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Théâtre

Tambour battant, le Théâtre de Belleville ouvre ses portes

C’est, en contre bas du grouillant carrefour du métro Belleville, un petit immeuble au 16, passage Pivert. Il donne l’image d’un de ces nombreux cabarets qui ont offert aux parisiens du XVIII et XIX siècle un petit vin joyeux défiscalisé… Le passant en s’adossant à la grille du 7 bis (tournant ainsi le dos à un joli immeuble ancien nouvellement restauré) se trouve face à ce qui reste de la cour du commerce et sa célèbre salle de café concert… Il peut discerner en suivant le faitage l’immeuble en équerre, le parquet de bal et imaginer à la place du petit garage la cour arborée. Là où le jeune Maurice Chevalier à ses tout débuts venait soutenir une jeune et jolie artiste.



Gilles Ségal en répétition © DR.
Gilles Ségal en répétition © DR.
C’est à Hong Kong, il y a un peu plus de dix ans, que l'ex-Concert du Commerce (devenu de 1988 à 2011 Le Tambour Royal) va connaitre une pichenette du destin. Lorsque, lors d’un diner, un vieux chinois morphopsychologue déclara à un jeune financier français, Laurent Sroussi (HEC Montpellier) : "Vous, vous êtes comédien". Se déclencha un virage du destin. Comme un coup de tonnerre, de quoi faire réfléchir pour engager, fortune faite, une deuxième vie.

De retour en France, en 2001, le jeune homme fait du théâtre en amateur puis passe une audition et suit les cours de Claude Mathieu. À 38 ans, il est professionnel et fait ses vrais premiers pas avec Fabrice Melquiot. Et sept ans plus tard franchit une étape radicale en rachetant la salle abandonnée d’un quartier à la vitalité étonnante. Le Théâtre de Belleville est devenu une salle de théâtre moderne (jauge 100 places) mais conserve l’esprit des lieux dans son architecture mais aussi, l’espère son propriétaire, dans son aventure humaine.

C’est devant un petit noir au comptoir, alors que le peintre assure ses finitions, que le directeur programmateur et administrateur parle d'un projet qui se présente comme une manière d’être fidèle et de transmettre son expérience.

Celle de son métier de comédien et de manager enfin réunis dans l’expression d’un artisanat de la création et de la diffusion artistique. Le théâtre comme creuset de talents... Idée à creuser qui peut plaire à son vieux maitre de plus de 80 ans.

Pour sa saison inaugurale, la programmation est séduisante. C’est que, dans ce quartier populaire cosmopolite et affairé, le Théâtre de Belleville a une ambition poétique qui entend trouver "la voie de la joie, avoir la force du partage dans la générosité. Une manière de devoir de résistance..."
"Être un lieu ouvert au rire et au regard critique sur le monde… Ancré dans son époque… Prendre des risques pour valoriser les compagnies, leur offrir des facilités de résidence."

Le premier acte a commencé le 15 octobre avec "En ce temps-là, l’amour..." de et avec Gilles Ségal, âgé de 80 ans, qui transmet le flambeau de Jean-Louis Barrault, Marceau, Jean Vilar, avec lesquels il a travaillé.

Cette initiative privée qui espère l’équilibre financier en accompagnement du service public appelle le souvenir de Jacques Copeau, celui du cartel…
À suivre donc…

Théâtre de Belleville

94, rue du Faubourg du Temple, Paris 11e.
Tél. : 01 48 06 72 34.
>> theatredebelleville.com

Du samedi 16 octobre au dimanche 27 novembre.
Du mardi au samedi à 19 h, dimanche à 16 h.
"En ce temps là, l'amour..."
Texte : Gilles Ségal.
Mise en scène : Jean Bellorini (prix SACD révélation théatrale de l'année 2010).
Avec : Gilles Ségal.

Du mardi 25 octobre au samedi 31 décembre.
Du mardi au samedi à 21 h, dimanche à 18 h.
"L'écume des jours"
Texte : Boris Vian.
Adaptation : Judith Davis (lauréate du prix CNT 2008 pour l’adaptation de L’Ecume des Jours).
Mise en scène : Béatrice de La Boulaye.
Avec : Blandine Bury, Hubert Delattre, Cindy Doutres, Romain Vissol, Nicolas Guillot, Marie Hennerez.
Piano & bruitage : Pierre Gascoin.

Jean Grapin
Lundi 17 Octobre 2011

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À Découvrir

"La Chute" Une adaptation réussie portée par un jeu d'une force organique hors du commun

Dans un bar à matelots d'Amsterdam, le Mexico-City, un homme interpelle un autre homme.
Une longue conversation s'initie entre eux. Jean-Baptiste Clamence, le narrateur, exerçant dans ce bar l'intriguant métier de juge-pénitent, fait lui-même les questions et les réponses face à son interlocuteur muet.

© Philippe Hanula.
Il commence alors à lever le voile sur son passé glorieux et sa vie d'avocat parisien. Une vie réussie et brillante, jusqu'au jour où il croise une jeune femme sur le pont Royal à Paris, et qu'elle se jette dans la Seine juste après son passage. Il ne fera rien pour tenter de la sauver. Dès lors, Clamence commence sa "chute" et finit par se remémorer les événements noirs de son passé.

