Entrée en matière laconique pour une forme qui ne l'est en rien… Les corps s'exposent à nu, au propre comme au figuré, vivent leurs tensions jusqu'à l'extrême sans rien en dissimuler. Les mots fusent comme des flèches atteignant leur cible en plein cœur. Parfois, ils sont énoncés accompagnés d'un sourire tendre et complice, parfois ce sont des mots guerriers, ceux que l'on décoche pour tuer l'adversaire. Si les niveaux de langue varient judicieusement selon les situations, on peut dire que l'importance portée à la langue est constante. Quant à la mise en jeu, inventive, elle est aussi (im)pertinente que le propos qui s'y enchâsse, le tout mâtiné de pincées d'humour rassurant… et dévastateur.
Rendre publics les tourments d'une relation passionnelle, comme dans un jeu de rôles à visée thérapeutique, afin de s'en libérer sous l'œil de spectateurs superviseurs, est une opération à hauts risques… artistique et personnel. Car, même si l'ambiguïté entre réalité et fiction est savamment ménagée - ce que l'on nous montre est peut-être aussi vrai que… la téléréalité, quoique… -, il n'en reste pas moins que les choses dites ne sont jamais lettres mortes. Sans doute, outre la qualité artistique de la forme, faut-il trouver-là l'une des raisons pour lesquelles on entre dans cette histoire comme si c'était la nôtre.
Rendre publics les tourments d'une relation passionnelle, comme dans un jeu de rôles à visée thérapeutique, afin de s'en libérer sous l'œil de spectateurs superviseurs, est une opération à hauts risques… artistique et personnel. Car, même si l'ambiguïté entre réalité et fiction est savamment ménagée - ce que l'on nous montre est peut-être aussi vrai que… la téléréalité, quoique… -, il n'en reste pas moins que les choses dites ne sont jamais lettres mortes. Sans doute, outre la qualité artistique de la forme, faut-il trouver-là l'une des raisons pour lesquelles on entre dans cette histoire comme si c'était la nôtre.
D'ailleurs, le préambule nous y invite… Des coulisses, on entend leurs voix commenter le public assis ce soir-là dans les gradins de la Patinoire. Commentaires badins, miroirs déformants de ceux de leur journée à eux… d'où ressortent, palpables, les tensions qui les agitent en catimini, la jalousie sous-jacente, les frustrations prêtes à émerger, le présent de leur amour étant secrètement en chacun mis en abyme avec son passé et son futur.
Inclus dans les fragments pris sur le vif, les spectateurs le resteront sous l'effet d'adresses régulières créant entre la scène et la salle une communauté d'attentes. Aussi, quand ils sortiront de l'ombre pour s'avancer en bord de scène, redoublant leur nudité par la déclinaison de leurs jeunesses folles ("mère prof, grands-parents profs, arrière-grands-parents profs, père psy/double héritage identitaire, résistant et collabo…"), les aurons-nous définitivement adoptés, à nos risques et périls… Ce qui suivra sera désormais notre affaire à nous, leur histoire intranquille faisant écho.
C'est assis dans un module cubique, à proximité l'un de l'autre mais séparés, que l'affrontement va avoir lieu. Champ de bataille laissant surgir le non-dit, huis clos où l'enfer c'est l'autre. Après les préliminaires, se déversent les rancœurs accumulées faites de petits riens et de grands maux. Le peu de cas porté à l'autre devenu lointain, voire l'incompréhension des options de vie, crée une faille où s'engloutit leur désalliance. Partie de ping-pong de haut vol où chacun, de là où il (en) est, renvoie à l'autre des saillies assassines. L'impossibilité inscrite en chacun de pouvoir rencontrer l'étranger en soi, si ce n'est dans la jouissance quand bien même est-elle là encore vécue séparément, est portée à son incandescence. Les mots sont rudes, mais inspirés tous par un ressenti puissant faisant de cette joute une anthologie de la dispute en milieu "amoureux".
Le troisième tableau (les trois actes de la tragédie), orgiaque, verra exploser le décor de cubes sous l'effet des secousses telluriques engendrées par les frustrations. Puis, épuisés, purgés de l'hybris, ils se rapprochent n'étant plus séparés que par un micro, amplificateur nostalgique des émotions de leurs amours en panne… simple accalmie avant que la tempête dévastatrice ne reprenne de plus belle. Ainsi en va-t-il des "histoires d'amour qui finissent mal en général", comme le chantaient si superbement Les Rita Mitsouko.
Inclus dans les fragments pris sur le vif, les spectateurs le resteront sous l'effet d'adresses régulières créant entre la scène et la salle une communauté d'attentes. Aussi, quand ils sortiront de l'ombre pour s'avancer en bord de scène, redoublant leur nudité par la déclinaison de leurs jeunesses folles ("mère prof, grands-parents profs, arrière-grands-parents profs, père psy/double héritage identitaire, résistant et collabo…"), les aurons-nous définitivement adoptés, à nos risques et périls… Ce qui suivra sera désormais notre affaire à nous, leur histoire intranquille faisant écho.
