La Revue du Spectacle, le magazine des arts de la scène et du spectacle vivant. Infos théâtre, chanson, café-théâtre, cirque, arts de la rue, agenda, CD, etc.
Théâtre

"Écho" L'écho-système d'un jeune homme éploré… - 29/10/2022

Si, dans "Les Souffrances du jeune Werther", le héros de Goethe avait recours au suicide pour exorciser le chagrin de ne pouvoir s'approprier l'objet de son désir, Vanasay Khamphommala, artiste compagnonne du TnBA, convoque la nymphe Écho et ses dérivés pour se libérer d'un réel chagrin d'amour. Conçue comme une performance intimiste ouvrant sur une expérience universelle, l'œuvre "transgenre"...  

"Huis clos" Sommes-nous acteurs de notre destin ou de simples marionnettes ? - 24/10/2022

Garcin, Inès et Estelle, un homme et deux femmes, se retrouvent enfermé(es) dans un salon où la lumière ne s'éteint pas et duquel il est impossible de sortir. Ils comprennent qu'ils se trouvent en Enfer et se racontent leurs histoires. Ainsi se noueront entre eux des relations complexes qui ne se révèleront pas toujours réciproques. Est-ce bien raisonnable de retourner assister à une énième...  

""Alzheimère et fils"" Tenter de saisir l'insaisissable, entre interprétation comique et émotion tragique - 22/10/2022

Sujet ô combien délicat à aborder tant il est générateur de souffrances et de détresse affective au sein des familles, la maladie d’Alzheimer peut prendre une dimension "acceptable" au théâtre. Entre la tragédie réelle - ici vécue par les frères Jenny - et une approche humoristique, voire burlesque, la mise au plateau du mal irréversible permet d’en aborder certains aspects qui se révèlent être...  

"Bérénice" Renoncer à l'amour n'est-il pas parfois nécessaire à vivre et à vaincre ? - 19/10/2022

Titus, empereur de Rome, et Bérénice, Reine de Palestine, s'aiment. Ils décident incessamment de se marier pour concrétiser leur amour. Mais Rome ne voit pas cette initiative d'un très bon œil, cette dernière n'acceptant, sous couvert de la loi, aucun sang étranger… Titus se retrouve devant un choix déchirant : son empire ou l'amour. En secret, un autre personnage et ami fidèle de Titus, est...  

"Ingolstadt" d'après Marieluise Fleisser… Une chambre d'expérimentation des gens infernaux - 18/10/2022

La mise en scène signée Ivo van Hove, d'après le diptyque "Ingolstadt" de Marieluise Fleisser, prend "L'enfer, c'est les autres" au pied de la lettre. Le village est un laboratoire dans lequel on expérimente l'abîme humain chez les "petites gens". Jan Bülow (Roelle), en tête de la distribution, livre une performance exceptionnelle. Marieluise Fleisser est louée pour son théâtre des "petites gens"...  

Les modèles des artistes sont-elles vraiment des modèles de vie ? À en croire ces "Muses", non, et tant mieux ! - 18/10/2022

La racine étymologique de musée est "temple des Muses", du nom de ces neuf déesses qui président aux arts. Ici, elles ne sont que quatre (mais neuf en alternance, tiens ? Hasard…) et l'histoire qu'elles incarnent se déroule effectivement dans un musée après la fermeture, dans la torpeur de la nuit. Dans ce spectacle très vivant, incarner est le verbe idéal pour définir ces créations de...  

"Salle des Fêtes" Des territoires aux terroirs, Baptiste Amann arpente la nature humaine - 17/10/2022

Après le choc de sa trilogie "Des Territoires", dont les trois volets furent présentés en un seul bloc de sept heures à Avignon lors du Festival In de 2021, le metteur en scène se tourne vers un autre habitat. Abandonnant le pavillon de banlieue où vivait la fratrie de ses créations précédentes, il dirige sa recherche d'humanités dans une salle des fêtes, lieu protéiforme où se retrouvent les...  

