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Avignon 2017

•Avignon Off 2017• "Un siècle"… Savoir interroger le passé afin de construire l'avenir et ouvrir les bras à ceux de demain

"Un siècle", Théâtre 11 Gilgamesh Belleville, Avignon

Si le XXe siècle m'était conté... mais de conte ici il n'est point car évoqué à travers trois vies réelles, nées de trois comédiens qui, de leurs souvenirs résurgents, font resurgir leurs histoires personnelles, vraies ou fausses, vécues ou imaginées, mais reconstruisant, dans une fiction aux accents du documentaire, la véritable grande histoire de ce siècle si récemment conjuguée au passé composé mais aussi parfois à l'imparfait !



© Nothammer.
© Nothammer.
47, 40, 36… comme des données chiffrées participant à la résolution d'une l'équation à trois inconnus, trois acteurs marqués "génération X"… Une femme trentenaire, deux hommes quarantenaires qui ont changé d'ère et qui disent le récit du XXe siècle.

Écrire ou réécrire ses souvenirs, importants ou futiles, en une forme d'inventaire à la Prévert, faits ou événements marquants ou insignifiants mais constructeurs de la femme ou de l'homme que nous sommes… De l'enfance à l'adolescence, puis à la fragile maturité de l'adulte…

Détricoter les fils de notre mémoire pour se rappeler de notre découverte au lycée du Manifeste du surréalisme d'André Breton, de nos émois face aux sculptures de l'Art romantique, des odeurs du potager ou de la maison de grand-père, de celles dans un train en Italie, ou de cette balade sur une plage en pensant à Pier Paolo Pasolini, de la folie des histoires inventées ou de la magie de celles suggérées, de la violence de l'actualité ou des réalités actées, fondatrices de la personnalité, comme le discours de Martin Luther King ou l'assassinat de JFK, en passant par l'Apartheid et la libération de Madiba, en écoutant "Asimbonanga" de Johnny Clegg.

© Nothammer.
© Nothammer.
Ces éphémérides de faits épars, rassemblés pour construire l'aventure humaine d'individus différents mais issus d'une même génération, entre la fin de la guerre froide (chute du mur de Berlin) et le début du web (initiant le nomadisme virtuel), ou la disparition des "Twin Towers", donnent aussi la compréhension de l'Histoire avec un grand H quand elle prend la place de nos histoires personnelles.

Éclairer à la lumière d'anecdotes joyeuses ou tragiques puisées dans la vie des trois comédiens, augmentées de documents sonores et cinématographiques, jalonnés de repères illustrés par des chansons pop - et populaires (Jerry Lee Lewis, Rolling Stones, Sparks, Louise Attaque, Carlos, Adjani, Eddy Mitchell, etc.) -, le portrait d'un siècle et de ses enfants, c'est le voyage temporel que propose, dans une construction musicale et visuelle, aux effets simples mais efficaces, digne des arts de la rue, Bertrand Sinapi.

L'auteur, dans ce grand puzzle planétaire en perpétuelle reconstitution, pose la question de l'espace que prend la vie d'un être dans l'immense bric-à-brac centenaire de notre monde… Celui-ci y a-t-il encore sa place ?

Alors, encore une fois, dire oui…
Et le changer ce "monde", grain après grain, goutte après goutte, espérance après espérance, en se trompant, en tombant, en se relevant, en courant… les bras ouverts à ceux de demain…

"Un siècle"

© Nothammer.
© Nothammer.
À partir de 10 ans.
Texte : Bertrand Sinapi.
Mise en scène : Bertrand Sinapi.
Avec : Augustin Bécard, Valéry Plancke et Amandine Truffy.
Dramaturgie : Emmanuel Breton et Amandine Truffy.
Musique live : Frédéric Fresson.
Scénographie : Goury.
Création lumière : Vincent Urbani et Jean-François Metten.
Construction décor et accessoire : David Salvatore.
Production Compagnie Pardès rimonim.
Durée : 1 h 15.

© Nothammer.
© Nothammer.
•Avignon Off 2017•
Du 6 au 28 juillet 2017.
Tous les jours à 16 h 50 (relâche le mardi).
Théâtre 11 Gilgamesh Belleville, Salle 2,
11, boulevard Raspail, Avignon.
Réservations : 04 90 89 82 63.
>> 11avignon.com

Gil Chauveau
Mercredi 19 Juillet 2017

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•Off 2024• "Mon Petit Grand Frère" Récit salvateur d'un enfant traumatisé au bénéfice du devenir apaisé de l'adulte qu'il est devenu

Comment dire l'indicible, comment formuler les vagues souvenirs, les incertaines sensations qui furent captés, partiellement mémorisés à la petite enfance. Accoucher de cette résurgence voilée, diffuse, d'un drame familial ayant eu lieu à l'âge de deux ans est le parcours théâtral, étonnamment réussie, que nous offre Miguel-Ange Sarmiento avec "Mon petit grand frère". Ce qui aurait pu paraître une psychanalyse impudique devient alors une parole salvatrice porteuse d'un écho libératoire pour nos propres histoires douloureuses.

