La Revue du Spectacle, le magazine des arts de la scène et du spectacle vivant. Infos théâtre, chanson, café-théâtre, cirque, arts de la rue, agenda, CD, etc.
Théâtre

Quand l'art du comédien interroge la magie et renvoie à l’art des griots ! - 09/04/2014

Philippe Dormoy est conteur. Et un peu plus. Lorsqu’il entreprend, pour la grande joie d’un public (érudit ou non), de rendre compte du roi Lear dans son spectacle "Lear, conte à rebours", il le fait à sa manière méthodique et réjouissante. Installe les personnages, le roi, ses filles, ses conseillers, les bâtards le bouffon et… le conteur. Multipliant les voix et les apartés, les dialogues entre...  

Une forme concertante sensible qui relie regards et gestes, voix humaine et musiques - 04/04/2014

C’est un vieil homme qui tient conférence sur les méfaits du tabac. Michel Robin, pour qui Nioukhine (c’est le nom du personnage) fut son tout premier rôle quand il débutait, l’éclaire de son œil pétillant et malicieux. C’est un vieil homme qui tient conférence lors d’un concert de bienfaisance qu'organise d’une poigne de fer, on l’apprend au hasard du récit, son épouse brutale et avaricieuse,...  

Le "Tartuffe" de Bondy n'hésite pas à amplifier les postures de la tradition moliéresque - 03/04/2014

La version théâtrale du Tartuffe proposée à l’Odéon par Luc Bondy a été créée à Vienne dans une traduction adaptation en allemand. Dépaysée. Présentée en France avec une distribution française, elle baigne de nouveau dans le texte originel de Molière tout en gardant l’esprit d’une adaptation, la langue est à peine ajustée, tout juste poncée… Le travail réalisé est étonnamment juste, offrant au...  

Des vaisseaux du cœur monte l'extraordinaire et torride sève de l'amour passionnel - 02/04/2014

En 1988, "Les Vaisseaux du cœur" de Benoîte Groult défrayait la chronique, créait la polémique par la crudité pleinement assumée de la description d'une relation/passion extra-conjugale où l'amour physique avait une place centrale, étant à la fois le pivot et le moteur explosif de cette union magique, à la fois dévastatrice et constructive... mais véritablement poignante. Vingt-cinq ans plus...  

"Le Dernier Jour du jeûne", un hymen à la joie crié par trois générations de femmes - 27/03/2014

Simon Abkarian a l'élégance en plume et le franc-parler méditerranéen. Tous les mots commencent par une lettre capitale comme l'est l'existence des personnages de la pièce. Les guillemets s'ouvrent sur des souvenirs, les répliques sont instantanées, les virgules sont soufflées pour donner du rythme à la narration. L’histoire peut commencer car l’écriture de Simon Abkarian est une avant-mise en...  

Avec fougue et générosité, Maggiani fait voyager le spectateur dans la "selve obscure" de Dante - 25/03/2014

Reprise Serge Maggiani continue dans une manière très personnelle un voyage littéraire passionnant amorcé en 2008 à Avignon avec Romeo Castellucci. Le comédien, soutenu dans son aventure par Valérie Dréville, porte la parole d’un célébrissime poète, trop célèbre pour n’être point méconnu. Dante. Le comédien est enthousiaste et érudit. La découverte de Dante Alighieri, monument de la littérature,...  

Quand l'envers des maux donne l'envie des mots... - 20/03/2014

Il y a trois ans, nous découvrions la compagnie La Savaneskise à l'occasion de leur premier spectacle, une version audacieuse et rock'n roll des "Précieuses Ridicules" de Molière. Cette jeune troupe est de retour sur scène avec une émouvante et optimiste création sur les handicaps liés à la parole et, d'une manière générale, sur l'incommunicabilité... Un des maux du siècle. Quand les mots sont...  

"Protée" de Philippe Adrien, une mise en scène jubilatoire avec surprises et farces que le public attrape au vol pour son plus grand plaisir - 18/03/2014

L’œuvre de Paul Claudel permet une liberté artistique, surtout quand elle est brillamment et intelligemment mise en scène par des metteurs en scène qui connaissent les codes du théâtre et les flouent dans la réalisation d’un travail exhibé avec magie et ingéniosité. Philippe Adrien, derrière ses lunettes, ses yeux devinent des univers qu’il a envie de découvrir, d’explorer et d’adopter dans des...  

Au cœur de la tourmente et de l'horreur, le si fragile privilège de l'otage - 19/03/2014

C’est la seconde guerre mondiale racontée par une petite fille devenue femme qui vécue la guerre loin de son père au combat mais proche de sa mère, ballottée, de traque en traque, de cachette en cachette pour finir dans les camps de Drancy... puis de Bergen-Belsen. C’est la guerre vue par une petite fille. Elle a six ans quand elle débute son récit et onze ans quand elle le finit. Mais c’est...  

"Moi, Colette"... La trajectoire éminemment féminine d'une femme libre... - 13/03/2014

1935, paquebot transatlantique Normandie, intérieur cabine - luxueuse, of course ! -, retour de voyage inaugural, parfum féminin à bord... De celle qui incarna la féminité "nature" dans toute son insolente splendeur... Prénom et nom* : Colette... Pour cause de causerie, retour en arrière sur la trajectoire éminemment féminine d'une femme libre... par elle-même ! 7 juin 1935, le Normandie quitte...  
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À Découvrir

•Off 2024• "Mon Petit Grand Frère" Récit salvateur d'un enfant traumatisé au bénéfice du devenir apaisé de l'adulte qu'il est devenu

Comment dire l'indicible, comment formuler les vagues souvenirs, les incertaines sensations qui furent captés, partiellement mémorisés à la petite enfance. Accoucher de cette résurgence voilée, diffuse, d'un drame familial ayant eu lieu à l'âge de deux ans est le parcours théâtral, étonnamment réussie, que nous offre Miguel-Ange Sarmiento avec "Mon petit grand frère". Ce qui aurait pu paraître une psychanalyse impudique devient alors une parole salvatrice porteuse d'un écho libératoire pour nos propres histoires douloureuses.