"Une demande en mariage" Rendre hilarantes les choses de la vie amoureuse, le pari réussi de la Cie Takéo - 16/10/2022

À 35 ans, Lomov, petit propriétaire terrien timide et hypocondriaque, est toujours célibataire. Bien décidé à ne plus le rester et à ne pas finir sa vie seul, il se décide à faire sa demande à Tchouboukova pour épouser sa fille Natalia. Malgré l'accord de la mère, la discussion dérape entre les deux jeunes gens lorsqu'il est question des fameux Petits Prés aux Bœufs : une terre que chacun...  

"Sonate" ou comment un botaniste sauva toute l'œuvre de Mozart - 14/10/2022

Seule en scène ? Camille de Leobardy ne l'est pourtant pas vraiment dans "Sonate". Il y a d'abord un joli piano demi-queue qu'elle fera chanter sous ses doigts tout au long du concert en interprétant différentes compositions de Mozart. Une musique qui est, elle aussi, acteur implicite du spectacle puisqu'il y est essentiellement question d'elle. Et puis il y a les personnages qui la traversent,...  

"Détache-toi !" Quand les relations avec l'Autre masculin et soi-même brillent d'une vérité éclatante - 12/10/2022

Hélène et Lucie, parvenues à la belle cinquantaine, font le point sur leurs vies sentimentales respectives. Elles explorent ensemble avec humour leurs rapports aux hommes, le mari, l'amant, l'autre… générateurs de doutes, de manques, mais aussi de désirs et d'espoirs. En quête de bonheur, ce joyeux tandem, à moins que l'une soit la part solaire de l'autre ou peut-être sa conscience, cherche tous...  
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À Découvrir

•Off 2024• "Mon Petit Grand Frère" Récit salvateur d'un enfant traumatisé au bénéfice du devenir apaisé de l'adulte qu'il est devenu

Comment dire l'indicible, comment formuler les vagues souvenirs, les incertaines sensations qui furent captés, partiellement mémorisés à la petite enfance. Accoucher de cette résurgence voilée, diffuse, d'un drame familial ayant eu lieu à l'âge de deux ans est le parcours théâtral, étonnamment réussie, que nous offre Miguel-Ange Sarmiento avec "Mon petit grand frère". Ce qui aurait pu paraître une psychanalyse impudique devient alors une parole salvatrice porteuse d'un écho libératoire pour nos propres histoires douloureuses.

© Ève Pinel.
9 mars 1971, un petit bonhomme, dans les premiers pas de sa vie, goûte aux derniers instants du ravissement juvénile de voir sa maman souriante, heureuse. Mais, dans peu de temps, la fenêtre du bonheur va se refermer. Le drame n'est pas loin et le bonheur fait ses valises. À ce moment-là, personne ne le sait encore, mais les affres du destin se sont mis en marche, et plus rien ne sera comme avant.

En préambule du malheur à venir, le texte, traversant en permanence le pont entre narration réaliste et phrasé poétique, nous conduit à la découverte du quotidien plein de joie et de tendresse du pitchoun qu'est Miguel-Ange. Jeux d'enfants faits de marelle, de dinette, de billes, et de couchers sur la musique de Nounours et de "bonne nuit les petits". L'enfant est affectueux. "Je suis un garçon raisonnable. Je fais attention à ma maman. Je suis un bon garçon." Le bonheur est simple, mais joyeux et empli de tendresse.

Puis, entre dans la narration la disparition du grand frère de trois ans son aîné. La mort n'ayant, on le sait, aucune morale et aucun scrupule à commettre ses actes, antinaturelles lorsqu'il s'agit d'ôter la vie à un bambin. L'accident est acté et deux gamins dans le bassin sont décédés, ceux-ci n'ayant pu être ramenés à la vie. Là, se révèle l'avant et l'après. Le bonheur s'est enfui et rien ne sera plus comme avant.

