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Théâtre

"L'homme qui tua Mouammar Kadhafi" Conférence, interview, témoignage, révélation ou spectacle ? Ou bien tout cela ensemble ?

"L'homme qui tua Mouammar Kadhafi" s'amuse à jouer avec toutes les possibilités données par une scène de théâtre, tous les moyens crédibles. Le plateau ressemble à celui d'un talk-show télévisuel ; un intervenant, Alexis Poulin, journaliste politique de métier dont le visage est connu par sa présence sur les chaînes d'infos dans les si nombreux débats ; et un invité dont nous ne connaîtrons pas le nom. Voilà le dispositif.



© Superamas.
© Superamas.
Cet invité est un ancien espion français de la DGSE en mission en Libye dans la première décennie du XXe siècle. Au début de la représentation, le réel envahit la scène du théâtre avec des arguments chocs, inattaquables, et après une brève introduction du présentateur vedette, voici que commence l'interview du témoin sur les événements qui ont précédé la mort de Kadhafi.

L'histoire prend alors différentes directions : des informations sur le fonctionnement des services secrets français, un rappel des relations entre la présidence de Sarkozy et le régime libyen, les actions en justice encore en cours au sujet de valises d'argent voyageant de Tripoli jusqu'à Paris… Car Kadhafi mort il y dix ans continue d'être au cœur d'affaires gênantes pour la politique française et, en particulier, pour l'ex-président Nicolas Sarkozy. Et puis cette fin qui reste polémique.

Les images ont pourtant fait le tour du monde. Celles d'un dictateur déniché comme un rat dans un tuyau d'évacuation par une foule ivre de vengeance qui le bat à mort. Elles ont été diffusées par tous les médias du monde entier : la vengeance d'un peuple, la justice populaire, pas de procès, mais bon… la justice populaire… Seulement, les images ne montrent pas les deux coups de feu qui ont mis fin à l'existence de Kadhafi. La justice populaire l'a juste battu, battu à mort peut-être, mais pas abattu.

© Superamas.
© Superamas.
Sur scène, l'interview a laissé place à une scénographie plus théâtralisée. Des figurines présentent les protagonistes, les nombreux protagonistes de l'histoire, un comédien interprète certaines de leurs répliques de l'époque. Mais le journaliste et l'ancien espion restent dans leurs rôles, et le débat s'est ouvert sur les questions du public auxquelles celui-ci répond avec beaucoup d'assurance.

Il y a un doute. Il y a un doute sur l'affaire Kadhafi, sa mort, son poids sur l'échiquier des puissances pétrolières, ses mallettes d'argent en direction de la France, de l'Europe. Il y aussi un doute sur la véracité du témoignage de cet ancien espion. Finalement, la représentation colle parfaitement au flou de la réalité qu'elle évoque. Et c'est aussi en cela qu'elle est passionnante. Entre les révélations, les anecdotes, les possibles corruptions encore d'actualité, le spectacle surfe sur l'instructif et s'amuse du crédible. Une manière de faire comme Orson Welles avait fait pour son film "F for Fake" où il se présentait en prestidigitateur pour évoquer les plus grands faussaires de son époque, manier le faux pour trouver le vrai.

À noter que le titre est loin d'être anodin, car l'enquête racontée ici cherche effectivement à savoir qui est celui qui a mis deux balles dans le corps de Kadhafi, mais aussi qui lui en a donné l'ordre. Enquête en cours…

"L'homme qui tua Mouammar Kadhafi"

© Superamas.
© Superamas.
Spectacle documentaire.
Conception, écriture et mise en scène : Superamas*.
Avec : Alexis Poulin et Superamas.
Regard extérieur : Diederik Peeters.
Création décors et son : Superamas.
Création Lumières : Henri-Emmanuel Doublier.
Costumes : Sofie Durnez et Superamas.
Production : Superamas.
À partir de 14 ans.
Durée : 1 h 15.

* SUPERAMAS est un collectif d'artistes fondé en 1999 qui se structure en trois associations distinctes (France, Autriche, Belgique) et s'affirme comme un collectif résolument européen.

A été représenté les 22 et 23 octobre 2021 au Théâtre Studio, Alfortville (94).

Tournée
5 et 6 mai 2022 : Théâtre de la Madeleine, Troyes (10).

Bruno Fougniès
Dimanche 21 Novembre 2021

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© Ève Pinel.
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© Betül Balkan.
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