© Ève Pinel.
9 mars 1971, un petit bonhomme, dans les premiers pas de sa vie, goûte aux derniers instants du ravissement juvénile de voir sa maman souriante, heureuse. Mais, dans peu de temps, la fenêtre du bonheur va se refermer. Le drame n'est pas loin et le bonheur fait ses valises. À ce moment-là, personne ne le sait encore, mais les affres du destin se sont mis en marche, et plus rien ne sera comme avant.

En préambule du malheur à venir, le texte, traversant en permanence le pont entre narration réaliste et phrasé poétique, nous conduit à la découverte du quotidien plein de joie et de tendresse du pitchoun qu'est Miguel-Ange. Jeux d'enfants faits de marelle, de dinette, de billes, et de couchers sur la musique de Nounours et de "bonne nuit les petits". L'enfant est affectueux. "Je suis un garçon raisonnable. Je fais attention à ma maman. Je suis un bon garçon." Le bonheur est simple, mais joyeux et empli de tendresse.

Puis, entre dans la narration la disparition du grand frère de trois ans son aîné. La mort n'ayant, on le sait, aucune morale et aucun scrupule à commettre ses actes, antinaturelles lorsqu'il s'agit d'ôter la vie à un bambin. L'accident est acté et deux gamins dans le bassin sont décédés, ceux-ci n'ayant pu être ramenés à la vie. Là, se révèle l'avant et l'après. Le bonheur s'est enfui et rien ne sera plus comme avant.

Gil Chauveau
14/06/2024
Spectacle à la Une

•Off 2024• Lou Casa "Barbara & Brel" À nouveau un souffle singulier et virtuose passe sur l'œuvre de Barbara et de Brel

Ils sont peu nombreux ceux qui ont une réelle vision d'interprétation d'œuvres d'artistes "monuments" tels Brel, Barbara, Brassens, Piaf et bien d'autres. Lou Casa fait partie de ces rares virtuoses qui arrivent à imprimer leur signature sans effacer le filigrane du monstre sacré interprété. Après une relecture lumineuse en 2016 de quelques chansons de Barbara, voici le profond et solaire "Barbara & Brel".

© Betül Balkan.
Comme dans son précédent opus "À ce jour" (consacré à Barbara), Marc Casa est habité par ses choix, donnant un souffle original et unique à chaque titre choisi. Évitant musicalement l'écueil des orchestrations "datées" en optant systématiquement pour des sonorités contemporaines, chaque chanson est synonyme d'une grande richesse et variété instrumentales. Le timbre de la voix est prenant et fait montre à chaque fois d'une émouvante et artistique sincérité.

On retrouve dans cet album une réelle intensité pour chaque interprétation, une profondeur dans la tessiture, dans les tonalités exprimées dont on sent qu'elles puisent tant dans l'âme créatrice des illustres auteurs que dans les recoins intimes, les chemins de vie personnelle de Marc Casa, pour y mettre, dans une manière discrète et maîtrisée, emplie de sincérité, un peu de sa propre histoire.

"Nous mettons en écho des chansons de Barbara et Brel qui ont abordé les mêmes thèmes mais de manières différentes. L'idée est juste d'utiliser leur matière, leur art, tout en gardant une distance, en s'affranchissant de ce qu'ils sont, de ce qu'ils représentent aujourd'hui dans la culture populaire, dans la culture en général… qui est énorme !"

Gil Chauveau
19/06/2024
Spectacle à la Une

•Off 2024• "Un Chapeau de paille d'Italie" Une version singulière et explosive interrogeant nos libertés individuelles…

… face aux normalisations sociétales et idéologiques

Si l'art de générer des productions enthousiastes et inventives est incontestablement dans l'ADN de la compagnie L'Éternel Été, l'engagement citoyen fait aussi partie de la démarche créative de ses membres. La présente proposition ne déroge pas à la règle. Ainsi, Emmanuel Besnault et Benoît Gruel nous offrent une version décoiffante, vive, presque juvénile, mais diablement ancrée dans les problématiques actuelles, du "Chapeau de paille d'Italie"… pièce d'Eugène Labiche, véritable référence du vaudeville.

© Philippe Hanula.
L'argument, simple, n'en reste pas moins source de quiproquos, de riantes ficelles propres à la comédie et d'une bonne dose de situations grotesques, burlesques, voire absurdes. À l'aube d'un mariage des plus prometteurs avec la très florale Hélène – née sans doute dans les roses… ornant les pépinières parentales –, le fringant Fadinard se lance dans une quête effrénée pour récupérer un chapeau de paille d'Italie… Pour remplacer celui croqué – en guise de petit-déj ! – par un membre de la gent équestre, moteur exclusif de son hippomobile, ci-devant fiacre. À noter que le chapeau alimentaire appartenait à une belle – porteuse d'une alliance – en rendez-vous coupable avec un soldat, sans doute Apollon à ses heures perdues.

N'ayant pas vocation à pérenniser toute forme d'adaptation académique, nos deux metteurs en scène vont imaginer que cette histoire absurde est un songe, le songe d'une nuit… niché au creux du voyage ensommeillé de l'aimable Fadinard. Accrochez-vous à votre oreiller ! La pièce la plus célèbre de Labiche se transforme en une nouvelle comédie explosive, électro-onirique ! Comme un rêve habité de nounours dans un sommeil moelleux peuplé d'êtres extravagants en doudounes orange.

Gil Chauveau
26/03/2024