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Théâtre

"Centroamerica" Une performance documentaire de l'Amérique centrale révélatrice des tensions de ces jeunes pays

Au tout début, "Centroamerica" est un projet artistique sur la région de l'Amérique centrale porté par deux artistes mexicains Luisa Pardo et Lázaro Gabino. Leur idée ? Aller à la découverte de ces sept petits pays qui séparent le Mexique de l'Amérique du Sud. Pour la simple raison que l'on méconnait souvent les lieux qui vous sont proches, quand on peut connaître par cœur les pays très lointains. Un voyage qui deviendra vite source de surprises, de prises de conscience et d'aventures dangereuses.



© Ulises Avila.
© Ulises Avila.
Voisins de langue, voisins géographiques, héritiers de cette même histoire brisée par la "découverte de l'Amérique par l'Europe", tout portait à croire qu'une sorte de vision commune pouvait être partagée entre les 130 millions d'habitants du Mexique et les 50 millions cumulés des sept pays de l'Amérique centrale, sauf que… Tout dans la vie est question de point de vue. Et quand nos deux artistes jettent leurs regards fraternels sur le Costa Rica, le Guatemala ou sur Belize, ils reçoivent en retour le regard que la population porte sur le Mexique. Un regard beaucoup moins poétique qui dit : "Le Mexique, c'est le mur qui nous empêche d'aller au nord !"

Jeu de domino étrange que ce monde dans lequel chaque pays empilé s'affronte au mur de son voisin dès qu'il se situe "au nord". Étrange sentiment pour nos deux explorateurs que de se sentir soudain aussi impitoyables que les USA sont de plus en plus vis-à-vis d'eux. Comme s'ils étaient, dans la grande famille hispanophone, des faux frères.

"Centroamerica", théâtre documentaire, prend sa source dans ce voyage fait de quantité de révélations. Il raconte, dans une première partie, ces différentes étapes qui se doublent d'actions artistiques dans chacun des pays parcourus, de rencontres et de sensations, qu'elles soient rassurantes ou déstabilisantes. C'est l'établissement d'une sorte de carte émotionnelle de cette partie du monde qui est représentée au plateau par la mise en place, au fur et à mesure des scènes, d'un patchwork de grandes pièces de tissus, chacune de motifs et de matières différentes, comme pour représenter la diversité rencontrée.

© Ulises Avila.
© Ulises Avila.
Mais le spectacle ne se borne pas à cet état des lieux. Et la curiosité, capable de rester parfois froide, lointaine, étrangère, cède soudain la place à l'humain lorsque nos deux comédiens aventuriers rencontrent M… L'histoire de M., originaire du Nicaragua, en exil au Costa Rica, à cause du danger qui la menace dans son pays. Une menace tout ce qu'il y a d'officiel, d'étatique. Une menace qui lui intima la nécessité de fuir un jour, sans possibilité de retour.

M. leur demande alors une promesse étrange. Arguant d'une ressemblance physique entre Luisa Pardo et elle-même, elle la prie de se rendre dans son pays sous son identité, car elle souffre d'une chose qu'elle ne peut réparer elle-même sans risquer sa vie : son frère, décédé lors de la pandémie de covid, a été enterré en fosse commune. Elle voudrait, telle une moderne Antigone, que celui-ci soit enterré dans le caveau familial auprès de leur mère.

Et voilà la deuxième partie du spectacle, qui joue non plus seulement des sentiments et des ressentis, mais des tripes, des peurs, des dangers auxquels se sont livrés ces deux créateurs, qui d'observateurs se transforment soudain en acteurs de leur propre documentaire.

Grâce à un jeu qui ne se satisfait pas d'une simple narration, mais fait appel à un investissement physique intense, Luisa Pardo et Lázaro Gabino Rodríguez incarnent leurs propres personnages, créant alternativement des scènes de violence, de purification, d'apaisement qui donnent vie à leur mise en scène. Au-delà de la narration documentaire, l'on ressent que la volonté des deux créateurs du spectacle est de stimuler nos sens critiques vis-à-vis de nos propres points de vue en tentant toujours de percevoir ce que l'autre voit et ressent. Une altérité qui échappe parfois à nos perceptions.
◙ Bruno Fougniès

"Centroamerica"

© Ulises Avila.
© Ulises Avila.
Spectacle en espagnol sur-titré en français.
Mise en scène : Luisa Pardo & Lázaro Gabino Rodríguez.
Assistante à la mise en scène : Macaria Reyes.
Avec : Luisa Pardo & Lázaro Gabino Rodríguez.
Traduction et adaptation des surtitres : Elisabetta Scarin.
Création lumière et scénographie : Sergio López Vigueras.
Conception et réalisation des rideaux : Pedro Pizarro.
Assistance générale : Janet Vázquez et Manu Guerrero.
Production : Lagartijas Tiradas al Sol.
À partir de 13 ans.
Durée : 1 h 40.

