La Revue du Spectacle, le magazine des arts de la scène et du spectacle vivant. Infos théâtre, chanson, café-théâtre, cirque, arts de la rue, agenda, CD, etc.
Théâtre

"Bourlinguer"... Jean-Quentin Châtelain, debout, immobile, transmute un éternel retour douloureux en poésie pure - 11/05/2015

L'homme est debout comme fonte en fusion. Jean-Quentin Châtelain, les pieds plantés en terre, la tête dans les étoiles, contemple Naples, cette baie de carte de postale avec son volcan immobile et son pin maritime qui veille sur le tombeau de Virgile*... Il est Blaise Cendrars qui raconte le début de son histoire, celle de sa petite enfance d'où tout commence, d'où tout part. Où il revient à...  

Antigone… Quand Sophocle prend rendez-vous avec le contemporain - 05/05/2015

Dans la mise en scène de Ivo Van Hove, le contemporain fait irruption dans la pièce de Sophocle. Le jeu des comédiens est concis dans la gestuelle et précis dans le verbe avec une Juliette Binoche, dans le rôle d'Antigone, superbe de vérité. Un vent balaie la scène où quelques feuilles d'arbre volent, comme une prémisse au destin qui emportera nos personnages. Antigone (Juliette Binoche) va à la...  

Ancien malade des hôpitaux de Paris... Médecins et malades sous délires et dires ! - 21/04/2015

Dans un seul en scène ayant pour cadre les urgences d'un hôpital, Olivier Saladin incarne une série de personnages hauts en couleur, autour de médecins urgentistes et de malades sous le scalpel de l'humour. Olivier Saladin est seul sur scène. Il interpelle un spectateur lui permettant ainsi dès l'entame du spectacle de créer une relation avec le public ancrant ainsi plus facilement sa fable dans...  

Les utopistes anonymes font briller, comme un lapidaire, le fait des pierres fines et rares - 20/04/2015

Un rideau, trois caisses en bois. Une table. Une humble ampoule éclairée. Cela pourrait être un lieu de nulle part. Une utopie. Un lieu où, d'un commun et tacite accord, un musicien, une comédienne, un poète, réunis en un cercle des anonymes, parlent d'Utopies. Dans le cercle des utopistes anonymes ourdi par Jean-Louis Hourdin, ce lieu de nulle part voit se réaliser la proposition d'un hasard...  

"Orlando"... Un théâtre manifeste, lieu de toutes les tragédies et de toutes les dérisions - 12/04/2015

Dans "Orlando" d'Olivier Py, il y a la mère, grande comédienne, qui entre en scène nerveuse mêlant vie exacerbée quotidienne et répliques phrasées et paraphrasées. Il y a le fils, en quête de père, en quête d'identité, qui veut inscrire ses pas de jeune poète dans le grand œuvre du Théâââtre et vit une vie d'artiste pauvre, insouciante et amoureuse avec son amante et son amant. Il y a le père, à...  

"Animal(s)"... Lien entre vaudeville, burlesques du cinéma muet et branquignols - 09/04/2015

En mettant en scène deux courtes pièces d'Eugène Labiche, "La Dame au petit chien" et "Un Mouton à l'entresol", Jean Boillot fait coup double. D'une part il fait (encore) découvrir un auteur pourtant célèbre... Et finalement peu connu parce que son œuvre est d'une certaine manière trop prolifique. D'autre part, il donne un spectacle qui, sans excès de langage, est véritablement jubilatoire....  

"Argent, dette et music-hall !"… Des coulisses à la scène sans en avoir l'air... ni l'argent ! - 26/03/2015

Autour de chansons des années trente et du thème de l'argent, le monde du music-hall est présenté sous ses deux aspects, côté coulisses et côté scène, dans une mise en scène enjouée où les chansons finissent par occulter la crise et ses problèmes financiers. Quatre interprètes (dont un pianiste) investissent l'espace de jeu sur lequel la scénographie laisse apparaître des coulisses et une scène....  

