La Revue du Spectacle, le magazine des arts de la scène et du spectacle vivant. Infos théâtre, chanson, café-théâtre, cirque, arts de la rue, agenda, CD, etc.
Théâtre

"Ruy Blas" Une version vibrant assurément dans la sensibilité contemporaine - 29/02/2020

Yves Beaunesne met en scène "Ruy Blas" de Victor Hugo et c'est comme une (re)découverte. Pleine de vivacité, de pétulance, l'histoire est celle d'une reine malheureuse. D'un valet amoureux d'une reine. D'un amour impossible entre une reine et un valet. D'un amour immense et tragique entre deux êtres que tout sépare… D'un ministre éconduit qui se venge. D'une machination effroyable pour faire...  

"Cent millions qui tombent"… et une piécette plus tard, le vaudeville bat la campagne - 26/02/2020

Le Collectif les Bâtards Dorés est connu pour son remarquable "Méduse" présenté à La Manufacture Atlantique de Bordeaux, avant de connaître les honneurs du Festival In d'Avignon en 2018. Là, changement de décor… Il ne s'agit plus du naufrage tragique immortalisé par le peintre Géricault, mais de celui ressassé en boucle par les bourgeois du siècle précédent qui s'esbaudissaient en retrouvant dans...  

"Le Muguet de Noël" Ça fleure bon l'intrigue familiale et l'amitié qui fane... pour une joyeuse réconciliation en bouquet final ! - 21/02/2020

Quand le théâtre prend des allures de divertissement comique, il peut se nommer "Le Muguet de Noël" et rassembler une belle brochette de trois comédiens et une comédienne mis en scène par le talentueux et compétent Jean-Luc Moreau qui fait preuve, depuis plus de quarante ans, d'un savoir-faire exceptionnel. De celui apte à dérider nos zygomatiques grâce à la dynamisation de comédies plus ou moins...  

"Désordre du discours" Quand le geste et la parole creusent ce que le discours recouvre… - 20/02/2020

Vouloir faire théâtre de la "Leçon inaugurale", qu'un éminent intellectuel du nom de Michel Foucault prononça lors de son intronisation au Collège de France, pourrait paraître pure gageure. Comment en effet "L'ordre du discours", digressions savantes sur les pouvoirs du langage, pouvait-il - même mis en "désordre" - devenir l'objet d'une représentation théâtrale ? La chorégraphe metteure en scène...  

"Contes et légendes" Sous nos yeux un avatar contemporain du mythe de Galatée - 18/02/2020

Dans "Contes et légendes", Joël Pommerat part à la poursuite des avatars du bon vieux robot redevenu contemporain, actuel, mignon, androgyne comme il se doit, Kawaii, et fait comme s'il était déjà entré dans la vie quotidienne, épicentre de toutes les préoccupations… Avec beaucoup d'humour, un peu d'acidité et beaucoup de tendresse, la scène se présente comme un laboratoire d'éthologie. Une...  

"Déjeuner chez Wittgenstein" Un repas déjanté au goût prodigieusement amer et à la portée profondément jubilatoire - 17/02/2020

Thomas Bernhard, d'origine autrichienne, occupe une place à part dans le paysage littéraire. Constatant que son pays composait sans scrupule aucun avec un passé nazi, il a interdit par voie(x) testamentaire que ses œuvres soient publiées en Autriche. Dans son texte éponyme - "Déjeuner chez Wittgenstein" -, deux sœurs "artistes" accueillent dans la maison familiale leur frère philosophe (double...  

"Des Territoires" Et si la colère des "héritiers" trouvait là (très provisoirement) son point d'équilibre ? - 12/02/2020

Quand Baptiste Amann parle de sa trilogie, dont il présente ici le troisième et dernier volet - faisant suite à "Nous sifflerons la Marseillaise…" et "D'une prison l'autre…" -, il lui arrive d'évoquer les trois moments de "L'Orestie" d'Eschyle, le crime, la vengeance et l'expiation. Non par quelconque prétention de se mesurer à une telle figure, mais pour faire entendre, dans un triptyque au...  

