Après six mois de diète lyrique, c'est un vrai bonheur de retrouver la scène, des chanteurs, un orchestre dans une fosse (celle de l'Auditorium, la plus grande d'Europe, idéale pour respecter la distanciation entre musiciens) et les frissons d'émotion qui traversent une salle quand la soirée est réussie. Outre la situation particulière actuelle, cette "Traviata" à Bordeaux constitue, sans aucun doute, un événement à plus d'un titre. C'est la dernière saison de Paul Daniel à Bordeaux (on le regrette déjà) ; c'est l'un des derniers Alfredo de B. Bernheim (a-t-il fait savoir) et c'est une prise de rôle magistrale pour la soprano américaine Rachel Willis-Sørensen. Une Violetta plus qu'impressionnante en toute honnêteté.
Une bonne "Traviata" est de surcroît réussie si le baryton interprétant le père d'Alfredo, Giorgio Germont, est grand, tant la dramaturgie de l'opéra repose sur ce trio "familial" infernal - où la loi patriarcale (agent du destin) s'oppose au désir et à l'amour. Lionel Lhote est ici un très grand Giorgio Germont, à n'en pas douter. Avec son timbre superbement profond, son phrasé artiste, le chanteur belge parvient à doter son personnage d'une complexité rare. Impossible de le détester tout à fait.
Une bonne "Traviata" est de surcroît réussie si le baryton interprétant le père d'Alfredo, Giorgio Germont, est grand, tant la dramaturgie de l'opéra repose sur ce trio "familial" infernal - où la loi patriarcale (agent du destin) s'oppose au désir et à l'amour. Lionel Lhote est ici un très grand Giorgio Germont, à n'en pas douter. Avec son timbre superbement profond, son phrasé artiste, le chanteur belge parvient à doter son personnage d'une complexité rare. Impossible de le détester tout à fait.
En Violetta, Rachel Willis-Sørensen est magnifique. Elle est non seulement très belle, mais ses moyens vocaux sont tels (dans tous les registres, possédant à l'envi toutes les techniques nécessitées par ce rôle écrasant) qu'ils semblent outrer les dimensions de l'Auditorium - à l'excellente acoustique comme on le sait. Son incarnation, qui s'affinera avec l'expérience, est souvent bouleversante, toujours délectable. Elle est cette "prima donna de première force" que réclamait Verdi.
On a déjà écrit ailleurs tout le bien que l'on pense de Benjamin Bernheim. Son Alfredo à la vocalité sensuelle, comme déjà entendu à Paris en 2019, est non moins magnifique. Mais son personnage se pare ici d'un raffinement rendu sans doute possible par la proximité de la scène et du public. Les deux chanteurs se complètent idéalement. Comme on dit, le courant passe.
Avec un chœur bien préparé par son chef Salvatore Caputo, on apprécie aussi des seconds rôles qui parviennent aisément à s'individualiser - pour retenir notre attention. Citons, entre autres, Julie Pastouraud en Annina et Ambroisine Bré, mutine Flora. De la fosse, l'orchestre est le personnage à part entière que l'on espère. Raffiné dans l'ouverture jusqu'au déchirement, et à l'exception d'une petite harmonie un peu dépassée dans le premier acte, il se révèle tour à tour imposant (arrivée du Père au II), rayonnant dans le troisième acte, et finalement tragique.
On a déjà écrit ailleurs tout le bien que l'on pense de Benjamin Bernheim. Son Alfredo à la vocalité sensuelle, comme déjà entendu à Paris en 2019, est non moins magnifique. Mais son personnage se pare ici d'un raffinement rendu sans doute possible par la proximité de la scène et du public. Les deux chanteurs se complètent idéalement. Comme on dit, le courant passe.
Avec un chœur bien préparé par son chef Salvatore Caputo, on apprécie aussi des seconds rôles qui parviennent aisément à s'individualiser - pour retenir notre attention. Citons, entre autres, Julie Pastouraud en Annina et Ambroisine Bré, mutine Flora. De la fosse, l'orchestre est le personnage à part entière que l'on espère. Raffiné dans l'ouverture jusqu'au déchirement, et à l'exception d'une petite harmonie un peu dépassée dans le premier acte, il se révèle tour à tour imposant (arrivée du Père au II), rayonnant dans le troisième acte, et finalement tragique.
À sa tête, Paul Daniel nous offre une ligne souple, une science des dynamiques, des climats bien contrastés. On l'aura compris, c'est un spectacle à ne pas rater. Une deuxième distribution prometteuse est proposée certains soirs (Elbenita Kajtazi, Kévin Amiel, Anthony Clark).
"La Traviata"
Opéra en 3 actes de Verdi créé à La Fenice de Venise le 6 mars 1853.
Musique de Giuseppe Verdi.
Livret de Francesco Maria Piave d'après La Dame aux Camélias d'Alexandre Dumas fils.
Direction musicale : Paul Daniel.
Mise en scène : Pierre Rambert.
Décors : Antoine Fontaine.
Costumes : Franck Sorbier.
Lumières : Christophe Forey.
Jusqu'au 27 septembre 2020.
Opéra national de Bordeaux-Aquitaine.
Auditorium.
8, Cours Georges Clémenceau, Bordeaux.
Tél. : 05 56 00 85 95.
>> opera-bordeaux.com
Concert enregistré par France Musique pour une diffusion prévue le 3 octobre 2020.
"La Traviata"
Opéra en 3 actes de Verdi créé à La Fenice de Venise le 6 mars 1853.
Musique de Giuseppe Verdi.
Livret de Francesco Maria Piave d'après La Dame aux Camélias d'Alexandre Dumas fils.
Direction musicale : Paul Daniel.
Mise en scène : Pierre Rambert.
Décors : Antoine Fontaine.
Costumes : Franck Sorbier.
Lumières : Christophe Forey.
Jusqu'au 27 septembre 2020.
Opéra national de Bordeaux-Aquitaine.
Auditorium.
8, Cours Georges Clémenceau, Bordeaux.
Tél. : 05 56 00 85 95.
>> opera-bordeaux.com
Concert enregistré par France Musique pour une diffusion prévue le 3 octobre 2020.