Le diable est dans les détails… Que va faire de cet écart (é)mouvant le spectateur du studio de création du TnBA convié à "découvrir" les (r)évolutions à l'œuvre dans cette installation performance théâtralisée ? Le metteur en scène Yacine Sif El Islam - ancien élève de l'éstba et acteur dans plusieurs des créations de Catherine Marnas - s'est emparé, avec envie, exigence et gourmandise, de ce questionnement artistique porté par deux autres hommes et trois femmes "faisant corps" avec lui.
Marcel Duchamp avec ses readymades en avait eu l'audace, "le tableau est autant fait par le regardeur que par l'artiste". Que projetons-nous de nos désirs mis à nu (cf. le titre de l'œuvre maîtresse du même Duchamp, "La Mariée mise à nu par ses célibataires") dans l'interprétation que nous donnons de ces tableaux vivants ? Se succédant à l'identique - si ce n'est "un écart" dans le choix des interprètes, homme, femme, jeune, moins jeune - ils se prêtent à l'expression de nos fantasmes.
Placé soit dans les travées, soit pour quelques-uns d'entre eux (miroirs des autres) directement sur la scène située au niveau de la salle, le spectateur est immergé de plain-pied dans le processus créatif. Et son œil avide, excité et curieux, va alors se saisir des combinaisons proposées pour se livrer à ses propres associations qui disent de lui plus qu'il n'est dit par les artistes observant une neutralité sculpturale.
Marcel Duchamp avec ses readymades en avait eu l'audace, "le tableau est autant fait par le regardeur que par l'artiste". Que projetons-nous de nos désirs mis à nu (cf. le titre de l'œuvre maîtresse du même Duchamp, "La Mariée mise à nu par ses célibataires") dans l'interprétation que nous donnons de ces tableaux vivants ? Se succédant à l'identique - si ce n'est "un écart" dans le choix des interprètes, homme, femme, jeune, moins jeune - ils se prêtent à l'expression de nos fantasmes.
Placé soit dans les travées, soit pour quelques-uns d'entre eux (miroirs des autres) directement sur la scène située au niveau de la salle, le spectateur est immergé de plain-pied dans le processus créatif. Et son œil avide, excité et curieux, va alors se saisir des combinaisons proposées pour se livrer à ses propres associations qui disent de lui plus qu'il n'est dit par les artistes observant une neutralité sculpturale.
D'ailleurs, les rares prises de parole sont là pour dire… qu'elles ne diront rien du message à décrypter puisqu'il n'y en a pas. Ou plus exactement, le sens à donner ne précède pas l'œuvre en cours mais résulte de ce que chacun apportera (ou pas) de ses propres projections. D'emblée la prise de parole de l'acteur metteur en scène est édifiante. "Je ne parlerai… ni de migration… ni de religion… pas de couscous non plus… je me fiche de savoir si tu aimes le Maroc…". Suivront deux autres, totalement anecdotiques, sans rapport avec l'enjeu ; toutes sont là pour dire en creux que le non-dit est de mise. À chaque spectateur de "dire".
Un homme échange un baiser avec une femme, puis le même avec un homme, une femme, encore une autre s'embrassent à leur tour. Deux hommes luttent ensemble, puis l'un devient l'une, avant qu'elles soient deux à lutter l'une contre l'autre. Ainsi de suite, des situations inter-échangées ; notre regard s'empare de ces micro-changements pour créer notre propre fantasmagorie, fruit de nos filtres personnels.
Mais l'expérience sensible prend encore force supplémentaire lorsque le dépouillement des corps sociaux mis à nu vient percuter frontalement notre rapport personnel au corps, le nôtre, celui des autres. En effet, la nudité exposée devient alors vectrice d'une authenticité sans fard, flagrante, puisque aucun voile ne vient plus la recouvrir, obligeant chacun à regarder en face ce qui, "normalement", est de bon ton d'éluder. Confronté à ces corps mis à nu, le "spectateur voyant" prend à son tour le risque de se mettre à nu - lui aussi - au travers des projections qui le dévoilent à lui-même.
Un homme échange un baiser avec une femme, puis le même avec un homme, une femme, encore une autre s'embrassent à leur tour. Deux hommes luttent ensemble, puis l'un devient l'une, avant qu'elles soient deux à lutter l'une contre l'autre. Ainsi de suite, des situations inter-échangées ; notre regard s'empare de ces micro-changements pour créer notre propre fantasmagorie, fruit de nos filtres personnels.
Mais l'expérience sensible prend encore force supplémentaire lorsque le dépouillement des corps sociaux mis à nu vient percuter frontalement notre rapport personnel au corps, le nôtre, celui des autres. En effet, la nudité exposée devient alors vectrice d'une authenticité sans fard, flagrante, puisque aucun voile ne vient plus la recouvrir, obligeant chacun à regarder en face ce qui, "normalement", est de bon ton d'éluder. Confronté à ces corps mis à nu, le "spectateur voyant" prend à son tour le risque de se mettre à nu - lui aussi - au travers des projections qui le dévoilent à lui-même.
Lorsque prend fin la performance et que les spectateurs du plateau sont accompagnés en coulisses par les performers ayant "livré" tout d'eux-mêmes, le metteur en jeu invite une spectatrice du premier rang à les rejoindre, actant ainsi la symbiose réussie entre proposeurs et "délivreurs" de sens. Le regard du spectateur, compositeur de sens, a créé l'œuvre.
"The way you see me"
Installation performée, création 1ère française.
Conception : Yacine Sif El Islam (Groupe Apache).
Avec : Lucas Chemel, Giulia Deline, Charlotte Ravinet, Gwendal Raymond, Yacine Sif El Islam, Bénédicte Simon, Axel Mandron.
Durée : 50 minutes.
A été représenté dans le cadre du FAB les 18 et 19 octobre 2019 au TnBA, Bordeaux (33).
Le FAB s'est déroulé du 4 au 20 octobre 2019.
>> fab.festivalbordeaux.com
Conception : Yacine Sif El Islam (Groupe Apache).
Avec : Lucas Chemel, Giulia Deline, Charlotte Ravinet, Gwendal Raymond, Yacine Sif El Islam, Bénédicte Simon, Axel Mandron.
Durée : 50 minutes.
A été représenté dans le cadre du FAB les 18 et 19 octobre 2019 au TnBA, Bordeaux (33).
Le FAB s'est déroulé du 4 au 20 octobre 2019.
>> fab.festivalbordeaux.com