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Théâtre

Un chapeau de paille d'Italie : Union réussie entre théâtralité burlesque et lyrisme décalé

"Un chapeau de paille d'Italie", Théâtre de la Tempête, Paris, puis en tournée

Il y a du mouvement... frénétique, clownesque, comme une mécanique burlesque dans le "chapeau de paille d'Italie" de Gilles Bouillon. Comme une forme d'opéra un rien déjanté (punk ?) et de ballet décalé à la fois. C'est incroyablement jeune, dynamique et terriblement enthousiasmant.



© F. Berthon.
© F. Berthon.
Comme un chœur en déambulatoire saccadée, un chœur/cœur qui bat comme une urgence, de celles qui font que l'on quitte une vie pour une nouvelle... En l’occurrence celle de Fadinard ! L'homme doit se marier avec une fort jolie dame mais quelques brins de paille, représentés par un élégant chapeau italien porté par une toute aussi élégante jeune femme, vont quelque peu perturber (et le mot est faible) le déroulement de sa journée de noce.

En effet, le chapeau en question se fait croquer menu par le cheval du sieur Fadinard. Étant dans un "Labiche" (auteur taquin voire caustique et incisif sur les faits et gestes de la bourgeoisie), l'acte équin répréhensible a lieu lors d'un entretien illicite entre l'élégante jeune femme - que nous avons omis de classer dans la catégorie des femmes déjà mariés (à l'inverse de Fadinard et de sa future belle) - et son amant. Or, la digestion du féminin couvre-chef impliquant sa disparition définitive, l'infidèle s'en trouve fort marrie et dans la difficulté d'en donner une valable raison à son mari jaloux. De ce fait, l'amant et la coquine assiège la vie de notre Fadinard, initialement promis à l'union et non à la quête d'un galurin méditerranéen de remplacement.

© F. Berthon.
© F. Berthon.
"Un chapeau de paille d'Italie" est une pièce à la mécanique redoutable, impitoyable, dont les rouages parfaitement huilés déroulent un fil solide, tissant les situations vaudevillesques, tricotant et détricotant avec délice et malice les malentendus.

Gilles Bouillon prend à bras le corps le texte de Labiche, s'en empare avec délectation et insuffle à ses comédiens un rythme... un tempo endiablé ! Ces derniers traduisent cette effervescence en enthousiasme, en énergie explosive qui donnent à la pièce sa véritable partition de course effrénée. Pièce cruelle mais où la cruauté aiguise ses dents sur le rire en rafales que génèrent les échanges de répliques et les changements de situation souvent clownesques.

La mise en scène de Gilles Bouillon est redoutablement efficace. On sent que notre homme à la pratique de l'opéra tant, tel un chef d'orchestre, il mène la danse et sait entraîner sa troupe dans une interprétation lyrique - mais côté opéra-bouffe – de la pièce de Labiche... en y mêlant la folie propre des déambulations appartenant habituellement aux arts de la rue.

© F. Berthon.
© F. Berthon.
Et on sent une véritable cohésion dans ce travail. L'ensemble des comédiens (confirmés et ceux moins du Jeune Théâtre en Région Centre) s'en donnent à cœur joie, distillant leur enthousiasme et leur énergie à parts égales dans les échanges, les chansons et les déambulatoires. Malgré le rythme endiablé, le jeu ne souffre ni d'excès, ni de caricatures. Impeccablement chorégraphiés, les entrées et les sorties sont autant de ballets nous tenant en haleine comme dans une succession de séquences burlesques d'un film de Buster Keaton.

Gilles Bouillon a trouvé dans cette création l'accomplissement de son art et de sa maîtrise de la mise en scène en générant l'osmose réussie de la théâtralité burlesque de la comédie et du lyrisme décalé de l'opéra-bouffe. Il est en cela parfaitement soutenu par une troupe qui fait montre de cohésion et d'un incroyable talent collectif.

