Qu'ils se nomment Alberto Caeiro, Ricardo Reis, Alvaro de Campos ou encore Bernardo Soares, le narrateur du "Livre de l'Intranquillité", ils ont tous à voir avec l'esprit vagabond de Fernando Pessoa qui les a engendrés de toutes pièces, comme des répliques de lui-même se disputant tour à tour l'avant-scène.
Si "je est un autre", le poète peut alors être incarné sans détours par une jeune femme, aussi fantasque que lui apparaît sérieux dans son pardessus austère du Café Brasileira de Lisbonne. D'ailleurs ne prendrait-il pas plaisir à contredire ses avatars, ses expansions de lui-même ? Seul comme pas un, il n'avait eu de cesse de peupler d'amis son espace mental… ou alors est-ce lui qui n'existait pas, eux prenant corps et vie à sa place ? Quoi qu'il en soit, ils sont là bien vivants devant nous et ce sont eux qui vont supplanter son hystéro-mélancolie légendaire pour organiquement donner de la voix.
Si "je est un autre", le poète peut alors être incarné sans détours par une jeune femme, aussi fantasque que lui apparaît sérieux dans son pardessus austère du Café Brasileira de Lisbonne. D'ailleurs ne prendrait-il pas plaisir à contredire ses avatars, ses expansions de lui-même ? Seul comme pas un, il n'avait eu de cesse de peupler d'amis son espace mental… ou alors est-ce lui qui n'existait pas, eux prenant corps et vie à sa place ? Quoi qu'il en soit, ils sont là bien vivants devant nous et ce sont eux qui vont supplanter son hystéro-mélancolie légendaire pour organiquement donner de la voix.
S'appuyant sur des modules mobiles immaculés sur lesquels les figures des rêves de l'homme intranquille vont se détacher, la comédienne joue de son vêtement évolutif pour incarner les différents états du même. Dire d'abord l'extase ressentie un certain jour de mars 1914 où une trentaine de poèmes jaillirent de lui sans qu'il ait le sentiment d'en être l'auteur, comme si un autre lui-même avait parlé à son insu. Cet autre, il le nommera Alberto Caeiro, auquel il inventera une biographie avant qu'il ne meure de tuberculose pulmonaire. La comédienne se mouchant à l'excès ne peut que constater le destin malheureux de cet avatar qui connut pourtant ses heures de célébrité. Ainsi va la vie qu'à la fin on meurt, même dans le monde des avatars.
Retirant sa perruque, l'artiste fait son coming out identitaire en avouant publiquement qu'elle n'est pas Fernando Pessoa comme elle s'était présentée, mais Aurélia, l'actrice ayant usurpé son identité pour s'adresser directement à nous. De toute façon, elle a toute liberté pour créer le spectacle qu'elle veut, lui étant bel et bien mort qui pourrait trouver à redire ? Elle endosse alors son immense pardessus, chausse des lunettes et se coiffe d'un chapeau avant de voguer sur des images mentales, l'amenant très loin d'elle-même. "Je suis les faubourgs d'une ville qui n'existe pas, le personnage d'un roman qui reste à écrire. Je tombe sans fin dans une chute sans direction. Mon âme est un maelström noir".
Devenant le centre de rien avec le rien tout autour, elle s'adresse directement à son géniteur : "Tu m'entends Fernando ? Moi, je te saluerai éternellement. Je sais que tu m'as aimé aussi" ; et prenant par la main son mentor, elle s'adresse à lui pour lui dire qu'elle appartient à son orgie. Revêtue alors d'une combinaison de lumières, elle se lance dans un trip faisant voler en éclats le monde normé. "Je suis celle qui est toi. Je suis un univers vivant pour te saluer Fernando !". Éructant, à quatre pattes, elle se lance dans une diatribe libertaire l'amenant très haut dans les airs, loin de la pesanteur de la cité terrestre.
