"Il était une fois une tiot picarde qui voulait travailler dans la "culture" comme sa grand-mère paysanne, mais pas dans un champ de patates, non, plutôt sur un plateau de théâtre. Bottes aux pieds, elle file à la Capitale (…), et de main terreuse, main trayeuse, elle devient main conteuse, main signante, main autrice, main cherchant l'horizon parmi les hautes tours des immeubles citadins.
(…) Mais, assez vite, les bottes s'usent et les talons hauts des escarpins claquent trop bruyamment sur le bitume parisien ; elles veulent rebrousser chemin, retourner dans le pays de l'enfance, pour faire du théâtre pour ceux d'là-bas, ceux d'chez moi (…).
Alors la Compagnie Le Compost voit le jour ainsi que le spectacle "La Trouée - Road-Trip rural".
Ces paroles sont celles de Cécile Morelle, comédienne et petite fille d'agricultrice en Picardie qui, de toute évidence, n'a pas supporté le vacarme citadin et lui a préféré les silences de la campagne et, d'une certaine manière, celui des femmes qui y vivent, mais qu'elle trouvera le moyen de faire parler. Toutes ces femmes qui travaillent bien souvent à la ferme dans l'ombre de leurs maris, des "secondes" en fait, des petites mains parallèles, mais toujours là pourtant…
(…) Mais, assez vite, les bottes s'usent et les talons hauts des escarpins claquent trop bruyamment sur le bitume parisien ; elles veulent rebrousser chemin, retourner dans le pays de l'enfance, pour faire du théâtre pour ceux d'là-bas, ceux d'chez moi (…).
Alors la Compagnie Le Compost voit le jour ainsi que le spectacle "La Trouée - Road-Trip rural".
Ces paroles sont celles de Cécile Morelle, comédienne et petite fille d'agricultrice en Picardie qui, de toute évidence, n'a pas supporté le vacarme citadin et lui a préféré les silences de la campagne et, d'une certaine manière, celui des femmes qui y vivent, mais qu'elle trouvera le moyen de faire parler. Toutes ces femmes qui travaillent bien souvent à la ferme dans l'ombre de leurs maris, des "secondes" en fait, des petites mains parallèles, mais toujours là pourtant…
Le parcours de Cécile Morelle, déjà bien rempli, s'est partagé entre sa participation à "Morbid" de Paravidini en 2010, son statut d'élève comédienne à la Comédie-Française en 2011-2012 où elle côtoie Catherine Hiegel, Jérôme Deschamps, Éric Ruf ou encore Anne Kessler, son assistanat aux côtés de Chloé Duong pour le spectacle "Peau d'âne, la chasse à la Loge", ou encore une formation de masques en bois auprès d'Étienne Champion et du jeu masqué avec Christophe Patty.
Sans omettre son jeu régulier dans plusieurs spectacles, un diplôme de l'École de clown "Le Samovar" à Bagnolet, et un titre de professeure de Théâtre.
Il va sans dire qu'à un moment, Cécile Morelle a ressenti le besoin de retrouver ses racines paysannes, et, peut-être, de peaufiner différemment son statut de femme, sa sphère féminine, pour découvrir qui elle est véritablement.
Qui d'entre nous n'a pas cherché à savoir exactement d'où nous venons ? Quelles sont nos racines ? Nos origines ? Celles et ceux qui s'interrogent à ce titre, celles et ceux qui chaussent leurs bottes aussi, ou à l'inverse leurs escarpins ou leurs "Derby", ou empruntent encore d'autres voies alternatives, tentent toujours de trouver une réponse.
Parce qu'il s'agit là d'une question essentiellement existentielle. Cécile Morelle fait partie de ces gens-là qui pensent que le rapport à nos racines joue un rôle majeur dans le fondement de notre identité.
Pour ce faire, elle a sillonné le territoire picard pour récolter une quarantaine de témoignages divers dont, en premier, celui de sa grand-mère, Mado : "Je ne suis pas agricultrice. Pour la société, je ne suis rien. Je ne suis même pas considérée comme une mère au foyer. Je suis femme de paysan."
Comme Madeleine, bon nombre de ces femmes étaient dépourvues de statut et étaient juste, en effet, femmes d'agriculteurs ! Qu'en est-il aujourd'hui ? Les choses pour elles ont-elles progressé ?
