Ensemble Pygmalion et Raphaël Pichon © Pablo S Ruiz.
Quel opéra pouvait mieux que "Zoroastre" s'inscrire dans l'édition 2016 du festival de Radio France ? Un festival méditerranéen dont le thème est cette année "Le Voyage d'Orient". Sixième et dernier opéra de Rameau représenté avant la fameuse Querelle des Bouffons, "Zoroastre" est un des ces opéras qui ne peuvent mieux mériter leur qualification de "baroque" avec son intrigue centrée sur le combat des Puissances du Bien et du Mal (le mage Zoroastre contre le prêtre Abramane) et leurs amours contrariées dans une Perse de fantaisie.
Le méchant Abramane veut séduire la douce héritière du trône de Bactriane Amélite. Repoussé par cette princesse amoureuse de Zoroastre, il nouera une alliance maléfique avec la princesse Erinice (1), elle-même aimant sans espoir le mage en pleine initiation.
Avec ses archanges et ses esprits malins, parties prenantes dans un combat très symbolique entre la lumière et les ténèbres, le livret de Louis de Cahusac, franc-maçon notoire, anticipe l'opéra maçonnique de Mozart - et son Sarastro dans "La Flûte enchantée". Une tragédie lyrique héritée du théâtre à machines et en musique donc (et pas si éloignée des tragédies précieuses de Voltaire) avec ses moments langoureux, lyriques et d'autres très impressionnants, à coup de percussions et d'éclats de tonnerre (comme dans l'ouverture et l'acte IV).
Le méchant Abramane veut séduire la douce héritière du trône de Bactriane Amélite. Repoussé par cette princesse amoureuse de Zoroastre, il nouera une alliance maléfique avec la princesse Erinice (1), elle-même aimant sans espoir le mage en pleine initiation.
Avec ses archanges et ses esprits malins, parties prenantes dans un combat très symbolique entre la lumière et les ténèbres, le livret de Louis de Cahusac, franc-maçon notoire, anticipe l'opéra maçonnique de Mozart - et son Sarastro dans "La Flûte enchantée". Une tragédie lyrique héritée du théâtre à machines et en musique donc (et pas si éloignée des tragédies précieuses de Voltaire) avec ses moments langoureux, lyriques et d'autres très impressionnants, à coup de percussions et d'éclats de tonnerre (comme dans l'ouverture et l'acte IV).
Emmanuelle de Negri © Stéphane Lariven.
Première chose, on ne peut que regretter l'absence de mise en scène à Montpellier et se souvenir de la production de l'Opéra Comique de 2009. Mais il semblerait que des difficultés d'ordres divers cette fois aient imposé la version concert. Soit.
L'Ensemble Pygmalion, chœur et orchestre, et les solistes invités parviennent à nous intéresser à ce combat grandiose (ici purement théorique) et, ce, grâce à leur talent mais aussi à une œuvre qui fait la part belle à l'orchestre - un personnage en soi - aux intermèdes de danses, bref à une écriture qui crée un puissant théâtre évocateur tout en effaçant souvent la frontière entre airs et récitatifs. Malgré quelques longueurs, la partition de Rameau est vraiment riche de cette "tendresse délicate et charmante d'accents justes, de déclamation rigoureuse dans le récit…" (2), de "cette clarté dans l'expression, ce précis et ce ramassé dans la forme, qualités particulières et significatives du génie français" (2) que lui reconnaissait Debussy.
Raphaël Pichon et son ensemble rendent justice à cette subtilité comme à cette exubérance toute baroque. Sa version, tout à la fois ramassée et racée, souligne chaque phrase avec ses pleins et déliés ravissants, ses éclats infernaux ou accents éthérés - grâce aussi à un chœur de grande qualité. Nicolas Courjal est un Abramane mémorable, un méchant gourmand et pleinement investi, idéal d'articulation et d'expressivité.
Emmanuelle de Negri est une Erinice déchirée et complexe, au beau chant tout en nuances et contrastes attendus, tandis que l'Amélite de Katherine Watson, souvent belle, manque parfois justement de subtilité. L‘amant parfait et mage Zoroastre bénéficie de l'art bel cantiste de Reinoud van Mechelen. Le plateau brille aussi à l'envi dans les seconds rôles.
D'autres rendez-vous notables au festival de Radio France sont encore à venir, dont un opéra rare de 1898 de Pietro Mascagni, "Iris", le 26 juillet avec la soprano Sonya Yoncheva et l'Orchestre national Montpellier Languedoc-Roussillon sous la direction de Domingo Hindoyan.