Une réflexion profonde, universelle sur la quête de l'identité… Sur la conquête des illusions réparatrices - 24/03/2015

Un homme disparaît et sa fille, vingt ans après, peine à le retrouver... Sur cet argument, le collectif Les Sans Cou bâtit un spectacle ambitieux qui porte un titre énigmatique, "Idem"*, dont l'écriture scénique, tout en chassés croisés, s'appuie sur un art consommé de l'improvisation. "Idem" brasse les situations et, par les changements de lieux et de temps, fait palpiter le récit dans un...  

"Toujours la tempête"... Une passionnante épopée où le récit familial rencontre le mythe - 19/03/2015

Peter Handke donne à partager une histoire pleine d'émotion palpitante et belle et triste. Celle d'une famille déchirée, isolée dans une région oubliée de l'Histoire, martyrisée par la poussée des empires qui la jouxte. Celle de la Carinthie autrichienne, étranglée durant la Deuxième Guerre mondiale entre nazis et partisans, entre allemands et yougoslaves… Si le sujet est aride, l'écriture de...  

"Zigmund Follies" de Philippe Genty, un carnaval de la conscience des plus désopilants - 16/03/2015

L'aventure dure depuis trente-deux ans et reste éblouissante. Dans "Zigmund Follies", Philippe Genty réécrit la loi des avatars à la force du babil et de la main. Son passage à Paris est un événement. "Zigmund Follies" ? C'est l'histoire d'un conteur qui travaille tellement du chapeau qu'il se rend compte que sa main gauche lui fait sa poche, et que pour remettre de l'ordre seul l'inspecteur...  
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À Découvrir

•Off 2024• "Mon Petit Grand Frère" Récit salvateur d'un enfant traumatisé au bénéfice du devenir apaisé de l'adulte qu'il est devenu

Comment dire l'indicible, comment formuler les vagues souvenirs, les incertaines sensations qui furent captés, partiellement mémorisés à la petite enfance. Accoucher de cette résurgence voilée, diffuse, d'un drame familial ayant eu lieu à l'âge de deux ans est le parcours théâtral, étonnamment réussie, que nous offre Miguel-Ange Sarmiento avec "Mon petit grand frère". Ce qui aurait pu paraître une psychanalyse impudique devient alors une parole salvatrice porteuse d'un écho libératoire pour nos propres histoires douloureuses.

© Ève Pinel.
9 mars 1971, un petit bonhomme, dans les premiers pas de sa vie, goûte aux derniers instants du ravissement juvénile de voir sa maman souriante, heureuse. Mais, dans peu de temps, la fenêtre du bonheur va se refermer. Le drame n'est pas loin et le bonheur fait ses valises. À ce moment-là, personne ne le sait encore, mais les affres du destin se sont mis en marche, et plus rien ne sera comme avant.

En préambule du malheur à venir, le texte, traversant en permanence le pont entre narration réaliste et phrasé poétique, nous conduit à la découverte du quotidien plein de joie et de tendresse du pitchoun qu'est Miguel-Ange. Jeux d'enfants faits de marelle, de dinette, de billes, et de couchers sur la musique de Nounours et de "bonne nuit les petits". L'enfant est affectueux. "Je suis un garçon raisonnable. Je fais attention à ma maman. Je suis un bon garçon." Le bonheur est simple, mais joyeux et empli de tendresse.

Puis, entre dans la narration la disparition du grand frère de trois ans son aîné. La mort n'ayant, on le sait, aucune morale et aucun scrupule à commettre ses actes, antinaturelles lorsqu'il s'agit d'ôter la vie à un bambin. L'accident est acté et deux gamins dans le bassin sont décédés, ceux-ci n'ayant pu être ramenés à la vie. Là, se révèle l'avant et l'après. Le bonheur s'est enfui et rien ne sera plus comme avant.