Avant même le début du spectacle – à moins que, bien entendu, ce dernier ne soit commencé… –, munie d'une longue perche micro, la comédienne arpente la salle et interroge certains spectateurs et certaines spectatrices sur leurs origines, leurs souvenirs qui y sont liés, des odeurs, ou encore des sons qui leur restent en mémoire.
D'emblée, le "naturel" de la comédienne, associé à l'ingénuité de la chose, plonge immédiatement le public dans un propos dont l'authenticité transparaît. Certaines réponses émeuvent ou font sourire. En tout cas, chacun et chacune se sent concerné(e). Ce fut incontestablement notre cas et, à notre tour, des images surgissent et nous émeuvent aussi : celle de la mécanique bruyante de la traite des vaches, du papier à mouches dans la cuisine, de l'odeur du café et du fumier qui, même rentrés à la ville, était toujours présente… La boue sur les chaussures, et puis surtout, la terre.
Sans omettre son jeu régulier dans plusieurs spectacles, un diplôme de l'École de clown "Le Samovar" à Bagnolet, et un titre de professeure de Théâtre.
Il va sans dire qu'à un moment, Cécile Morelle a ressenti le besoin de retrouver ses racines paysannes, et, peut-être, de peaufiner différemment son statut de femme, sa sphère féminine, pour découvrir qui elle est véritablement.
Qui d'entre nous n'a pas cherché à savoir exactement d'où nous venons ? Quelles sont nos racines ? Nos origines ? Celles et ceux qui s'interrogent à ce titre, celles et ceux qui chaussent leurs bottes aussi, ou à l'inverse leurs escarpins ou leurs "Derby", ou empruntent encore d'autres voies alternatives, tentent toujours de trouver une réponse.
Parce qu'il s'agit là d'une question essentiellement existentielle. Cécile Morelle fait partie de ces gens-là qui pensent que le rapport à nos racines joue un rôle majeur dans le fondement de notre identité.
Pour ce faire, elle a sillonné le territoire picard pour récolter une quarantaine de témoignages divers dont, en premier, celui de sa grand-mère, Mado : "Je ne suis pas agricultrice. Pour la société, je ne suis rien. Je ne suis même pas considérée comme une mère au foyer. Je suis femme de paysan."
Comme Madeleine, bon nombre de ces femmes étaient dépourvues de statut et étaient juste, en effet, femmes d'agriculteurs ! Qu'en est-il aujourd'hui ? Les choses pour elles ont-elles progressé ?
Avant même le début du spectacle – à moins que, bien entendu, ce dernier ne soit commencé… –, munie d'une longue perche micro, la comédienne arpente la salle et interroge certains spectateurs et certaines spectatrices sur leurs origines, leurs souvenirs qui y sont liés, des odeurs, ou encore des sons qui leur restent en mémoire.
D'emblée, le "naturel" de la comédienne, associé à l'ingénuité de la chose, plonge immédiatement le public dans un propos dont l'authenticité transparaît. Certaines réponses émeuvent ou font sourire. En tout cas, chacun et chacune se sent concerné(e). Ce fut incontestablement notre cas et, à notre tour, des images surgissent et nous émeuvent aussi : celle de la mécanique bruyante de la traite des vaches, du papier à mouches dans la cuisine, de l'odeur du café et du fumier qui, même rentrés à la ville, était toujours présente… La boue sur les chaussures, et puis surtout, la terre.
La terre, présente sur le plateau, sous forme d'une motte imposante, brune et comme sensuelle, dans laquelle la comédienne plonge littéralement son corps, l'embrasse, à sa manière, ou, encore, la jette violemment sur un grand panneau blanc, et en fait surgir des mots simples et puissants à la fois. "Au commencement, il y a les routes, et au bout des routes, il y a les grandes fermes", Raymond Depardon.
Puis, dans le reste du spectacle, la comédienne s'empare avec une dextérité remarquable du plateau, sur lequel la scénographie d'Albert Morelle, d'une originalité hyper-réaliste à l'Edgar Hopper, emporte le public. La mise en scène oscille, grâce à des trouvailles exceptionnelles, entre grande poésie et autres moments plus engagés et revendicateurs.
