrir des confessions de chacun, réminiscences de ces moments passés autour de la table, symbolique millénaire inscrite à travers le monde... Retrouver la sensation des mains qui pétrissent, le fumet d'un plat cuisant au four, le goût des légumes et des fruits frais... Toucher, odorat, goût, trois sens associés à ceux de l'écoute et de la vue pour un spectacle complet où se tissent des chorégraphies inventives et où s'exécutent des numéros qui, s'ils gagnent en élégance, ne perdent rien de leurs performances et de leurs technicités.

"Cuisine et dépendances", créé il y a quatre ans, est une recette peu commune dont les ingrédients sont le cirque, la danse, le théâtre, la musique rock et, bien sûr, la cuisine. Construit à partir d’éléments personnels de la vie des artistes, de moments forts de leur existence - où ont été extrait des thèmes, des images ou des anecdotes intégrées à chaque numéro -, le spectacle joue l'intime et l'humain, et sort du cadre habituel du plateau pour, dès l'entrée du public, solliciter celui-ci, l'emmenant soit sur scène pour des préparatifs culinaires, soit jouant à des devinettes aux goûts de confiseries acidulés.

© Alexandre Galliez.
© Alexandre Galliez.
Baiser chocolaté pour une fausse déclaration d'amour à une spectatrice, pleine de malice, d'humour presque juvénile ; simulation de rencontres, de prise de connaissance de spectatrices/spectateurs sur scène. Puis, petit à petit, l'artistique prend sa place. Lancement et réception d’œufs, chorégraphie et acrobatie s'unissant tout d'abord en images fugaces construites sur des jetées, saltos, roues, glissades en groupe, suivis, en individuel, de divers jonglages, avec des fouets massues notamment.

Et le fil rouge de cette incroyable histoire de cirque et d'artistes se met en place. Chacun, saltimbanques aux différentes nationalités, dans sa langue ou pas, se confie, fait référence à son enfance en quelques mots. Dans les souvenirs d'enfance, des histoires intimes. Et de chaque confession naît des anecdotes, des images appelant à une expression corporelle.

L'astucieux décor - cuisine, plan de travail et/ou table se glissant (sur roulettes) dans l'immense étagère abracadabrantesque montée en fond de scène - se module, se métamorphose en fonction des besoins culinaires ou acrobatiques, table dressée pour dégustation ou tremplin pour sauts acrobatiques élaborés.

© Alexandre Galliez.
© Alexandre Galliez.
Côté gastronomique, une omelette, des pâtes aux légumes et un pain aux bananes sont au menu. Côté musique, un répertoire extrêmement riche, très rock'n'roll, impulsant un groove démoniaque, entraînant. Côté cirque, un cocktail talentueux de performances à l'insolente virtuosité associant acrobaties, équilibres en groupe, tous parfaitement chorégraphiés, un élégant numéro de tissu aérien empli de délicatesse et de poésie, suivi de celui endiablé de diabolo, un, deux puis trois… époustouflant !

Au final, jaillit un bouquet d'équilibres, de portées/jetées et de mouvements sur un magnifique "boléro" de Ravel chanté. Très dense, rythmé à la perfection, aux enchaînements sans temps morts, inventifs, légers et aériens. Il est temps de passer à table et se rouler dans la farine, dans des effets "feux d'artifice" de celle-ci jetée en l'air.

C'est gourmand, éminemment joyeux et espiègle, énergique et délicieux, empli de goûts de friandises enfantines, avec le pep pétillant des bonbons acidulés de nos âges tendres, avec ce petit brin de nostalgie d'où émane les odeurs appétissantes des gâteaux de mamie.
On ressort plein d'étoiles dans les yeux, le sourire accroché aux oreilles et les éclats de rires enfilés comme autant de perles autour du cœur. Une soirée dopée à l'élixir de jouvence qui se clôt sur des mets et quelques verres partagés.

"Cuisine et confessions"

© Alexandre Galliez.
© Alexandre Galliez.
Les 7 doigts de la main - Collectif de création.
Création et mise en scène : Shana Carroll et Sébastien Soldevila.
Assistance à la mise en scène : Mathias Plaul.
Avec : Mishannock Ferrero (jeux icariens, porteur ; main à main, porteur ; banquine, porteur), Anna Kichtchenko (tissu aérien ; contorsion ; jeux icarien, voltigeuse ; accordéon), Pablo Pramparo (jeux icariens, porteur ; jonglerie ; banquine, porteur ; accro-dance ; guitare), Soen Geirnaert (main à main, voltigeuse ; jeux icariens, voltigeuse ; banquine, voltigeuse), Nella Niva (acrobatie au sol), Terrance Robinson (anneaux chinois, mât chinois), Enmeng Song (diabolo, anneaux chinois, jeux icariens).

Direction musicale : Sébastien Soldevila.
Sonorisation : Colin Gagné.
Éclairages : Éric Champoux.
Scénographie : Ana Cappelluto.
Accessoires : Cloé Alain-Gendreau.
Costumes : Anne-Séguin Poirier.
Design d’appareils acrobatiques : Yannick Labonté.
Conception acrobatique : Jérôme LeBaut.

© Alexandre Galliez.
© Alexandre Galliez.
Coaching acrobatique : Francisco Cruz.
Assistante scénographe : Clara Maria Gonzalez.
Conseils-cuisine : Mat & Alex Winnicki - Satay Brothers.
Direction de production : Alice Renucci et Luc Paradis.
Musiques originales : Nans Bortuzzo, Colin Gagné, Raphaël Cruz.