Gil Chauveau
14/06/2024
Spectacle à la Une

•Off 2024• Lou Casa "Barbara & Brel" À nouveau un souffle singulier et virtuose passe sur l'œuvre de Barbara et de Brel

Ils sont peu nombreux ceux qui ont une réelle vision d'interprétation d'œuvres d'artistes "monuments" tels Brel, Barbara, Brassens, Piaf et bien d'autres. Lou Casa fait partie de ces rares virtuoses qui arrivent à imprimer leur signature sans effacer le filigrane du monstre sacré interprété. Après une relecture lumineuse en 2016 de quelques chansons de Barbara, voici le profond et solaire "Barbara & Brel".

© Betül Balkan.
Comme dans son précédent opus "À ce jour" (consacré à Barbara), Marc Casa est habité par ses choix, donnant un souffle original et unique à chaque titre choisi. Évitant musicalement l'écueil des orchestrations "datées" en optant systématiquement pour des sonorités contemporaines, chaque chanson est synonyme d'une grande richesse et variété instrumentales. Le timbre de la voix est prenant et fait montre à chaque fois d'une émouvante et artistique sincérité.

On retrouve dans cet album une réelle intensité pour chaque interprétation, une profondeur dans la tessiture, dans les tonalités exprimées dont on sent qu'elles puisent tant dans l'âme créatrice des illustres auteurs que dans les recoins intimes, les chemins de vie personnelle de Marc Casa, pour y mettre, dans une manière discrète et maîtrisée, emplie de sincérité, un peu de sa propre histoire.

"Nous mettons en écho des chansons de Barbara et Brel qui ont abordé les mêmes thèmes mais de manières différentes. L'idée est juste d'utiliser leur matière, leur art, tout en gardant une distance, en s'affranchissant de ce qu'ils sont, de ce qu'ils représentent aujourd'hui dans la culture populaire, dans la culture en général… qui est énorme !"

Gil Chauveau
19/06/2024
Spectacle à la Une

•Off 2024• "Un Chapeau de paille d'Italie" Une version singulière et explosive interrogeant nos libertés individuelles…

… face aux normalisations sociétales et idéologiques

Si l'art de générer des productions enthousiastes et inventives est incontestablement dans l'ADN de la compagnie L'Éternel Été, l'engagement citoyen fait aussi partie de la démarche créative de ses membres. La présente proposition ne déroge pas à la règle. Ainsi, Emmanuel Besnault et Benoît Gruel nous offrent une version décoiffante, vive, presque juvénile, mais diablement ancrée dans les problématiques actuelles, du "Chapeau de paille d'Italie"… pièce d'Eugène Labiche, véritable référence du vaudeville.

© Philippe Hanula.
L'argument, simple, n'en reste pas moins source de quiproquos, de riantes ficelles propres à la comédie et d'une bonne dose de situations grotesques, burlesques, voire absurdes. À l'aube d'un mariage des plus prometteurs avec la très florale Hélène – née sans doute dans les roses… ornant les pépinières parentales –, le fringant Fadinard se lance dans une quête effrénée pour récupérer un chapeau de paille d'Italie… Pour remplacer celui croqué – en guise de petit-déj ! – par un membre de la gent équestre, moteur exclusif de son hippomobile, ci-devant fiacre. À noter que le chapeau alimentaire appartenait à une belle – porteuse d'une alliance – en rendez-vous coupable avec un soldat, sans doute Apollon à ses heures perdues.

N'ayant pas vocation à pérenniser toute forme d'adaptation académique, nos deux metteurs en scène vont imaginer que cette histoire absurde est un songe, le songe d'une nuit… niché au creux du voyage ensommeillé de l'aimable Fadinard. Accrochez-vous à votre oreiller ! La pièce la plus célèbre de Labiche se transforme en une nouvelle comédie explosive, électro-onirique ! Comme un rêve habité de nounours dans un sommeil moelleux peuplé d'êtres extravagants en doudounes orange.

Gil Chauveau
26/03/2024