Mais rien d'ostentatoire dans ce brillant road-trip, l'écueil du tragique eût pourtant été possible. Rien ne relève du registre de la colère affichée, non plus, dans cette carte postale hautement émouvante. Tout est finement évoqué, et apporté à nos oreilles attentives avec intelligence, poésie brillamment interprétée par Cécile Morelle.
Un très beau moment d'inventivité dramaturgique est à relever particulièrement : celui où, dos au public, la comédienne baisse délicatement son tee-shirt et son body, dans une sorte de mise à nu tangible, et où des vidéos créatives sont projetées à même la plaine charnelle de son dos qu'elle nous offre pudiquement.
Les multiples talents de la comédienne, pour celles et ceux qui pratiquent, un tant soit peu, l'art de la comédie, relèvent d'une performance, à nos yeux, rarement égalée, comme l'imitation de Pépé ou celle de Natacha Négliani !
"La Trouée, Road-Trip rural", c'est une seule en scène, certes, mais c'est du théâtre vrai, charnel et comme organique à certains moments.
"Les plaines sont gorgées de plein qu'on ignore !"
À la fin du spectacle, debout sur cette motte de terre, à bien y regarder "universelle", Cécile Morelle se jette corps et âme dans une logorrhée de "paroles-images" dont on se demande si elle s'arrêtera à un moment ! Quelque chose de presque hypnotique émerge d'elle. Un besoin de dire.
Elle dit, et nous, nous l'entendons à sa juste valeur. Une réelle performance de comédienne.
Ce plein de choses à dire sur nos racines, nous l'avons toutes et tous en nous. Il y a celles et ceux qui ont le talent de pouvoir les partager… Qui ont appris à le faire. Pour les autres, conservez-les en vous, brossez-les dans le sens de leurs poils, parce que ce sont elles qui nous font tenir debout, et garder la tête haute.
◙ Brigitte Corrigou
Puis, dans le reste du spectacle, la comédienne s'empare avec une dextérité remarquable du plateau, sur lequel la scénographie d'Albert Morelle, d'une originalité hyper-réaliste à l'Edgar Hopper, emporte le public. La mise en scène oscille, grâce à des trouvailles exceptionnelles, entre grande poésie et autres moments plus engagés et revendicateurs.
Mais rien d'ostentatoire dans ce brillant road-trip, l'écueil du tragique eût pourtant été possible. Rien ne relève du registre de la colère affichée, non plus, dans cette carte postale hautement émouvante. Tout est finement évoqué, et apporté à nos oreilles attentives avec intelligence, poésie brillamment interprétée par Cécile Morelle.
Un très beau moment d'inventivité dramaturgique est à relever particulièrement : celui où, dos au public, la comédienne baisse délicatement son tee-shirt et son body, dans une sorte de mise à nu tangible, et où des vidéos créatives sont projetées à même la plaine charnelle de son dos qu'elle nous offre pudiquement.
Les multiples talents de la comédienne, pour celles et ceux qui pratiquent, un tant soit peu, l'art de la comédie, relèvent d'une performance, à nos yeux, rarement égalée, comme l'imitation de Pépé ou celle de Natacha Négliani !
"La Trouée, Road-Trip rural", c'est une seule en scène, certes, mais c'est du théâtre vrai, charnel et comme organique à certains moments.
"Les plaines sont gorgées de plein qu'on ignore !"
À la fin du spectacle, debout sur cette motte de terre, à bien y regarder "universelle", Cécile Morelle se jette corps et âme dans une logorrhée de "paroles-images" dont on se demande si elle s'arrêtera à un moment ! Quelque chose de presque hypnotique émerge d'elle. Un besoin de dire.
Elle dit, et nous, nous l'entendons à sa juste valeur. Une réelle performance de comédienne.
Ce plein de choses à dire sur nos racines, nous l'avons toutes et tous en nous. Il y a celles et ceux qui ont le talent de pouvoir les partager… Qui ont appris à le faire. Pour les autres, conservez-les en vous, brossez-les dans le sens de leurs poils, parce que ce sont elles qui nous font tenir debout, et garder la tête haute.
◙ Brigitte Corrigou
"La Trouée - road-trip rural"
Texte : Cécile Morelle.
Mise en scène : Cécile Morelle.