Traversée par la parole vivante du poète, elle s'écrie, exaltée : "Qu'est-ce que faire des vers sinon confesser que la vie ne suffit pas ? Mais à quoi sert l'art qui n'est pas la vie ? Mourons, n'écrivons rien. Aimons, mais n'écrivons rien". Liberdade, Democracia, écrits en lettres de feu sur une pancarte brandie fièrement, crèvent l'espace de leur liberté affichée alors que tombe des cintres la couronne la/le sacrant roi de ce pays quelconque peuplé de tous ses sujets inventés…
Retirant sa perruque, l'artiste fait son coming out identitaire en avouant publiquement qu'elle n'est pas Fernando Pessoa comme elle s'était présentée, mais Aurélia, l'actrice ayant usurpé son identité pour s'adresser directement à nous. De toute façon, elle a toute liberté pour créer le spectacle qu'elle veut, lui étant bel et bien mort qui pourrait trouver à redire ? Elle endosse alors son immense pardessus, chausse des lunettes et se coiffe d'un chapeau avant de voguer sur des images mentales, l'amenant très loin d'elle-même. "Je suis les faubourgs d'une ville qui n'existe pas, le personnage d'un roman qui reste à écrire. Je tombe sans fin dans une chute sans direction. Mon âme est un maelström noir".
Devenant le centre de rien avec le rien tout autour, elle s'adresse directement à son géniteur : "Tu m'entends Fernando ? Moi, je te saluerai éternellement. Je sais que tu m'as aimé aussi" ; et prenant par la main son mentor, elle s'adresse à lui pour lui dire qu'elle appartient à son orgie. Revêtue alors d'une combinaison de lumières, elle se lance dans un trip faisant voler en éclats le monde normé. "Je suis celle qui est toi. Je suis un univers vivant pour te saluer Fernando !". Éructant, à quatre pattes, elle se lance dans une diatribe libertaire l'amenant très haut dans les airs, loin de la pesanteur de la cité terrestre.
Traversée par la parole vivante du poète, elle s'écrie, exaltée : "Qu'est-ce que faire des vers sinon confesser que la vie ne suffit pas ? Mais à quoi sert l'art qui n'est pas la vie ? Mourons, n'écrivons rien. Aimons, mais n'écrivons rien". Liberdade, Democracia, écrits en lettres de feu sur une pancarte brandie fièrement, crèvent l'espace de leur liberté affichée alors que tombe des cintres la couronne la/le sacrant roi de ce pays quelconque peuplé de tous ses sujets inventés…
"Pessoa", poète énigmatique s'il en est, portait dans son patronyme une inquiétante étrangeté ne finissant pas de nous fasciner. En effet, son nom peut être traduit indifféremment par "personne" ou par "la personne". Lui qui s'inventa pour tenter de survivre plus de soixante-dix hétéronymes, a-t-il été l'homme démultiplié génialement en tous ses avatars ou l'homme sans qualités qui peinait à exister en dehors d'eux ? Ce qui est sûr, c'est que ce soir, sa doublure théâtrale a fait (re)vivre superbement devant nos yeux "assujettis", les fabuleux prolongements de cet être "extra-ordinaire" qu'était - et que continue à être - Fernando Pessoa.
Vu le jeudi 28 juillet au Théâtre 11 – Avignon.
Vu le jeudi 28 juillet au Théâtre 11 – Avignon.
"Et me voici soudain roi d'un pays quelconque"
Textes : Fernando Pessoa.
Conception et montage de textes : Aurélia Arto et Guillaume Clayssen.
Mise en scène : Guillaume Clayssen.
Assistante mise en scène : Claire Marx.
Avec : Aurélia Arto.
Création son : Cédric Colin.
Costumes : Séverine Thiébault.
Scénographie : Delphine Brouard.
Création lumière : Julien Crépin.
Regard chorégraphique : Ingrid Estarque.
Par Production La Compagnie des Attentifs.
À partir de 14 ans.
Durée : 1 h 10.
•Avignon Off 2022•
Du 7 au 29 juillet 2022.
Tous les jours à 20 h 40, relâche le mardi.
Théâtre Le 11, Salle 2, 11, boulevard Raspail, Avignon.
Tél. : 04 84 51 20 10.
>> 11avignon.com
Conception et montage de textes : Aurélia Arto et Guillaume Clayssen.
Mise en scène : Guillaume Clayssen.
Assistante mise en scène : Claire Marx.
Avec : Aurélia Arto.
Création son : Cédric Colin.
Costumes : Séverine Thiébault.
Scénographie : Delphine Brouard.
Création lumière : Julien Crépin.
Regard chorégraphique : Ingrid Estarque.
Par Production La Compagnie des Attentifs.
À partir de 14 ans.
Durée : 1 h 10.
•Avignon Off 2022•
Du 7 au 29 juillet 2022.
Tous les jours à 20 h 40, relâche le mardi.
Théâtre Le 11, Salle 2, 11, boulevard Raspail, Avignon.
Tél. : 04 84 51 20 10.
>> 11avignon.com