Assister à une représentation de Butô (1) est comme voir une danse de l'âme avec sa fragilité des mouvements, puisant à l'intérieur des corps, et sa gestuelle qui fait un pacte avec le Temps, avec son écoulement et sa sérénité. Le Butô a été créé en 1959 lors d'un spectacle de Tatsumi Hijikata (1928-1986), avec la collaboration de Kazuo Ōno (1906-2010) appelé Kinjiki (2) qui fit scandale et provoqua le bannissement de Hijikata de tous les festivals et organisations de danses japonaises.
La compagnie Sankai Juku a été créé en 1975 et Ushio Amagatsu, figure majeure du Butô, fait partie de la deuxième génération de danseurs qui en compte actuellement trois.
Il est appelé parfois "danse des ténèbres" car il relie l'être vers un espace-temps appelé "ma" où les esprits habitent. Cette conjonction avec la Mort fait la mesure, entre autres, du Butô dans une revendication aussi politique, à ses origines, de rejeter l'influence occidentale et de déroger aux tabous sexuels et sociaux. La danse est d'une clarté et d'une sérénité assez confondante.
Elle fait surtout appel à un travail intérieur où les deux faces de notre être, le Ying et le Yang, le conscient et l'inconscient, ou l'ange et le démon selon le référentiel adopté par chacun, se réunissent pour faire corps avec un extérieur, celui du monde. Les danseurs sont recouverts de plâtre blanc, le crâne rasé. Même si le noir était la couleur d'origine, Hijikata a ensuite adopté le plâtre blanc pour la douleur cutanée qu'il provoquerait (3).
La compagnie Sankai Juku a été créé en 1975 et Ushio Amagatsu, figure majeure du Butô, fait partie de la deuxième génération de danseurs qui en compte actuellement trois.
Il est appelé parfois "danse des ténèbres" car il relie l'être vers un espace-temps appelé "ma" où les esprits habitent. Cette conjonction avec la Mort fait la mesure, entre autres, du Butô dans une revendication aussi politique, à ses origines, de rejeter l'influence occidentale et de déroger aux tabous sexuels et sociaux. La danse est d'une clarté et d'une sérénité assez confondante.
Elle fait surtout appel à un travail intérieur où les deux faces de notre être, le Ying et le Yang, le conscient et l'inconscient, ou l'ange et le démon selon le référentiel adopté par chacun, se réunissent pour faire corps avec un extérieur, celui du monde. Les danseurs sont recouverts de plâtre blanc, le crâne rasé. Même si le noir était la couleur d'origine, Hijikata a ensuite adopté le plâtre blanc pour la douleur cutanée qu'il provoquerait (3).
La danse est lente avec des membres toujours en équilibre. Cela demande une grande concentration, de la puissance et du souffle. Les mouvements sont décomposés de façon très fluide, ponctués parfois de sauts, sans grandes enjambées. Le corps est tiré par les mouvements des membres. Le tronc est l'axe central, régulateur sur lequel ils prennent appui faisant du corps une source de tensions.
C'est l'histoire d'un temps qui se glisse dans des corps, d'une fable entre une pression et un équilibre, d'une rencontre entre la Vie et la Mort autour d'un processus de circulation, de passage d'un état à un autre (4).
Le spectacle est proche de la nature dans son concept où la Terre est représentée par un sol ocre de poussière, l'eau par une étendue bleue et le feu par un éclairage aux couleurs chaudes. La scénographie est dans un camaïeu de couleur blanche-ocre, autant pour la scène que pour les costumes ou le maquillage des danseurs.
Les bras levés, les mains ouvertes, les jambes écartées ou repliées, le corps est tel un accordéon organique qui se plie et se déplie, comme une onde sur scène accompagnée de mouvements larges, étendus, étirés, ramassés ou recroquevillés. C'est une tranquillité en distension, une sagesse corporelle qui prend ses racines avec une musique omniprésente, calme, fluide et toujours dans le même tempo.
C'est l'histoire d'un temps qui se glisse dans des corps, d'une fable entre une pression et un équilibre, d'une rencontre entre la Vie et la Mort autour d'un processus de circulation, de passage d'un état à un autre (4).
Le spectacle est proche de la nature dans son concept où la Terre est représentée par un sol ocre de poussière, l'eau par une étendue bleue et le feu par un éclairage aux couleurs chaudes. La scénographie est dans un camaïeu de couleur blanche-ocre, autant pour la scène que pour les costumes ou le maquillage des danseurs.
