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Avignon 2023

•Off 2023• "Gourou" Vous cherchez l'Amour et la Vérité ? Rejoignez le Véritanisme

Un jour, Mathias apprend qu'il est l'unique héritier d'une mystérieuse secte américaine, l'Église Véritaniste alors qu'il vient de se faire plaquer par Zoé, sa petite amie, et qu'il se réfugie chez son meilleur ami, Pierre, frère de cette dernière. Il n'a plus rien et surtout plus d'ambition, si tant est qu'il en ait jamais eu. 100 millions de dollars l'attendent ! À une condition : faire renaître la secte de ses cendres et réunir au moins 5 000 fidèles en moins de six mois. Quelle autre solution que de devenir Gourou ?



© Yume Nanbu.
© Yume Nanbu.
Avant même le début de la pièce, le ton est donné… Les spectateurs s'installent petit à petit alors qu'un homme, en slip kangourou blanc, stoïque, est déjà sur scène et nous fixe. Il s'agira donc d'une pièce comique à n'en point douter. Mais ne nous fions pas aux apparences ! Appréhendons le titre de la pièce peut-être, avant tout, et tentons de nous faire une idée de ce qui nous attend. Laissons-nous porter et nous découvrirons au fil de la pièce qu'il s'agit là d'un titre largement polysémique à lectures multiples. Probablement, le propos vous interpellera vous aussi d'une manière ou d'une autre.

Et surtout, ne vous contentez pas de prendre un flyer lors du tractage des comédiens et des comédiennes dans les rues d'Avignon en les entendant notamment hurler un message de santé publique - qui pourrait vous paraître quelque peu repoussant -, mais suivez-les absolument jusqu'au Théâtre des Brunes, rue Thiers, pour les voir jouer à merveille.

L'écriture de "Gourou" par François Aubagnac remonte à 2019. Passionné par la comédie, l'auteur comédien, qui a lâché ses études d'avocat, a toujours été fasciné par les sectes et leur univers. Bien lui en a pris de quitter la possibilité du barreau, car cette pièce est un petit bijou d'inventivité porté par un texte sensiblement profond et interprété avec brio par l'ensemble des comédiennes et comédiens qui se sont rencontrés(es) lors de leurs études au cours Florent, cette pièce ayant été à l'origine la création de leur fin d'études du cours Florent.

© Yume Nanbu.
© Yume Nanbu.
"Gourou", déjà pièce coup de cœur l'an dernier au festival d'Avignon, le sera à n'en point douter encore cette année. Car, à bien y regarder, de nombreux thèmes y sont abordés qui sauront susciter votre esprit critique. Derrière une certaine folie sur le plateau, hautement maîtrisée, le spectateur est invité à s'interroger sur les dérives des réseaux sociaux, l'endoctrinement de plus en plus facile et spontané, l'argent, la quête du pouvoir, les relations amoureuses, la vieillesse – en filigrane, mais bien présente –, l'argent, les médias et la TV, les fake news ou encore l'amour.

"Sur Facebook, les gens gobent tout, surtout si on leur cache la vérité (…). Si on arrive à les convaincre que l'Église Véritanis les soutient, on les aura les 5 000 fidèles".

À la frontière du vaudeville dans lequel les portes claquent et où les personnages sont bien souvent au bord de la crise de nerfs, "Gourou", au sein du geste créateur, interroge notre société avec humour et nous met en garde contre les dérives sectaires, les croyances démesurées, le quant-à-soi et l'impérieux besoin d'être ensemble et en communauté parce qu'être seul(e), ce n'est pas humain ! Mais la communauté peut comporter des risques à partir du moment où elle ne laisse plus place à l'esprit critique.

© Yume Nanbu.
© Yume Nanbu.
De nombreuses trouvailles dans la scénographie emportent sans mesure le spectateur dans l'histoire de Mathias qui, très vite, va devenir Denver le gourou. La caricature de Thierry Ardisson par Thomas Milatos est époustouflante de vérité. Dorian Fontyn, dans un rôle éponyme, nous fait éclater de rire. Loïck Mülauer, par une très belle maîtrise du corps et une gestuelle taillée au cordeau, revêt en XXL des allures de gourou et on est à deux doigts de se laisser embrigader, notamment quand résonnent ses nombreux "Je vous aime" immersifs. Sans compter sa complicité avec François, criante de vérité dans leur jeu réciproque.

Très peu de décors sur le plateau et pourtant le spectateur est rapidement transporté dans des univers différents.