C'est assis dans un module cubique, à proximité l'un de l'autre mais séparés, que l'affrontement va avoir lieu. Champ de bataille laissant surgir le non-dit, huis clos où l'enfer c'est l'autre. Après les préliminaires, se déversent les rancœurs accumulées faites de petits riens et de grands maux. Le peu de cas porté à l'autre devenu lointain, voire l'incompréhension des options de vie, crée une faille où s'engloutit leur désalliance. Partie de ping-pong de haut vol où chacun, de là où il (en) est, renvoie à l'autre des saillies assassines. L'impossibilité inscrite en chacun de pouvoir rencontrer l'étranger en soi, si ce n'est dans la jouissance quand bien même est-elle là encore vécue séparément, est portée à son incandescence. Les mots sont rudes, mais inspirés tous par un ressenti puissant faisant de cette joute une anthologie de la dispute en milieu "amoureux".
Le troisième tableau (les trois actes de la tragédie), orgiaque, verra exploser le décor de cubes sous l'effet des secousses telluriques engendrées par les frustrations. Puis, épuisés, purgés de l'hybris, ils se rapprochent n'étant plus séparés que par un micro, amplificateur nostalgique des émotions de leurs amours en panne… simple accalmie avant que la tempête dévastatrice ne reprenne de plus belle. Ainsi en va-t-il des "histoires d'amour qui finissent mal en général", comme le chantaient si superbement Les Rita Mitsouko.
Mais on ne restera pas sur cette note clôturant à jamais le processus. La recherche d'une "ouverture" impliquera l'intervention d'un membre du public, tiers choisi pour décoincer la situation, avant qu'un monologue rédempteur de la veine d'une Angelica Liddell faisant théâtre de ses pulsions libératrices ne rebatte les cartes. Cependant l'amour et son pendant, la maladie de la mort restant irréductiblement insaisissables, leur cheminement imprévisible échappe à toute raison. Pas étonnant alors que ce "mystère" humain s'inscrive dans le tableau final d'une vierge à l'enfant où les rôles seraient distribués différemment.
Éprouver jusqu'à la destruction le mal d'amour, vouloir en percer le mystère, "tenter sans force et sans armure d'atteindre l'inaccessible" en eux, telle est la quête d'Elle et Lui, deux répliques de nous-mêmes. Cette question plaçant l'humaine condition sous l'égide d'un destin tragique est ici "scandaleusement" traitée avec les armes du théâtre : l'illusion. Dans un décor de rêve cauchemardé, éclairé par des jeux de lumière à valeur hypnotique, accompagné par une musique organique, devant nous et avec nous, les deux personnages-personnes représentent un "miracle", celui de l'amour terrestre dans tous ses états.
Vu le samedi 17 juillet 2021 à 17 h 55, à La Manufacture - Patinoire, Avignon.
Éprouver jusqu'à la destruction le mal d'amour, vouloir en percer le mystère, "tenter sans force et sans armure d'atteindre l'inaccessible" en eux, telle est la quête d'Elle et Lui, deux répliques de nous-mêmes. Cette question plaçant l'humaine condition sous l'égide d'un destin tragique est ici "scandaleusement" traitée avec les armes du théâtre : l'illusion. Dans un décor de rêve cauchemardé, éclairé par des jeux de lumière à valeur hypnotique, accompagné par une musique organique, devant nous et avec nous, les deux personnages-personnes représentent un "miracle", celui de l'amour terrestre dans tous ses états.
Vu le samedi 17 juillet 2021 à 17 h 55, à La Manufacture - Patinoire, Avignon.
"Inconsolable(s), un jeu dangereux"
Création novembre 2019, CDN de Normandie-Rouen.
Écriture, mise en scène et jeu : Nadège Cathelineau et Julien Frégé.
Assistante à la mise en scène : Pénélope Avril.
Musique actuelle : Sébastien Lejeune/Loya.
Création lumière : Cyril Leclerc.
Costumes, plasticité et scénographie : Elizabeth Saint-Jalmes.
Régie générale : Jérôme Hardouin.
Régie lumières : Marie Roussel.
Création autour du texte de Stig Dagerman, "Notre besoin de consolation est impossible à rassasier".
Durée : 1 h 30.
Spectacle à partir de 14 ans.
•Avignon Off 2021•
Du 6 au 25 juillet 2021.
Tous les jours à 17 h 55, relâche les 12 et 19 juillet.
La Manufacture, Patinoire, (départ) 2, rue des Écoles, Avignon.
Réservations : 04 90 85 12 71.
>> lamanufacture.org
Tournée
5 novembre 2021 : Espace Culturel François Mitterrand, Canteleu (76).
Écriture, mise en scène et jeu : Nadège Cathelineau et Julien Frégé.
Assistante à la mise en scène : Pénélope Avril.
Musique actuelle : Sébastien Lejeune/Loya.
Création lumière : Cyril Leclerc.
Costumes, plasticité et scénographie : Elizabeth Saint-Jalmes.
Régie générale : Jérôme Hardouin.
Régie lumières : Marie Roussel.
Création autour du texte de Stig Dagerman, "Notre besoin de consolation est impossible à rassasier".
Durée : 1 h 30.
Spectacle à partir de 14 ans.
•Avignon Off 2021•
Du 6 au 25 juillet 2021.
Tous les jours à 17 h 55, relâche les 12 et 19 juillet.
La Manufacture, Patinoire, (départ) 2, rue des Écoles, Avignon.
Réservations : 04 90 85 12 71.
>> lamanufacture.org
Tournée
5 novembre 2021 : Espace Culturel François Mitterrand, Canteleu (76).