Il en est ainsi à chaque fois que nous prévoyons d'assister à une adaptation d'une œuvre d'Albert Camus : un frémissement d'incertitude et la crainte bien tangible d'être déçue nous titillent systématiquement. Car nous portons l'auteur en question au pinacle, tout comme Jacques Galaud, l'enseignant-initiateur bien inspiré auprès du comédien auquel, il a proposé, un jour, cette adaptation.

Pas de raison particulière pour que, cette fois-ci, il en eût été autrement… D'autant plus qu'à nos yeux, ce roman de Camus recèle en lui bien des considérations qui nous sont propres depuis toujours : le moi, la conscience, le sens de la vie, l'absurdité de cette dernière, la solitude, la culpabilité. Entre autres.

Brigitte Corrigou
09/10/2024
Spectacle à la Une

"Very Math Trip" Comment se réconcilier avec les maths

"Very Math Trip" est un "one-math-show" qui pourra réconcilier les "traumatisés(es)" de cette matière que sont les maths. Mais il faudra vous accrocher, car le cours est assuré par un professeur vraiment pas comme les autres !

© DR.
Ce spectacle, c'est avant tout un livre publié par les Éditions Flammarion en 2019 et qui a reçu en 2021 le 1er prix " La Science se livre". L'auteur en est Manu Houdart, professeur de mathématiques belge et personnage assez emblématique dans son pays. Manu Houdart vulgarise les mathématiques depuis plusieurs années et obtient le prix de " l'Innovation pédagogique" qui lui est décerné par la reine Paola en personne. Il crée aussi la maison des Maths, un lieu dédié à l'apprentissage des maths et du numérique par le jeu.

Chaque chapitre de cet ouvrage se clôt par un "Waooh" enthousiaste. Cet enthousiasme opère aussi chez les spectateurs à l'occasion de cet one-man-show exceptionnel. Un spectacle familial et réjouissant dirigé et mis en scène par Thomas Le Douarec, metteur en scène du célèbre spectacle "Les Hommes viennent de Mars et les femmes de Vénus".

N'est-ce pas un pari fou que de chercher à faire aimer les mathématiques ? Surtout en France, pays où l'inimitié pour cette matière est très notoire chez de nombreux élèves. Il suffit pour s'en faire une idée de consulter les résultats du rapport PISA 2022. Rapport édifiant : notre pays se situe à la dernière position des pays européens et avant-dernière des pays de l'OCDE.
Il faut urgemment reconsidérer les bases, Monsieur le ministre !

Brigitte Corrigou
12/04/2025
Spectacle à la Une

"La vie secrète des vieux" Aimer même trop, même mal… Aimer jusqu'à la déchirure

"Telle est ma quête", ainsi parlait l'Homme de la Mancha de Jacques Brel au Théâtre des Champs-Élysées en 1968… Une quête qu'ont fait leur cette troupe de vieux messieurs et vieilles dames "indignes" (cf. "La vieille dame indigne" de René Allio, 1965, véritable ode à la liberté) avides de vivre "jusqu'au bout" (ouaf… la crudité revendiquée de leur langue émancipée y autorise) ce qui constitue, n'en déplaise aux catholiques conservateurs, le sel de l'existence. Autour de leur metteur en scène, Mohamed El Khatib, ils vont bousculer les règles de la bienséance apprise pour dire sereinement l'amour chevillé au corps des vieux.

© Christophe Raynaud de Lage.
Votre ticket n'est plus valable. Prenez vos pilules, jouez au Monopoly, au Scrabble, regardez la télé… des jeux de votre âge quoi ! Et surtout, ayez la dignité d'attendre la mort en silence, on ne veut pas entendre vos jérémiades et – encore moins ! – vos chuchotements de plaisir et vos cris d'amour… Mohamed El Khatib, fin observateur des us et coutumes de nos sociétés occidentales, a documenté son projet théâtral par une série d'entretiens pris sur le vif en Ehpad au moment de la Covid, des mouroirs avec eau et électricité à tous les étages. Autour de lui et d'une aide-soignante, artiste professionnelle pétillante de malice, vont exister pleinement huit vieux et vieilles revendiquant avec une belle tranquillité leur droit au sexe et à l'amour (ce sont, aussi, des sentimentaux, pas que des addicts de la baise).

Un fauteuil roulant poussé par un vieux très guilleret fait son entrée… On nous avertit alors qu'en fonction du grand âge des participant(e)s au plateau, et malgré les deux défibrillateurs à disposition, certain(e)s sont susceptibles de mourir sur scène, ce qui – on l'admettra aisément – est un meilleur destin que mourir en Ehpad… Humour noir et vieilles dentelles, le ton est donné. De son fauteuil, la doyenne de la troupe, 91 ans, Belge et ancienne présentatrice du journal TV, va ar-ti-cu-ler son texte, elle qui a renoncé à son abonnement à la Comédie-Française car "ils" ne savent plus scander, un vrai scandale ! Confiant plus sérieusement que, ce qui lui manque aujourd'hui – elle qui a eu la chance d'avoir beaucoup d'hommes –, c'est d'embrasser quelqu'un sur la bouche et de manquer à quelqu'un.

Yves Kafka
30/08/2024