© Ève Pinel.
9 mars 1971, un petit bonhomme, dans les premiers pas de sa vie, goûte aux derniers instants du ravissement juvénile de voir sa maman souriante, heureuse. Mais, dans peu de temps, la fenêtre du bonheur va se refermer. Le drame n'est pas loin et le bonheur fait ses valises. À ce moment-là, personne ne le sait encore, mais les affres du destin se sont mis en marche, et plus rien ne sera comme avant.

En préambule du malheur à venir, le texte, traversant en permanence le pont entre narration réaliste et phrasé poétique, nous conduit à la découverte du quotidien plein de joie et de tendresse du pitchoun qu'est Miguel-Ange. Jeux d'enfants faits de marelle, de dinette, de billes, et de couchers sur la musique de Nounours et de "bonne nuit les petits". L'enfant est affectueux. "Je suis un garçon raisonnable. Je fais attention à ma maman. Je suis un bon garçon." Le bonheur est simple, mais joyeux et empli de tendresse.

Puis, entre dans la narration la disparition du grand frère de trois ans son aîné. La mort n'ayant, on le sait, aucune morale et aucun scrupule à commettre ses actes, antinaturelles lorsqu'il s'agit d'ôter la vie à un bambin. L'accident est acté et deux gamins dans le bassin sont décédés, ceux-ci n'ayant pu être ramenés à la vie. Là, se révèle l'avant et l'après. Le bonheur s'est enfui et rien ne sera plus comme avant.

Gil Chauveau
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Ils sont peu nombreux ceux qui ont une réelle vision d'interprétation d'œuvres d'artistes "monuments" tels Brel, Barbara, Brassens, Piaf et bien d'autres. Lou Casa fait partie de ces rares virtuoses qui arrivent à imprimer leur signature sans effacer le filigrane du monstre sacré interprété. Après une relecture lumineuse en 2016 de quelques chansons de Barbara, voici le profond et solaire "Barbara & Brel".

© Betül Balkan.
Comme dans son précédent opus "À ce jour" (consacré à Barbara), Marc Casa est habité par ses choix, donnant un souffle original et unique à chaque titre choisi. Évitant musicalement l'écueil des orchestrations "datées" en optant systématiquement pour des sonorités contemporaines, chaque chanson est synonyme d'une grande richesse et variété instrumentales. Le timbre de la voix est prenant et fait montre à chaque fois d'une émouvante et artistique sincérité.

On retrouve dans cet album une réelle intensité pour chaque interprétation, une profondeur dans la tessiture, dans les tonalités exprimées dont on sent qu'elles puisent tant dans l'âme créatrice des illustres auteurs que dans les recoins intimes, les chemins de vie personnelle de Marc Casa, pour y mettre, dans une manière discrète et maîtrisée, emplie de sincérité, un peu de sa propre histoire.

"Nous mettons en écho des chansons de Barbara et Brel qui ont abordé les mêmes thèmes mais de manières différentes. L'idée est juste d'utiliser leur matière, leur art, tout en gardant une distance, en s'affranchissant de ce qu'ils sont, de ce qu'ils représentent aujourd'hui dans la culture populaire, dans la culture en général… qui est énorme !"

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… face aux normalisations sociétales et idéologiques

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© Philippe Hanula.
L'argument, simple, n'en reste pas moins source de quiproquos, de riantes ficelles propres à la comédie et d'une bonne dose de situations grotesques, burlesques, voire absurdes. À l'aube d'un mariage des plus prometteurs avec la très florale Hélène – née sans doute dans les roses… ornant les pépinières parentales –, le fringant Fadinard se lance dans une quête effrénée pour récupérer un chapeau de paille d'Italie… Pour remplacer celui croqué – en guise de petit-déj ! – par un membre de la gent équestre, moteur exclusif de son hippomobile, ci-devant fiacre. À noter que le chapeau alimentaire appartenait à une belle – porteuse d'une alliance – en rendez-vous coupable avec un soldat, sans doute Apollon à ses heures perdues.

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Gil Chauveau
26/03/2024