Avec : Cécile Morelle.
Collaboration dramaturgique et technique de collectage : Anne Marcel et Fred Billy.
Regard dramaturgique : Marie Vayssière, Chloé Duong, Zelda Bourquin et Anne-Christine Tinel.
Collaboration à la mise en scène : Chloé Duong et Édouard Peurichard.
Collaboration chorégraphique : Édouard Peurichard, Valérie Oberleithner et Marie- Pierre Pirson.
Création vidéo animée : Édouard Peurichard.
Création photographique : Lucile Corbeille.
Illustration : Philippine Brenac.
Conception scénographie : Albert Morelle.
Composition musicale : Arthur de Bary.
Régie son : Tristan Chaillou et Rémi Ghestin.
Création Lumière et régie : Leslie Sozansky et Luc Degassart.
Collaboration à la mise en rue : Christophe Châtelain.
Regards et conseils précieux : Paola Rizza, Alexandre Del Perugia, Annabelle Sergent, Olivier Tirmarche.
Compagnie Le Compost.
Durée : 1 h 25.
Spectacle vu le mercredi 11 décembre 2024 dans le cadre de la 16ᵉ édition du Festival Impatience 2024 ayant eu lieu au théâtre 13 à Paris.
Mise en scène : Cécile Morelle.
Avec : Cécile Morelle.
Collaboration dramaturgique et technique de collectage : Anne Marcel et Fred Billy.
Regard dramaturgique : Marie Vayssière, Chloé Duong, Zelda Bourquin et Anne-Christine Tinel.
Collaboration à la mise en scène : Chloé Duong et Édouard Peurichard.
Collaboration chorégraphique : Édouard Peurichard, Valérie Oberleithner et Marie- Pierre Pirson.
Création vidéo animée : Édouard Peurichard.
Création photographique : Lucile Corbeille.
Illustration : Philippine Brenac.
Conception scénographie : Albert Morelle.
Composition musicale : Arthur de Bary.
Régie son : Tristan Chaillou et Rémi Ghestin.
Création Lumière et régie : Leslie Sozansky et Luc Degassart.
Collaboration à la mise en rue : Christophe Châtelain.
Regards et conseils précieux : Paola Rizza, Alexandre Del Perugia, Annabelle Sergent, Olivier Tirmarche.
Compagnie Le Compost.
Durée : 1 h 25.
Spectacle vu le mercredi 11 décembre 2024 dans le cadre de la 16ᵉ édition du Festival Impatience 2024 ayant eu lieu au théâtre 13 à Paris.
Tournée
4 février 2025 : Ville de Méru (60).
8 février 2025 : Théâtre de la Genette Verte, Florac (48).
11 février 2025 : Théâtre, Cusset (03).
6 mars 2025 : MLC, Gauchy (02).
8 mars 2025 : CC des 7 Vallées, Hesdin (62).
Du 24 au 29 mars 2025 : L'Ernée (53).
1ᵉʳ et 2 avril 2025 : Théâtre le Rayon Vert, Saint-Valéry-en-Caux (76).
13 mai 2025 : Théâtre le Strapontin (version rue), Pont Scorff (56).
15 mai : CC du Mont-Saint-Michel, Avranches (50).
23 et 24 mai 2024 Le Safran (en itinérance sur le territoire), Amiens (80).
Du 20 au 25 août 2025 : Festival des arts de la rue (version rue), Aurillac (15).
4 février 2025 : Ville de Méru (60).
8 février 2025 : Théâtre de la Genette Verte, Florac (48).
11 février 2025 : Théâtre, Cusset (03).
6 mars 2025 : MLC, Gauchy (02).
8 mars 2025 : CC des 7 Vallées, Hesdin (62).
Du 24 au 29 mars 2025 : L'Ernée (53).
1ᵉʳ et 2 avril 2025 : Théâtre le Rayon Vert, Saint-Valéry-en-Caux (76).
13 mai 2025 : Théâtre le Strapontin (version rue), Pont Scorff (56).
15 mai : CC du Mont-Saint-Michel, Avranches (50).
23 et 24 mai 2024 Le Safran (en itinérance sur le territoire), Amiens (80).
Du 20 au 25 août 2025 : Festival des arts de la rue (version rue), Aurillac (15).