"Un chapeau de paille d'Italie"

© F. Berthon.
© F. Berthon.
Texte : Eugène Labiche.
Mise en scène : Gilles Bouillon.
Assistante mise en scène : Albane Aubry.
Dramaturgie : Bernard Pico.
Scénographie : Nathalie Holt.
Avec : Frédéric Cherbœuf (Fadinard), Jean-Luc Guitton (Nonancourt), Cécile Bouillot (La Baronne), Stéphane Comby (Tardiveau), Xavier Guittet (Beauperthuis), Denis Léger-Milhau (Achille), Léon Napias (Émile), Marc Siemiatycki (Vézinet).
Et les comédiens du Jeune Théâtre en Région Centre : Clément Bertani (Bobin), Camille Blouet (Clara), Juliette Chaigneau (Anaïs), Laure Coignard (Virginie), Julie Roux (Hélène), Mikaël Teyssié (Félix), Charlotte Barbier (Femme de chambre).
Et Alain Bruel : musicien.
Costumes : Marc Anselmi.
Lumières : Michel Theuil.
Maquillages et coiffures : Eva Gorszczyk.
Durée estimée : 2 heures.

À été créé du 10 au 26 octobre 2012 au CDR de Tours.
Du 14 novembre au 16 décembre 2012.
Du mardi au samedi à 20 h, dimanche à 16 h.
Théâtre de la Tempête, Cartoucherie de Vincennes, Paris 12e, 01 43 28 36 36.
>> la-tempete.fr

Tournée nationale :
8 au 12 janvier 2013 : CDN Angers.
16 au 19 janvier 2013 : CDN Nice.
24 et 25 janvier 2013 : Le Gallia Théâtre, Saintes.
29 et 30 janvier 2013 : Théâtre, Neuilly-sur-Seine.
1er février 2013 : Le Colisée Théâtre, Roubaix.
6 février 2013 : Équinoxe Scène Nationale, Châteauroux.
13 au 15 février 2013 : Scène Nationale, Angoulême.
20 au 22 février 2013 : Théâtre de Sartrouville et des Yvelines.
26 au 27 février 2013 : L'Odyssée, Scène conventionnée, Périgueux.
5 au 9 mars 2013 : Atelier Jean Vilar, Louvain-la-Neuve.
12 mars 2013 : Théâtre, Charleville-Mézières.
19 mars 2013 : La Salmanazar, Épernay.
21 et 22 mars 2013 : Centre culturel Le Figuier Blanc, Argenteuil.
28 mars 2013 : MA, Scène national, Montbéliard.
2 avril 2013 : Espace Rabelais, Chinon.
6 avril 2013 : Espace Marcel Carné, Saint-Michel-sur-Orge.
9 au 11 avril 2013 : Comédie de l'Est CDN, Colmar.
16 avril 2013 : Théâtre Arc en Ciel, Rungis.

18 et 19 avril 2013 : Théâtre de Privas.
27 et 28 avril 2013 : Théâtre du Passage, Neuchâtel (Suisse).
7 mai 2013 : Théâtre de Chartres.
13 mai 2013 : Maison de la Culture, Clermont-Ferrand.

Gil Chauveau
Jeudi 6 Décembre 2012

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L'argument, simple, n'en reste pas moins source de quiproquos, de riantes ficelles propres à la comédie et d'une bonne dose de situations grotesques, burlesques, voire absurdes. À l'aube d'un mariage des plus prometteurs avec la très florale Hélène – née sans doute dans les roses… ornant les pépinières parentales –, le fringant Fadinard se lance dans une quête effrénée pour récupérer un chapeau de paille d'Italie… Pour remplacer celui croqué – en guise de petit-déj ! – par un membre de la gent équestre, moteur exclusif de son hippomobile, ci-devant fiacre. À noter que le chapeau alimentaire appartenait à une belle – porteuse d'une alliance – en rendez-vous coupable avec un soldat, sans doute Apollon à ses heures perdues.

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