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Lettre ouverte au Premier ministre - La culture placée dans une situation kafkaïenne  17/10/2020

Le Président de la République a fait des annonces qui ont foudroyé de plein fouet la Culture en France. Toute expression artistique présentée dans une salle de spectacles doit être stoppée pour 21 h précises. La décision est si brutale que, même le ministère de la Culture s'est fait l'écho des représentants des professionnels auprès du Premier ministre.

Le couperet est à nouveau tombé, prétextant qu'aucune dérogation ne serait accordée.
Mais sont-ce des dérogations que nous demandons ou simplement une écoute et une compréhension de nos métiers ?

Jusqu'à présent, les entrepreneurs de spectacles se sont conformés à la lettre aux indications du Gouvernement. Ils n'ont eu de cesse d'informer leurs publics et leurs interlocuteurs du respect des mesures à mettre en place. Chaque équipe artistique et chaque salle de spectacles a montré le soin qui était apporté dans le respect des gestes barrières.

Le Gouvernement semblait avoir pris la mesure des efforts déployés par les acteurs du spectacle en autorisant le 28 août, des dérogations aux distanciations sur les scènes des théâtres.

L'idée qui s'est imposée hier, lors d'une rencontre très attentionnée avec la ministre de la Culture et les professionnels, était la possibilité que le billet de spectacle serve de justificatif aux spectateurs pour rentrer chez eux après 21 heures.

De l'avis de tous, la preuve du billet de spectacle devrait permettre au public de regagner son domicile sans être inquiété de se voir dresser une amende. Cette mesure ayant l'avantage de rassurer le public qui se rend au spectacle, sans avoir la crainte de ne pouvoir assister à la fin du spectacle. Cette idée, partagée par l'ensemble des professionnels du spectacle vivant mettrait sur un pied d'égalité les publics, les plus proches comme les plus éloignés du lieu du spectacle.
Comment imaginer sérieusement que les publics puissent se rendre à 18h ou à 18h30 au spectacle dès lors qu'ils ont une activité professionnelle, d'autant plus s'ils sont en télétravail. Cela signifie que tout spectacle serait condamné à ne durer qu'une heure ou une heure et demie.

M. le Premier ministre, ce n'est pas une dérogation que nous demandons, mais une exception culturelle qui rend à la Culture son caractère unique.

Qu'il soit permis d'insister pour rappeler que, durant toute la représentation, le public reste masqué et distancié.

Ne privons pas le public du plaisir qu'il avait retrouvé en retournant dans les salles de spectacles après des mois d'interruption.

Les mesures de sécurité ne doivent pas faire disparaître la confiance du public comme celle des acteurs de la Culture, qui accompagnait avec enthousiasme la reprise d'activité tant désirée par tous !

Communiqué du SNES (Syndicat National des Entrepreneurs de Spectacles) 16 octobre 2020.
>> spectacle-snes.org
La Rédaction

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•Off 2024• "Mon Petit Grand Frère" Récit salvateur d'un enfant traumatisé au bénéfice du devenir apaisé de l'adulte qu'il est devenu

Comment dire l'indicible, comment formuler les vagues souvenirs, les incertaines sensations qui furent captés, partiellement mémorisés à la petite enfance. Accoucher de cette résurgence voilée, diffuse, d'un drame familial ayant eu lieu à l'âge de deux ans est le parcours théâtral, étonnamment réussie, que nous offre Miguel-Ange Sarmiento avec "Mon petit grand frère". Ce qui aurait pu paraître une psychanalyse impudique devient alors une parole salvatrice porteuse d'un écho libératoire pour nos propres histoires douloureuses.

© Ève Pinel.
9 mars 1971, un petit bonhomme, dans les premiers pas de sa vie, goûte aux derniers instants du ravissement juvénile de voir sa maman souriante, heureuse. Mais, dans peu de temps, la fenêtre du bonheur va se refermer. Le drame n'est pas loin et le bonheur fait ses valises. À ce moment-là, personne ne le sait encore, mais les affres du destin se sont mis en marche, et plus rien ne sera comme avant.

En préambule du malheur à venir, le texte, traversant en permanence le pont entre narration réaliste et phrasé poétique, nous conduit à la découverte du quotidien plein de joie et de tendresse du pitchoun qu'est Miguel-Ange. Jeux d'enfants faits de marelle, de dinette, de billes, et de couchers sur la musique de Nounours et de "bonne nuit les petits". L'enfant est affectueux. "Je suis un garçon raisonnable. Je fais attention à ma maman. Je suis un bon garçon." Le bonheur est simple, mais joyeux et empli de tendresse.

