La scène découvre un très grand escalier blanc, pentu et haut de dix-sept marches. Il recouvre tout le plateau et est durant la représentation un élément qui pose un cadre délimité et délimitant dans les trajets et postures des personnages. Il est l'élément contraignant par nécessité pour planter une situation dans laquelle tout est contrainte pour ceux qui y sont logés. La guerre d'Algérie est en fond de décor avec ses relents racistes envers la figure de l'Arabe, encore tristement d'actualité, et ce, depuis de nombreuses années. Jean Genet a écrit "Les paravents" (1961) durant cette période et a été représenté la première fois en 1966. Les thèmes de l'oppression, du pouvoir et de la violence sont le fil rouge de chacune des scènes.
Les voix, dans les premières répliques, se perdent dans une scénographie imposante où le blanc immaculé cache une oppression tel un paravent. La blancheur occulte en effet, avant qu'ils ne se montrent ensuite d'eux-mêmes, le mépris et le racisme où le silence cajole une misère que la parole dévoile et où chaque marche sur laquelle se posent, entre autres, Saïd (Aymen Bouchou) et Leïla (Hinda Abdelaoui), est une étape d'un après qui ne dessine pas son horizon, sauf celle d'une fuite en avant vers une autre misère ou vers la mort.
Les voix, dans les premières répliques, se perdent dans une scénographie imposante où le blanc immaculé cache une oppression tel un paravent. La blancheur occulte en effet, avant qu'ils ne se montrent ensuite d'eux-mêmes, le mépris et le racisme où le silence cajole une misère que la parole dévoile et où chaque marche sur laquelle se posent, entre autres, Saïd (Aymen Bouchou) et Leïla (Hinda Abdelaoui), est une étape d'un après qui ne dessine pas son horizon, sauf celle d'une fuite en avant vers une autre misère ou vers la mort.
Cet escalier, qui fait l'éclat et la marque des décors de Riccardo Hernández et de Léa Tubiana, en devient aussi son pendant lunaire, car le déplacement, dans ces conditions, est un partenaire difficile. Aussi, la voix devient centrale et la poésie de Genet bascule parfois, comme à son habitude, sur une franchise des mots en témoignage d'un contexte social.
Les personnages sont comme avalés par un monde où la démesure est mesure, à l'image de la scénographie et de la poésie du verbe, paravent élégant et cruel de la violence des oppresseurs. Dans ce va-et-vient entre déplacements contraints et répliques poétiques, la lecture et l'attention du public peuvent être troublées par ce visage théâtral à la Janus.
Les protagonistes se meuvent par de grandes enjambées, parfois à la vitesse d'un écoulement de secondes. On reconnaît chez Saïd une façon particulière de se déplacer, élégante et raffinée. L'escalier influe dans les relations des uns et des autres suivant qu'ils soient assis ou allongés, debout ou se mouvant sur celui-ci. Il témoigne, aussi pour eux, d'une difficulté à exister socialement et physiquement par rapport aux légionnaires (Mohamed Bouadla, Océane Caïraty, Xavier Gallais, Romain Gy, Jan Hammenecker, Brahim Koutari, Mounir Margoum, Maxime Thébault) situés souvent en dehors de l'escalier.
Les personnages sont comme avalés par un monde où la démesure est mesure, à l'image de la scénographie et de la poésie du verbe, paravent élégant et cruel de la violence des oppresseurs. Dans ce va-et-vient entre déplacements contraints et répliques poétiques, la lecture et l'attention du public peuvent être troublées par ce visage théâtral à la Janus.
Les protagonistes se meuvent par de grandes enjambées, parfois à la vitesse d'un écoulement de secondes. On reconnaît chez Saïd une façon particulière de se déplacer, élégante et raffinée. L'escalier influe dans les relations des uns et des autres suivant qu'ils soient assis ou allongés, debout ou se mouvant sur celui-ci. Il témoigne, aussi pour eux, d'une difficulté à exister socialement et physiquement par rapport aux légionnaires (Mohamed Bouadla, Océane Caïraty, Xavier Gallais, Romain Gy, Jan Hammenecker, Brahim Koutari, Mounir Margoum, Maxime Thébault) situés souvent en dehors de l'escalier.
Regroupés parfois comme un régiment militaire avec leurs gestiques rythmées et machinales, ils sont fréquemment en bas de scène, habillés entre autres de leurs bottes et de leurs longues chaussettes. Durant la représentation, apparaissent de très beaux tableaux dans lesquels les voix se chevauchent à dessein avec de belles réparties humoristiques.
En écho à l'époque où Genet a écrit "Les Paravents", les escaliers deviennent la symbolisation d'un djebel dans lequel nombre de colonisés algériens se terraient, se cachaient ou vivaient, étrangers à leur propre terre, car dépossédés. Les personnages apparaissent parfois en haut des marches, comme pour une attaque. Ou immobile quand ils ne montent pas vers le sommet. Le moindre mouvement devient action et attention, la chute, autant sociale que létale, pouvant intervenir comme à la toute fin de la représentation où tous s'évanouissent en plongeant comme des corps morts du haut des marches.