A été joué les 15 et 16 octobre 2024 au Théâtre Joliette à Marseille.

Tournée
29 octobre 2024 : Universidad de Bologna. Bologne (Italie).
2 et 3 novembre 2024 : Romaeuropa, Rome (Italie).
8 novembre 2024 : Temporada Alta, Girona (Espagne).
Du 13 au 23 novembre 2024 : Théâtre Vidy, Lausanne (Suisse).
27 novembre 2024 : Fabrique de Théâtre - Site Européen de Création, Bastia (20).

Bruno Fougniès
Vendredi 25 Octobre 2024

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•Off 2024• "Mon Petit Grand Frère" Récit salvateur d'un enfant traumatisé au bénéfice du devenir apaisé de l'adulte qu'il est devenu

Comment dire l'indicible, comment formuler les vagues souvenirs, les incertaines sensations qui furent captés, partiellement mémorisés à la petite enfance. Accoucher de cette résurgence voilée, diffuse, d'un drame familial ayant eu lieu à l'âge de deux ans est le parcours théâtral, étonnamment réussie, que nous offre Miguel-Ange Sarmiento avec "Mon petit grand frère". Ce qui aurait pu paraître une psychanalyse impudique devient alors une parole salvatrice porteuse d'un écho libératoire pour nos propres histoires douloureuses.

© Ève Pinel.
9 mars 1971, un petit bonhomme, dans les premiers pas de sa vie, goûte aux derniers instants du ravissement juvénile de voir sa maman souriante, heureuse. Mais, dans peu de temps, la fenêtre du bonheur va se refermer. Le drame n'est pas loin et le bonheur fait ses valises. À ce moment-là, personne ne le sait encore, mais les affres du destin se sont mis en marche, et plus rien ne sera comme avant.

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Puis, entre dans la narration la disparition du grand frère de trois ans son aîné. La mort n'ayant, on le sait, aucune morale et aucun scrupule à commettre ses actes, antinaturelles lorsqu'il s'agit d'ôter la vie à un bambin. L'accident est acté et deux gamins dans le bassin sont décédés, ceux-ci n'ayant pu être ramenés à la vie. Là, se révèle l'avant et l'après. Le bonheur s'est enfui et rien ne sera plus comme avant.

Gil Chauveau
14/06/2024
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Ils sont peu nombreux ceux qui ont une réelle vision d'interprétation d'œuvres d'artistes "monuments" tels Brel, Barbara, Brassens, Piaf et bien d'autres. Lou Casa fait partie de ces rares virtuoses qui arrivent à imprimer leur signature sans effacer le filigrane du monstre sacré interprété. Après une relecture lumineuse en 2016 de quelques chansons de Barbara, voici le profond et solaire "Barbara & Brel".

© Betül Balkan.
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On retrouve dans cet album une réelle intensité pour chaque interprétation, une profondeur dans la tessiture, dans les tonalités exprimées dont on sent qu'elles puisent tant dans l'âme créatrice des illustres auteurs que dans les recoins intimes, les chemins de vie personnelle de Marc Casa, pour y mettre, dans une manière discrète et maîtrisée, emplie de sincérité, un peu de sa propre histoire.

"Nous mettons en écho des chansons de Barbara et Brel qui ont abordé les mêmes thèmes mais de manières différentes. L'idée est juste d'utiliser leur matière, leur art, tout en gardant une distance, en s'affranchissant de ce qu'ils sont, de ce qu'ils représentent aujourd'hui dans la culture populaire, dans la culture en général… qui est énorme !"

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© Philippe Hanula.
L'argument, simple, n'en reste pas moins source de quiproquos, de riantes ficelles propres à la comédie et d'une bonne dose de situations grotesques, burlesques, voire absurdes. À l'aube d'un mariage des plus prometteurs avec la très florale Hélène – née sans doute dans les roses… ornant les pépinières parentales –, le fringant Fadinard se lance dans une quête effrénée pour récupérer un chapeau de paille d'Italie… Pour remplacer celui croqué – en guise de petit-déj ! – par un membre de la gent équestre, moteur exclusif de son hippomobile, ci-devant fiacre. À noter que le chapeau alimentaire appartenait à une belle – porteuse d'une alliance – en rendez-vous coupable avec un soldat, sans doute Apollon à ses heures perdues.

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Gil Chauveau
26/03/2024