Du 19 septembre 2018 au 12 janvier 2019.
Du mercredi au samedi à 21 h, matinée supplémentaire le samedi à 16 h 30.
Bobino, Paris 14e, 01 43 27 24 24.
>> bobino.fr

Gil Chauveau
Lundi 29 Octobre 2018

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•Off 2024• "Mon Petit Grand Frère" Récit salvateur d'un enfant traumatisé au bénéfice du devenir apaisé de l'adulte qu'il est devenu

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© Ève Pinel.
9 mars 1971, un petit bonhomme, dans les premiers pas de sa vie, goûte aux derniers instants du ravissement juvénile de voir sa maman souriante, heureuse. Mais, dans peu de temps, la fenêtre du bonheur va se refermer. Le drame n'est pas loin et le bonheur fait ses valises. À ce moment-là, personne ne le sait encore, mais les affres du destin se sont mis en marche, et plus rien ne sera comme avant.

En préambule du malheur à venir, le texte, traversant en permanence le pont entre narration réaliste et phrasé poétique, nous conduit à la découverte du quotidien plein de joie et de tendresse du pitchoun qu'est Miguel-Ange. Jeux d'enfants faits de marelle, de dinette, de billes, et de couchers sur la musique de Nounours et de "bonne nuit les petits". L'enfant est affectueux. "Je suis un garçon raisonnable. Je fais attention à ma maman. Je suis un bon garçon." Le bonheur est simple, mais joyeux et empli de tendresse.

Puis, entre dans la narration la disparition du grand frère de trois ans son aîné. La mort n'ayant, on le sait, aucune morale et aucun scrupule à commettre ses actes, antinaturelles lorsqu'il s'agit d'ôter la vie à un bambin. L'accident est acté et deux gamins dans le bassin sont décédés, ceux-ci n'ayant pu être ramenés à la vie. Là, se révèle l'avant et l'après. Le bonheur s'est enfui et rien ne sera plus comme avant.

Gil Chauveau
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Ils sont peu nombreux ceux qui ont une réelle vision d'interprétation d'œuvres d'artistes "monuments" tels Brel, Barbara, Brassens, Piaf et bien d'autres. Lou Casa fait partie de ces rares virtuoses qui arrivent à imprimer leur signature sans effacer le filigrane du monstre sacré interprété. Après une relecture lumineuse en 2016 de quelques chansons de Barbara, voici le profond et solaire "Barbara & Brel".

© Betül Balkan.
Comme dans son précédent opus "À ce jour" (consacré à Barbara), Marc Casa est habité par ses choix, donnant un souffle original et unique à chaque titre choisi. Évitant musicalement l'écueil des orchestrations "datées" en optant systématiquement pour des sonorités contemporaines, chaque chanson est synonyme d'une grande richesse et variété instrumentales. Le timbre de la voix est prenant et fait montre à chaque fois d'une émouvante et artistique sincérité.

On retrouve dans cet album une réelle intensité pour chaque interprétation, une profondeur dans la tessiture, dans les tonalités exprimées dont on sent qu'elles puisent tant dans l'âme créatrice des illustres auteurs que dans les recoins intimes, les chemins de vie personnelle de Marc Casa, pour y mettre, dans une manière discrète et maîtrisée, emplie de sincérité, un peu de sa propre histoire.

"Nous mettons en écho des chansons de Barbara et Brel qui ont abordé les mêmes thèmes mais de manières différentes. L'idée est juste d'utiliser leur matière, leur art, tout en gardant une distance, en s'affranchissant de ce qu'ils sont, de ce qu'ils représentent aujourd'hui dans la culture populaire, dans la culture en général… qui est énorme !"

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Si l'art de générer des productions enthousiastes et inventives est incontestablement dans l'ADN de la compagnie L'Éternel Été, l'engagement citoyen fait aussi partie de la démarche créative de ses membres. La présente proposition ne déroge pas à la règle. Ainsi, Emmanuel Besnault et Benoît Gruel nous offrent une version décoiffante, vive, presque juvénile, mais diablement ancrée dans les problématiques actuelles, du "Chapeau de paille d'Italie"… pièce d'Eugène Labiche, véritable référence du vaudeville.

© Philippe Hanula.
L'argument, simple, n'en reste pas moins source de quiproquos, de riantes ficelles propres à la comédie et d'une bonne dose de situations grotesques, burlesques, voire absurdes. À l'aube d'un mariage des plus prometteurs avec la très florale Hélène – née sans doute dans les roses… ornant les pépinières parentales –, le fringant Fadinard se lance dans une quête effrénée pour récupérer un chapeau de paille d'Italie… Pour remplacer celui croqué – en guise de petit-déj ! – par un membre de la gent équestre, moteur exclusif de son hippomobile, ci-devant fiacre. À noter que le chapeau alimentaire appartenait à une belle – porteuse d'une alliance – en rendez-vous coupable avec un soldat, sans doute Apollon à ses heures perdues.

N'ayant pas vocation à pérenniser toute forme d'adaptation académique, nos deux metteurs en scène vont imaginer que cette histoire absurde est un songe, le songe d'une nuit… niché au creux du voyage ensommeillé de l'aimable Fadinard. Accrochez-vous à votre oreiller ! La pièce la plus célèbre de Labiche se transforme en une nouvelle comédie explosive, électro-onirique ! Comme un rêve habité de nounours dans un sommeil moelleux peuplé d'êtres extravagants en doudounes orange.

Gil Chauveau
26/03/2024