"Macbeth" Deux clowns donnent un éclat de rire à Shakespeare - 11/02/2020

C'est un petit bijou que ce spectacle. Le mariage réussi de deux grandes écoles apparemment éloignées : la tragédie élisabéthaine et l'art du clown. Politiques, conflits historiques, guerres et meurtres d'un côté, dérision, naïveté lumineuse, enfance et poésie de l'autre. Les deux mêlés font exploser le drame de Macbeth en feu d'artifice, entre rire et effroi. "Macbeth", faut-il le rappeler, ce...  

"Dunsinane" Comme une possible désagrégation de nos utopies politiques pour un monde "meilleur" - 03/02/2020

Y a-t-il un "après Macbeth"… après que le tyran se soit réfugié dans la forteresse de Dunsinane ? Une suite de la tragédie de Shakespeare est-elle possible ? David Greig, auteur écossais contemporain, l'a imaginée et Baptiste Guiton a mis en scène le résultat et en donne une mise en lumière spectaculaire et réussie où sont éclairés certains maux de notre société et où sont posés des...  

"Broken" Passer d'une vie cassée à une vie avenir… à l'espérance créative - 29/01/2020

On peut tout imaginer sur le plateau, la scène de théâtre, la piste de cirque, sauf l'accident en cours de jeu… C'est pourtant ce qui est arrivé à Véro Dahuron, en représentation de Grouchenka dans "Les Frères Karamazov", un soir à Troyes… Une chute et la perte d'un œil. "Broken" n'est pas que la chronique d'un destin qui se brise mais bien celle du nouveau sens à lui donner, de l'inédite...  
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À Découvrir

•Off 2024• "Mon Petit Grand Frère" Récit salvateur d'un enfant traumatisé au bénéfice du devenir apaisé de l'adulte qu'il est devenu

Comment dire l'indicible, comment formuler les vagues souvenirs, les incertaines sensations qui furent captés, partiellement mémorisés à la petite enfance. Accoucher de cette résurgence voilée, diffuse, d'un drame familial ayant eu lieu à l'âge de deux ans est le parcours théâtral, étonnamment réussie, que nous offre Miguel-Ange Sarmiento avec "Mon petit grand frère". Ce qui aurait pu paraître une psychanalyse impudique devient alors une parole salvatrice porteuse d'un écho libératoire pour nos propres histoires douloureuses.

© Ève Pinel.
9 mars 1971, un petit bonhomme, dans les premiers pas de sa vie, goûte aux derniers instants du ravissement juvénile de voir sa maman souriante, heureuse. Mais, dans peu de temps, la fenêtre du bonheur va se refermer. Le drame n'est pas loin et le bonheur fait ses valises. À ce moment-là, personne ne le sait encore, mais les affres du destin se sont mis en marche, et plus rien ne sera comme avant.

En préambule du malheur à venir, le texte, traversant en permanence le pont entre narration réaliste et phrasé poétique, nous conduit à la découverte du quotidien plein de joie et de tendresse du pitchoun qu'est Miguel-Ange. Jeux d'enfants faits de marelle, de dinette, de billes, et de couchers sur la musique de Nounours et de "bonne nuit les petits". L'enfant est affectueux. "Je suis un garçon raisonnable. Je fais attention à ma maman. Je suis un bon garçon." Le bonheur est simple, mais joyeux et empli de tendresse.

Puis, entre dans la narration la disparition du grand frère de trois ans son aîné. La mort n'ayant, on le sait, aucune morale et aucun scrupule à commettre ses actes, antinaturelles lorsqu'il s'agit d'ôter la vie à un bambin. L'accident est acté et deux gamins dans le bassin sont décédés, ceux-ci n'ayant pu être ramenés à la vie. Là, se révèle l'avant et l'après. Le bonheur s'est enfui et rien ne sera plus comme avant.