L'écriture du texte est remarquable et il va sans dire qu'il y a chez François Aubagnac quelques traits de génie notoires. Puisse-t-il écrire encore d'autres pièces de cet acabit… Le jeu de l'ensemble de cette joyeuse troupe de comédiens et comédiennes est hautement maîtrisé et porte de manière virevoltante un message très sérieux : "méfiez-vous des faux prophètes qui viennent vous déguiser en brebis (…) et des scribes qui se promènent en vêtements d'apparat, aiment les salutations…"

"Gourou"

© Yume Nanbu.
© Yume Nanbu.
Texte : François Aubagnac.
Mise en scène : Suzanne Gardeux.
Avec : François Aubagnac, Dorian Fontyn, Suzanne Gardeux, Thomas Milatos, Mélodie Moller, Loïck Müllaeur, Louis Zumkeller.
Durée : 1 h 15.

•Avignon Off 2023•
Du 7 au 29 Juillet 2023.
Tous les jours à 13 h 30. Relâche le lundi.
Théâtre des Brunes, 32, rue Thiers, Avignon.
Réservations : 04 84 36 00 37.
>> theatredesbrunes.fr

Brigitte Corrigou
Lundi 10 Juillet 2023

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•Off 2024• "Mon Petit Grand Frère" Récit salvateur d'un enfant traumatisé au bénéfice du devenir apaisé de l'adulte qu'il est devenu

Comment dire l'indicible, comment formuler les vagues souvenirs, les incertaines sensations qui furent captés, partiellement mémorisés à la petite enfance. Accoucher de cette résurgence voilée, diffuse, d'un drame familial ayant eu lieu à l'âge de deux ans est le parcours théâtral, étonnamment réussie, que nous offre Miguel-Ange Sarmiento avec "Mon petit grand frère". Ce qui aurait pu paraître une psychanalyse impudique devient alors une parole salvatrice porteuse d'un écho libératoire pour nos propres histoires douloureuses.

© Ève Pinel.
9 mars 1971, un petit bonhomme, dans les premiers pas de sa vie, goûte aux derniers instants du ravissement juvénile de voir sa maman souriante, heureuse. Mais, dans peu de temps, la fenêtre du bonheur va se refermer. Le drame n'est pas loin et le bonheur fait ses valises. À ce moment-là, personne ne le sait encore, mais les affres du destin se sont mis en marche, et plus rien ne sera comme avant.

En préambule du malheur à venir, le texte, traversant en permanence le pont entre narration réaliste et phrasé poétique, nous conduit à la découverte du quotidien plein de joie et de tendresse du pitchoun qu'est Miguel-Ange. Jeux d'enfants faits de marelle, de dinette, de billes, et de couchers sur la musique de Nounours et de "bonne nuit les petits". L'enfant est affectueux. "Je suis un garçon raisonnable. Je fais attention à ma maman. Je suis un bon garçon." Le bonheur est simple, mais joyeux et empli de tendresse.

Puis, entre dans la narration la disparition du grand frère de trois ans son aîné. La mort n'ayant, on le sait, aucune morale et aucun scrupule à commettre ses actes, antinaturelles lorsqu'il s'agit d'ôter la vie à un bambin. L'accident est acté et deux gamins dans le bassin sont décédés, ceux-ci n'ayant pu être ramenés à la vie. Là, se révèle l'avant et l'après. Le bonheur s'est enfui et rien ne sera plus comme avant.

Gil Chauveau
14/06/2024
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Ils sont peu nombreux ceux qui ont une réelle vision d'interprétation d'œuvres d'artistes "monuments" tels Brel, Barbara, Brassens, Piaf et bien d'autres. Lou Casa fait partie de ces rares virtuoses qui arrivent à imprimer leur signature sans effacer le filigrane du monstre sacré interprété. Après une relecture lumineuse en 2016 de quelques chansons de Barbara, voici le profond et solaire "Barbara & Brel".

© Betül Balkan.
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On retrouve dans cet album une réelle intensité pour chaque interprétation, une profondeur dans la tessiture, dans les tonalités exprimées dont on sent qu'elles puisent tant dans l'âme créatrice des illustres auteurs que dans les recoins intimes, les chemins de vie personnelle de Marc Casa, pour y mettre, dans une manière discrète et maîtrisée, emplie de sincérité, un peu de sa propre histoire.

"Nous mettons en écho des chansons de Barbara et Brel qui ont abordé les mêmes thèmes mais de manières différentes. L'idée est juste d'utiliser leur matière, leur art, tout en gardant une distance, en s'affranchissant de ce qu'ils sont, de ce qu'ils représentent aujourd'hui dans la culture populaire, dans la culture en général… qui est énorme !"

Gil Chauveau
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© Philippe Hanula.
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Gil Chauveau
26/03/2024