La deuxième partie démarre avec une vidéo d'un ancien appelé qui lit quelques lettres envoyées à sa famille, cassant quelque peu la dynamique de jeu et plongeant la pièce dans une vue historique qui n'était pas nécessaire. La mise en scène d'Arthur Nauzyciel plante aussi un univers où l'immobilité et le mouvement sont deux axes sur lesquels oscillent nos personnages, l'insécurité sociale et physique demeurant à chaque instant. Sa lecture nous rappelle cruellement notre actualité dans nos temps durs et mêlés où chacun d'entre eux peut être la figure autant d'un colonisé, d'un immigré, d'un migrant que d'un laissé-pour-compte malmenés par l'oppression d'un État.
En écho à l'époque où Genet a écrit "Les Paravents", les escaliers deviennent la symbolisation d'un djebel dans lequel nombre de colonisés algériens se terraient, se cachaient ou vivaient, étrangers à leur propre terre, car dépossédés. Les personnages apparaissent parfois en haut des marches, comme pour une attaque. Ou immobile quand ils ne montent pas vers le sommet. Le moindre mouvement devient action et attention, la chute, autant sociale que létale, pouvant intervenir comme à la toute fin de la représentation où tous s'évanouissent en plongeant comme des corps morts du haut des marches.
La deuxième partie démarre avec une vidéo d'un ancien appelé qui lit quelques lettres envoyées à sa famille, cassant quelque peu la dynamique de jeu et plongeant la pièce dans une vue historique qui n'était pas nécessaire. La mise en scène d'Arthur Nauzyciel plante aussi un univers où l'immobilité et le mouvement sont deux axes sur lesquels oscillent nos personnages, l'insécurité sociale et physique demeurant à chaque instant. Sa lecture nous rappelle cruellement notre actualité dans nos temps durs et mêlés où chacun d'entre eux peut être la figure autant d'un colonisé, d'un immigré, d'un migrant que d'un laissé-pour-compte malmenés par l'oppression d'un État.
"Les Paravents"
Texte Jean Genet.
Mise en scène : Arthur Nauzyciel.
Avec : Hinda Abdelaoui, Zbeida Belhajamor, Mohamed Bouadla, Aymen Bouchou, Océane Caïraty, Marie-Sophie Ferdane, Xavier Gallais, Hammou Graïa, Romain Gy, Jan Hammenecker, Brahim Koutari, Benicia Makengele, Mounir Margoum, Farida Rahouadj, Maxime Thébault, Catherine Vuillez et la voix de Frédéric Pierrot.
Dramaturgie : Leila Adham.
Travail chorégraphique : Damien Jalet.
Lumières : Scott Zielinski.
Scénographie et accessoires : Riccardo Hernández, avec la collaboration de Léa Tubiana.
Sculpture : Alain Burkhart, assistée de Jeanne Leblon Delienne.
Son : Xavier Jacquot.
Vidéo : Pierre-Alain Giraud.
Costumes, maquillages, coiffures et peinture des djellabas : José Lévy.
Coiffures et maquillages : Agnès Dupoirier.
Habillage : Charlotte Gillard.
Accessoires : Fanny Martel.
Réalisation du décor : Ateliers du Théâtre du Nord.
Réalisation des costumes : Ateliers du Théâtre national de Bretagne.
Durée : 4 h (avec l'entracte de 15 minutes).
Du 31 mai au 19 juin 2024.
Du mardi au samedi à 19 h 30, dimanche à 15 h.
Représentations surtitrées en anglais les samedis 1er, 8 et 15 juin.
Odéon Théâtre de l'Europe, Paris 6e, 01 44 85 40 40.
>> theatre-odeon.eu
Mise en scène : Arthur Nauzyciel.
Avec : Hinda Abdelaoui, Zbeida Belhajamor, Mohamed Bouadla, Aymen Bouchou, Océane Caïraty, Marie-Sophie Ferdane, Xavier Gallais, Hammou Graïa, Romain Gy, Jan Hammenecker, Brahim Koutari, Benicia Makengele, Mounir Margoum, Farida Rahouadj, Maxime Thébault, Catherine Vuillez et la voix de Frédéric Pierrot.
Dramaturgie : Leila Adham.
Travail chorégraphique : Damien Jalet.
Lumières : Scott Zielinski.
Scénographie et accessoires : Riccardo Hernández, avec la collaboration de Léa Tubiana.
Sculpture : Alain Burkhart, assistée de Jeanne Leblon Delienne.
Son : Xavier Jacquot.
Vidéo : Pierre-Alain Giraud.
Costumes, maquillages, coiffures et peinture des djellabas : José Lévy.
Coiffures et maquillages : Agnès Dupoirier.
Habillage : Charlotte Gillard.
Accessoires : Fanny Martel.
Réalisation du décor : Ateliers du Théâtre du Nord.
Réalisation des costumes : Ateliers du Théâtre national de Bretagne.
Durée : 4 h (avec l'entracte de 15 minutes).
Du 31 mai au 19 juin 2024.
Du mardi au samedi à 19 h 30, dimanche à 15 h.
Représentations surtitrées en anglais les samedis 1er, 8 et 15 juin.
Odéon Théâtre de l'Europe, Paris 6e, 01 44 85 40 40.
>> theatre-odeon.eu