Les bras levés, les mains ouvertes, les jambes écartées ou repliées, le corps est tel un accordéon organique qui se plie et se déplie, comme une onde sur scène accompagnée de mouvements larges, étendus, étirés, ramassés ou recroquevillés. C'est une tranquillité en distension, une sagesse corporelle qui prend ses racines avec une musique omniprésente, calme, fluide et toujours dans le même tempo.
Pour autant, la gestuelle est rarement identique même si une similitude se dessine dans ses contours, dans cette façon de se mouvoir, dans cette communion de groupe quand les différents danseurs investissent la scène. Leur solitude est omniprésente. Plongés dans une grande concentration, ils sont comme suspendus dans l'espace, faisant abstraction du public.
Nous sommes dans une fausse monotonie scénographique, musicale et artistique car tout évolue, de façon constante, légère comme pour ne pas déranger un équilibre originel dont le "barycentre" bougerait au détour d'un souffle, d'une tension, d'un pas, d'une inflexion.
Hijikata définissait le Butô comme "le cadavre qui se met debout en risquant la mort", une mort embrassant la vie pour nous conter son au-delà au détour de sa poésie corporelle.
(1) Bu signifie "danser" et tō, "fouler le sol".
(2) Euphémisme signifiant "homosexualité" et traduit en français par "Les amours interdites" (1951) qui est un roman de l'auteur japonais Yukio Mishima (1925-1970).
(3) D'après "Du corps mort vers la vie : le Butô selon Hijikata" de Christine Greiner, Augustin Berque, Britta Boutry-Stadelmann, Nathalie Frogneux, Suzuki Sadami.
(4) Meguri vient de Meguru et fait référence à une rotation, à un cycle et par extension signifie ce qui circule en suivant un certain ordre.
Nous sommes dans une fausse monotonie scénographique, musicale et artistique car tout évolue, de façon constante, légère comme pour ne pas déranger un équilibre originel dont le "barycentre" bougerait au détour d'un souffle, d'une tension, d'un pas, d'une inflexion.
Hijikata définissait le Butô comme "le cadavre qui se met debout en risquant la mort", une mort embrassant la vie pour nous conter son au-delà au détour de sa poésie corporelle.
(1) Bu signifie "danser" et tō, "fouler le sol".
(2) Euphémisme signifiant "homosexualité" et traduit en français par "Les amours interdites" (1951) qui est un roman de l'auteur japonais Yukio Mishima (1925-1970).
(3) D'après "Du corps mort vers la vie : le Butô selon Hijikata" de Christine Greiner, Augustin Berque, Britta Boutry-Stadelmann, Nathalie Frogneux, Suzuki Sadami.
(4) Meguri vient de Meguru et fait référence à une rotation, à un cycle et par extension signifie ce qui circule en suivant un certain ordre.
"Meguri"
Exubérance marine, tranquillité terrestre.
Par la Compagnie Sankai Juku.
Mise en scène, chorégraphie & conception : Ushio Amagatsu.
Avec : Ushio Amagatsu, Semimaru, Toru Iwashita, Sho Takeuchi, Akihito Ichihara, Dai Matsuoka, Norihito Ishii, Shunsuke Momoki.
Musiques : Takashi Kako, Yas-Kaz, Yoichiro Yoshikawa.
Réalisation du mur de fond : Roshi.
Coordination technique : Tsubasa Yamashita.
Plateau : Keizuke Watanabe.
Lumière : Satoru Suzuki, Genta Imamura.
Son : Akira Aikawa.
Traduction : Akira Ogata.
Du 23 juin au 2 juillet 2016.
Du mardi au samedi à 20 h 30, dimanche à 17 h.
Théâtre de la Ville, Paris 4e, 01 42 74 22 77.
>> theatredelaville-paris.com
Par la Compagnie Sankai Juku.
Mise en scène, chorégraphie & conception : Ushio Amagatsu.
Avec : Ushio Amagatsu, Semimaru, Toru Iwashita, Sho Takeuchi, Akihito Ichihara, Dai Matsuoka, Norihito Ishii, Shunsuke Momoki.
Musiques : Takashi Kako, Yas-Kaz, Yoichiro Yoshikawa.
Réalisation du mur de fond : Roshi.
Coordination technique : Tsubasa Yamashita.
Plateau : Keizuke Watanabe.
Lumière : Satoru Suzuki, Genta Imamura.
Son : Akira Aikawa.
Traduction : Akira Ogata.
Du 23 juin au 2 juillet 2016.
Du mardi au samedi à 20 h 30, dimanche à 17 h.
Théâtre de la Ville, Paris 4e, 01 42 74 22 77.
>> theatredelaville-paris.com