Gil Chauveau
14/06/2024
Spectacle à la Une

•Off 2024• Lou Casa "Barbara & Brel" À nouveau un souffle singulier et virtuose passe sur l'œuvre de Barbara et de Brel

Ils sont peu nombreux ceux qui ont une réelle vision d'interprétation d'œuvres d'artistes "monuments" tels Brel, Barbara, Brassens, Piaf et bien d'autres. Lou Casa fait partie de ces rares virtuoses qui arrivent à imprimer leur signature sans effacer le filigrane du monstre sacré interprété. Après une relecture lumineuse en 2016 de quelques chansons de Barbara, voici le profond et solaire "Barbara & Brel".

© Betül Balkan.
Comme dans son précédent opus "À ce jour" (consacré à Barbara), Marc Casa est habité par ses choix, donnant un souffle original et unique à chaque titre choisi. Évitant musicalement l'écueil des orchestrations "datées" en optant systématiquement pour des sonorités contemporaines, chaque chanson est synonyme d'une grande richesse et variété instrumentales. Le timbre de la voix est prenant et fait montre à chaque fois d'une émouvante et artistique sincérité.

On retrouve dans cet album une réelle intensité pour chaque interprétation, une profondeur dans la tessiture, dans les tonalités exprimées dont on sent qu'elles puisent tant dans l'âme créatrice des illustres auteurs que dans les recoins intimes, les chemins de vie personnelle de Marc Casa, pour y mettre, dans une manière discrète et maîtrisée, emplie de sincérité, un peu de sa propre histoire.

"Nous mettons en écho des chansons de Barbara et Brel qui ont abordé les mêmes thèmes mais de manières différentes. L'idée est juste d'utiliser leur matière, leur art, tout en gardant une distance, en s'affranchissant de ce qu'ils sont, de ce qu'ils représentent aujourd'hui dans la culture populaire, dans la culture en général… qui est énorme !"

Gil Chauveau
19/06/2024
Spectacle à la Une

•Off 2024• "Un Chapeau de paille d'Italie" Une version singulière et explosive interrogeant nos libertés individuelles…

… face aux normalisations sociétales et idéologiques

Si l'art de générer des productions enthousiastes et inventives est incontestablement dans l'ADN de la compagnie L'Éternel Été, l'engagement citoyen fait aussi partie de la démarche créative de ses membres. La présente proposition ne déroge pas à la règle. Ainsi, Emmanuel Besnault et Benoît Gruel nous offrent une version décoiffante, vive, presque juvénile, mais diablement ancrée dans les problématiques actuelles, du "Chapeau de paille d'Italie"… pièce d'Eugène Labiche, véritable référence du vaudeville.

© Philippe Hanula.
L'argument, simple, n'en reste pas moins source de quiproquos, de riantes ficelles propres à la comédie et d'une bonne dose de situations grotesques, burlesques, voire absurdes. À l'aube d'un mariage des plus prometteurs avec la très florale Hélène – née sans doute dans les roses… ornant les pépinières parentales –, le fringant Fadinard se lance dans une quête effrénée pour récupérer un chapeau de paille d'Italie… Pour remplacer celui croqué – en guise de petit-déj ! – par un membre de la gent équestre, moteur exclusif de son hippomobile, ci-devant fiacre. À noter que le chapeau alimentaire appartenait à une belle – porteuse d'une alliance – en rendez-vous coupable avec un soldat, sans doute Apollon à ses heures perdues.

N'ayant pas vocation à pérenniser toute forme d'adaptation académique, nos deux metteurs en scène vont imaginer que cette histoire absurde est un songe, le songe d'une nuit… niché au creux du voyage ensommeillé de l'aimable Fadinard. Accrochez-vous à votre oreiller ! La pièce la plus célèbre de Labiche se transforme en une nouvelle comédie explosive, électro-onirique ! Comme un rêve habité de nounours dans un sommeil moelleux peuplé d'êtres extravagants en doudounes orange.

Gil Chauveau
26/03/2024