Gil Chauveau
14/06/2024
Spectacle à la Une

•Off 2024• Lou Casa "Barbara & Brel" À nouveau un souffle singulier et virtuose passe sur l'œuvre de Barbara et de Brel

Ils sont peu nombreux ceux qui ont une réelle vision d'interprétation d'œuvres d'artistes "monuments" tels Brel, Barbara, Brassens, Piaf et bien d'autres. Lou Casa fait partie de ces rares virtuoses qui arrivent à imprimer leur signature sans effacer le filigrane du monstre sacré interprété. Après une relecture lumineuse en 2016 de quelques chansons de Barbara, voici le profond et solaire "Barbara & Brel".

© Betül Balkan.
Comme dans son précédent opus "À ce jour" (consacré à Barbara), Marc Casa est habité par ses choix, donnant un souffle original et unique à chaque titre choisi. Évitant musicalement l'écueil des orchestrations "datées" en optant systématiquement pour des sonorités contemporaines, chaque chanson est synonyme d'une grande richesse et variété instrumentales. Le timbre de la voix est prenant et fait montre à chaque fois d'une émouvante et artistique sincérité.

On retrouve dans cet album une réelle intensité pour chaque interprétation, une profondeur dans la tessiture, dans les tonalités exprimées dont on sent qu'elles puisent tant dans l'âme créatrice des illustres auteurs que dans les recoins intimes, les chemins de vie personnelle de Marc Casa, pour y mettre, dans une manière discrète et maîtrisée, emplie de sincérité, un peu de sa propre histoire.

"Nous mettons en écho des chansons de Barbara et Brel qui ont abordé les mêmes thèmes mais de manières différentes. L'idée est juste d'utiliser leur matière, leur art, tout en gardant une distance, en s'affranchissant de ce qu'ils sont, de ce qu'ils représentent aujourd'hui dans la culture populaire, dans la culture en général… qui est énorme !"

Gil Chauveau
19/06/2024
Spectacle à la Une

•Off 2024• "Un Chapeau de paille d'Italie" Une version singulière et explosive interrogeant nos libertés individuelles…

… face aux normalisations sociétales et idéologiques

Si l'art de générer des productions enthousiastes et inventives est incontestablement dans l'ADN de la compagnie L'Éternel Été, l'engagement citoyen fait aussi partie de la démarche créative de ses membres. La présente proposition ne déroge pas à la règle. Ainsi, Emmanuel Besnault et Benoît Gruel nous offrent une version décoiffante, vive, presque juvénile, mais diablement ancrée dans les problématiques actuelles, du "Chapeau de paille d'Italie"… pièce d'Eugène Labiche, véritable référence du vaudeville.

© Philippe Hanula.
L'argument, simple, n'en reste pas moins source de quiproquos, de riantes ficelles propres à la comédie et d'une bonne dose de situations grotesques, burlesques, voire absurdes. À l'aube d'un mariage des plus prometteurs avec la très florale Hélène – née sans doute dans les roses… ornant les pépinières parentales –, le fringant Fadinard se lance dans une quête effrénée pour récupérer un chapeau de paille d'Italie… Pour remplacer celui croqué – en guise de petit-déj ! – par un membre de la gent équestre, moteur exclusif de son hippomobile, ci-devant fiacre. À noter que le chapeau alimentaire appartenait à une belle – porteuse d'une alliance – en rendez-vous coupable avec un soldat, sans doute Apollon à ses heures perdues.

N'ayant pas vocation à pérenniser toute forme d'adaptation académique, nos deux metteurs en scène vont imaginer que cette histoire absurde est un songe, le songe d'une nuit… niché au creux du voyage ensommeillé de l'aimable Fadinard. Accrochez-vous à votre oreiller ! La pièce la plus célèbre de Labiche se transforme en une nouvelle comédie explosive, électro-onirique ! Comme un rêve habité de nounours dans un sommeil moelleux peuplé d'êtres extravagants en doudounes orange.

Gil Chauveau
26/03/2024