Puis, entre dans la narration la disparition du grand frère de trois ans son aîné. La mort n'ayant, on le sait, aucune morale et aucun scrupule à commettre ses actes, antinaturelles lorsqu'il s'agit d'ôter la vie à un bambin. L'accident est acté et deux gamins dans le bassin sont décédés, ceux-ci n'ayant pu être ramenés à la vie. Là, se révèle l'avant et l'après. Le bonheur s'est enfui et rien ne sera plus comme avant.

Gil Chauveau
14/06/2024
Spectacle à la Une

•Off 2024• Lou Casa "Barbara & Brel" À nouveau un souffle singulier et virtuose passe sur l'œuvre de Barbara et de Brel

Ils sont peu nombreux ceux qui ont une réelle vision d'interprétation d'œuvres d'artistes "monuments" tels Brel, Barbara, Brassens, Piaf et bien d'autres. Lou Casa fait partie de ces rares virtuoses qui arrivent à imprimer leur signature sans effacer le filigrane du monstre sacré interprété. Après une relecture lumineuse en 2016 de quelques chansons de Barbara, voici le profond et solaire "Barbara & Brel".

© Betül Balkan.
Comme dans son précédent opus "À ce jour" (consacré à Barbara), Marc Casa est habité par ses choix, donnant un souffle original et unique à chaque titre choisi. Évitant musicalement l'écueil des orchestrations "datées" en optant systématiquement pour des sonorités contemporaines, chaque chanson est synonyme d'une grande richesse et variété instrumentales. Le timbre de la voix est prenant et fait montre à chaque fois d'une émouvante et artistique sincérité.

On retrouve dans cet album une réelle intensité pour chaque interprétation, une profondeur dans la tessiture, dans les tonalités exprimées dont on sent qu'elles puisent tant dans l'âme créatrice des illustres auteurs que dans les recoins intimes, les chemins de vie personnelle de Marc Casa, pour y mettre, dans une manière discrète et maîtrisée, emplie de sincérité, un peu de sa propre histoire.

"Nous mettons en écho des chansons de Barbara et Brel qui ont abordé les mêmes thèmes mais de manières différentes. L'idée est juste d'utiliser leur matière, leur art, tout en gardant une distance, en s'affranchissant de ce qu'ils sont, de ce qu'ils représentent aujourd'hui dans la culture populaire, dans la culture en général… qui est énorme !"

Gil Chauveau
19/06/2024
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•Off 2024• "Un Chapeau de paille d'Italie" Une version singulière et explosive interrogeant nos libertés individuelles…

… face aux normalisations sociétales et idéologiques

Si l'art de générer des productions enthousiastes et inventives est incontestablement dans l'ADN de la compagnie L'Éternel Été, l'engagement citoyen fait aussi partie de la démarche créative de ses membres. La présente proposition ne déroge pas à la règle. Ainsi, Emmanuel Besnault et Benoît Gruel nous offrent une version décoiffante, vive, presque juvénile, mais diablement ancrée dans les problématiques actuelles, du "Chapeau de paille d'Italie"… pièce d'Eugène Labiche, véritable référence du vaudeville.

© Philippe Hanula.
L'argument, simple, n'en reste pas moins source de quiproquos, de riantes ficelles propres à la comédie et d'une bonne dose de situations grotesques, burlesques, voire absurdes. À l'aube d'un mariage des plus prometteurs avec la très florale Hélène – née sans doute dans les roses… ornant les pépinières parentales –, le fringant Fadinard se lance dans une quête effrénée pour récupérer un chapeau de paille d'Italie… Pour remplacer celui croqué – en guise de petit-déj ! – par un membre de la gent équestre, moteur exclusif de son hippomobile, ci-devant fiacre. À noter que le chapeau alimentaire appartenait à une belle – porteuse d'une alliance – en rendez-vous coupable avec un soldat, sans doute Apollon à ses heures perdues.

N'ayant pas vocation à pérenniser toute forme d'adaptation académique, nos deux metteurs en scène vont imaginer que cette histoire absurde est un songe, le songe d'une nuit… niché au creux du voyage ensommeillé de l'aimable Fadinard. Accrochez-vous à votre oreiller ! La pièce la plus célèbre de Labiche se transforme en une nouvelle comédie explosive, électro-onirique ! Comme un rêve habité de nounours dans un sommeil moelleux peuplé d'êtres extravagants en doudounes orange.

Gil Chauveau
26/03/2024