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Cirque & Rue

Une danse macabre… Sacre d’une Mort gaie et enjouée

"Calacas", Théâtre équestre Zingaro, Aubervilliers

Par le biais de l’humour, de la danse, du théâtre et de la musique, Bartabas sacre la mort d’heureuse façon, en s’inspirant d’une tradition mexicaine. Zingaro a fait de "Calacas" un lieu où la Mort est enjouée et sœur de la Vie.



© Agathe Poupeney/PhotoScene.fr.
© Agathe Poupeney/PhotoScene.fr.
Depuis 25 ans, Bartabas se place à la croisée de plusieurs disciplines artistiques. Un spectacle de Zingaro, c’est une mosaïque de danse, de théâtre et de musique avec le cheval comme élément moteur. Dans "Calacas", le thème de la mort est traité dans son aspect le plus gaie avec une mort qui drague la vie, qui est joyeuse et taquine, qui s’amuse et fait rire.

Bartabas présente la Mort sous un visage à l’opposé de l’image lugubre de l’Occident. À "Calacas", mourir semble être une autre vie. Mort et Vie sont deux sœurs, l’une aînée de l’autre. Le spectacle est découpé en différentes scènes. Dans chacune de celles-ci, la mort rôde, en costume de squelette, masque au visage, maquillage au corps. Le rire est compagnon de la mort, une mort belle dans ses apparats et ses costumes.

© Agathe Poupeney/PhotoScene.fr.
© Agathe Poupeney/PhotoScene.fr.
Deux musiciens avec tambours et percussions font un numéro musical donnant un rythme soutenu au spectacle. Plus loin, un comédien-squelette danse en faisant quelques pas de moonwalk. Puis, c’est un numéro de cavaliers sautant sur des chevaux et accompagné de chants. Autour de la scène ronde, les chevaux galopent, les chariots se poursuivent, accompagnés parfois de coups de feu tirés par la mort.

Les scènes sont composées de telle sorte que le spectacle est basé sur une suite homogène de moments scéniques, à la fois indépendants les uns des autres mais unis par une même trame. Chaque moment est articulé dans sa propre thématique artistique avec sa propre mise en scène. À tour de rôle, le théâtre fait place à la musique, la musique à la danse, la danse aux chevaux, les chevaux aux cavaliers. Ainsi, le témoin artistique est passé de scène en scène.

Le spectacle est très original dans son approche artistique. C’est beau, bien ficelé et très agréable à l’œil et à l’oreille.

"Calacas"

Conception, scénographie et mise en scène : Bartabas.
Assistante à la mise en scène : Anne Perron.
Cavaliers : Laurence Dirou, Michaël Gilbert, Noureddine Khalid, Mathias Lyon, Gaëlle Pollantru, Etienne Regnier, Alice Seghier, Messaoud Zeggane.
Musiciens : Sébastien Clément et François Marillier, en alternance avec Richard Dubelsky et Théo Mérigeau (percussionnistes), Pepa et Luis Toledo (chinchineros).
Chevaux : Antonete, Arruza, Belmonte, Bombita, Cagancho, Calacas, Chamaco, Chicuelo, Conchita Citron, Dominguin, Edwin, El Cordobes, El Gallo, El Soro, El Viti, Espartaco, Joselito, Lobero, Majestic, Manolete, Manor, Manzanares, Nimeno, Paquiri, Phare ouest, Posada, Tarzan.
Décors et costumes : Laurence Bruley.
Masques : Cécile Kretschmar.
Conseiller musical : Jean Pierre Drouet.
Durée : 1 h 40.

Du 8 novembre au 22 décembre 2013.
Vendredi et samedi à 20 h 30, dimanche à 17 h 30.
Théâtre équestre Zingaro, Aubervilliers (93), 01 48 39 54 14.
>> bartabas.fr

Safidine Alouache
Vendredi 22 Novembre 2013

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© Philippe Hanula.
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Safidin Alouache
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© Christophe Raynaud de Lage.
Votre ticket n'est plus valable. Prenez vos pilules, jouez au Monopoly, au Scrabble, regardez la télé… des jeux de votre âge quoi ! Et surtout, ayez la dignité d'attendre la mort en silence, on ne veut pas entendre vos jérémiades et – encore moins ! – vos chuchotements de plaisir et vos cris d'amour… Mohamed El Khatib, fin observateur des us et coutumes de nos sociétés occidentales, a documenté son projet théâtral par une série d'entretiens pris sur le vif en Ehpad au moment de la Covid, des mouroirs avec eau et électricité à tous les étages. Autour de lui et d'une aide-soignante, artiste professionnelle pétillante de malice, vont exister pleinement huit vieux et vieilles revendiquant avec une belle tranquillité leur droit au sexe et à l'amour (ce sont, aussi, des sentimentaux, pas que des addicts de la baise).

Un fauteuil roulant poussé par un vieux très guilleret fait son entrée… On nous avertit alors qu'en fonction du grand âge des participant(e)s au plateau, et malgré les deux défibrillateurs à disposition, certain(e)s sont susceptibles de mourir sur scène, ce qui – on l'admettra aisément – est un meilleur destin que mourir en Ehpad… Humour noir et vieilles dentelles, le ton est donné. De son fauteuil, la doyenne de la troupe, 91 ans, Belge et ancienne présentatrice du journal TV, va ar-ti-cu-ler son texte, elle qui a renoncé à son abonnement à la Comédie-Française car "ils" ne savent plus scander, un vrai scandale ! Confiant plus sérieusement que, ce qui lui manque aujourd'hui – elle qui a eu la chance d'avoir beaucoup d'hommes –, c'est d'embrasser quelqu'un sur la bouche et de manquer à quelqu'un.

Yves Kafka
30/08/2024