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Théâtre

"La Solitude des mues", un voyage dans les fanstamagories et les enfouissements de l'adolescence

C'est à l'adolescence, cet âge clef où se télescopent mal-être, recherche de soi-même, recherche de l'autre et fantasmes en tous genres, que "La Solitude des mues" s'intéresse. Un père isolé suite au décès de sa femme, une fille unique et son amie forment le trio central de l'histoire. Les deux filles font partie de la mode kawai qui consiste à faire perdurer le monde naïf de l'enfance via une forme de pop-culture japonaise. Pour ce faire, elles se déguisent en poupée rose, attiffées de cheveux colorés, de maquillages flashys, vêtues de robes froufroutantes et elles diffusent sur les réseaux des clips musicaux en japonais.



© Luc Battiston.
© Luc Battiston.
Fascination pour le factice et le superficiel, elles ont même abandonné leur prénom de naissance pour les sobriquets de Kiki et Pastèque. Les likes, les vues et les commentaires sont leurs seules interactions avec le monde extérieur. Elles sont des sortes de jumelles, dont l'une sert de miroir et de validation à l'autre. Elles ont construit ainsi un monde qu'elles partagent avec quelques internautes. Le réel, par contre, est une sorte de présence difficilement supportable.

Le père fait partie de ce réel sans rêve. Pris dans des soucis matériels constants, ennuis financiers, difficulté à finir leur maison préfabriquée, il a abandonné l'ambition d'avoir une vie personnelle depuis la disparition de sa femme. Dévolu à s'occuper de sa fille, il pratique pourtant un drôle de rite : il se plonge dans des masses de feuilles mortes et s'y adonne à des embrassades sensuelles.

Lors d'une de ces immersions, il rencontre un animal blessé. Il le soigne, le nourrit et le retrouve régulièrement par la suite. Mais est-ce vraiment un animal ou une apparition fictionnelle née de son subconscient comme conçu par un manque affectif abyssal ?

© Luc Battiston.
© Luc Battiston.
Toute la pièce, écrite à deux mains par Naéma Boudoumi (qui signe la mise en scène) et Arnaud Dupont (qui interprète le père) regorge de symbolismes. Il s'agit de mettre en mots, en images et en chorégraphies ces ruptures que les vies traversent lorsqu'un grand bouleversement survient. Vie, mort et mysticismes entrent alors en collision. L'adolescente Kiki passe d'un espoir de vivre sous le masque d'une poupée pop-culture à une crise qui l'enferme et la pousse vers ses parts d'ombre sous l'influence d'un mystérieux correspondant japonais. Elle manque de peu céder au désir de se suicider.

Le spectacle mise presque toutes ses forces sur la puissance du visuel. Danses, captations diffusées en direct, vidéos, bande-son fouillées et prenantes occupent quasiment tout l'espace narratif. Les dialogues se contentent de retranscrire la vie ordinaire. Comme s'il y avait en permanence un monde apparent banal et un monde symbolique puissant, doublé d'un monde virtuel via les écrans qui envahissent.

Des écrans qui envahissent également le plateau au point que leurs mises en place cassent le rythme narratif et tend à alanguir trop le spectacle qui, dans l'ensemble, reste en surface des thèmes déployés pour privilégier des changements scénographiques longs et ennuyeux plutôt que le jeu d'acteur.

"La Solitude des mues"

© Luc Battiston.
© Luc Battiston.
Texte : Naéma Boudoumi et Arnaud Dupont.
Mise en scène : Naéma Boudoumi.
Avec : Shannen Athiaro-Vidal, Élise Bjerkelund Reine, Naéma Boudoumi, Arnaud Dupont, Clara Paute, Victor Calcine et, à l'image, Lucas Garzo.
Mouvement chorégraphique : Anna Rodriguez.
Création costumes : Sarah Topalian.
Scénographie : Delphine Ciavaldini.
Création vidéo : Luc Battiston.
Création lumière : Charlotte Gaudelus.
Création sonore : Thomas Barlatier.
Production Cie Ginko.
À partir de 14 ans.
Durée : 1 h 20.

Du 13 janvier au 11 février 2024.
Du mardi au samedi à 20 h 30, dimanche 16 h 30.
Théâtre de la Tempête, Salle Copi, Cartoucherie de Vincennes, Paris 12e, 01 43 28 36 36.
>> la-tempete.fr

Bruno Fougniès
Jeudi 25 Janvier 2024

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•Off 2024• "Mon Petit Grand Frère" Récit salvateur d'un enfant traumatisé au bénéfice du devenir apaisé de l'adulte qu'il est devenu

Comment dire l'indicible, comment formuler les vagues souvenirs, les incertaines sensations qui furent captés, partiellement mémorisés à la petite enfance. Accoucher de cette résurgence voilée, diffuse, d'un drame familial ayant eu lieu à l'âge de deux ans est le parcours théâtral, étonnamment réussie, que nous offre Miguel-Ange Sarmiento avec "Mon petit grand frère". Ce qui aurait pu paraître une psychanalyse impudique devient alors une parole salvatrice porteuse d'un écho libératoire pour nos propres histoires douloureuses.

© Ève Pinel.
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Gil Chauveau
14/06/2024
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Ils sont peu nombreux ceux qui ont une réelle vision d'interprétation d'œuvres d'artistes "monuments" tels Brel, Barbara, Brassens, Piaf et bien d'autres. Lou Casa fait partie de ces rares virtuoses qui arrivent à imprimer leur signature sans effacer le filigrane du monstre sacré interprété. Après une relecture lumineuse en 2016 de quelques chansons de Barbara, voici le profond et solaire "Barbara & Brel".

© Betül Balkan.
Comme dans son précédent opus "À ce jour" (consacré à Barbara), Marc Casa est habité par ses choix, donnant un souffle original et unique à chaque titre choisi. Évitant musicalement l'écueil des orchestrations "datées" en optant systématiquement pour des sonorités contemporaines, chaque chanson est synonyme d'une grande richesse et variété instrumentales. Le timbre de la voix est prenant et fait montre à chaque fois d'une émouvante et artistique sincérité.

On retrouve dans cet album une réelle intensité pour chaque interprétation, une profondeur dans la tessiture, dans les tonalités exprimées dont on sent qu'elles puisent tant dans l'âme créatrice des illustres auteurs que dans les recoins intimes, les chemins de vie personnelle de Marc Casa, pour y mettre, dans une manière discrète et maîtrisée, emplie de sincérité, un peu de sa propre histoire.

"Nous mettons en écho des chansons de Barbara et Brel qui ont abordé les mêmes thèmes mais de manières différentes. L'idée est juste d'utiliser leur matière, leur art, tout en gardant une distance, en s'affranchissant de ce qu'ils sont, de ce qu'ils représentent aujourd'hui dans la culture populaire, dans la culture en général… qui est énorme !"

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© Philippe Hanula.
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Gil Chauveau
26/03/2024