(1) Erinice est donc une Erinye (ou Furie) mais aussi une amante inconsolable, héritière des romans précieux.
(2) Voir les multiples plaidoyers du compositeur de "Pelléas" pour un Rameau qu'on exhumait alors de l'oubli, à lire dans "Monsieur Croche" (recueil d'articles écrits entre 1901 et 1917), "L'Imaginaire" Gallimard.
L'Ensemble Pygmalion, chœur et orchestre, et les solistes invités parviennent à nous intéresser à ce combat grandiose (ici purement théorique) et, ce, grâce à leur talent mais aussi à une œuvre qui fait la part belle à l'orchestre - un personnage en soi - aux intermèdes de danses, bref à une écriture qui crée un puissant théâtre évocateur tout en effaçant souvent la frontière entre airs et récitatifs. Malgré quelques longueurs, la partition de Rameau est vraiment riche de cette "tendresse délicate et charmante d'accents justes, de déclamation rigoureuse dans le récit…" (2), de "cette clarté dans l'expression, ce précis et ce ramassé dans la forme, qualités particulières et significatives du génie français" (2) que lui reconnaissait Debussy.
Raphaël Pichon et son ensemble rendent justice à cette subtilité comme à cette exubérance toute baroque. Sa version, tout à la fois ramassée et racée, souligne chaque phrase avec ses pleins et déliés ravissants, ses éclats infernaux ou accents éthérés - grâce aussi à un chœur de grande qualité. Nicolas Courjal est un Abramane mémorable, un méchant gourmand et pleinement investi, idéal d'articulation et d'expressivité.
Emmanuelle de Negri est une Erinice déchirée et complexe, au beau chant tout en nuances et contrastes attendus, tandis que l'Amélite de Katherine Watson, souvent belle, manque parfois justement de subtilité. L‘amant parfait et mage Zoroastre bénéficie de l'art bel cantiste de Reinoud van Mechelen. Le plateau brille aussi à l'envi dans les seconds rôles.
D'autres rendez-vous notables au festival de Radio France sont encore à venir, dont un opéra rare de 1898 de Pietro Mascagni, "Iris", le 26 juillet avec la soprano Sonya Yoncheva et l'Orchestre national Montpellier Languedoc-Roussillon sous la direction de Domingo Hindoyan.
(1) Erinice est donc une Erinye (ou Furie) mais aussi une amante inconsolable, héritière des romans précieux.
(2) Voir les multiples plaidoyers du compositeur de "Pelléas" pour un Rameau qu'on exhumait alors de l'oubli, à lire dans "Monsieur Croche" (recueil d'articles écrits entre 1901 et 1917), "L'Imaginaire" Gallimard.
Reinoud van Mechelen © DR.
Festival de Radio France Montpellier - Région Languedoc-Roussillon- Midi-Pyrénées
Du 11 au 26 juillet 2016.
Programme complet :
>> festivalradiofrancemontpellier.com
"Zoroastre" (1756).
Tragédie lyrique en un prologue et cinq actes.
Musique de J. P. Rameau (1683-1764).
Livret de Louis de Cahusac.
En français surtitré.
Durée : 2 h 50 avec entracte.
Prochaine date :
9 novembre 2016 à 20 h.
Opéra royal de Versailles.
Du 11 au 26 juillet 2016.
Programme complet :
>> festivalradiofrancemontpellier.com
"Zoroastre" (1756).
Tragédie lyrique en un prologue et cinq actes.
Musique de J. P. Rameau (1683-1764).
Livret de Louis de Cahusac.
En français surtitré.
Durée : 2 h 50 avec entracte.
Prochaine date :
9 novembre 2016 à 20 h.
Opéra royal de Versailles.
© Pablo S Ruiz.
Reinoud van Mechelen, Zoroastre.
Nicolas Courjal, Abramane, Grand Prêtre.
Emmanuelle de Negri, Erinice.
Katherine Watson, Amélite.
Christian Immler, La Vengeance, Oromasès.
Léa Desandre, Céphie.
Virgile Ancely, Zopire.
Etienne Bazola, Narbanor.
Ensemble Pygmalion.
Raphaël Pichon, direction.
Nicolas Courjal, Abramane, Grand Prêtre.
Emmanuelle de Negri, Erinice.
Katherine Watson, Amélite.
Christian Immler, La Vengeance, Oromasès.
Léa Desandre, Céphie.
Virgile Ancely, Zopire.
Etienne Bazola, Narbanor.
Ensemble Pygmalion.
Raphaël Pichon, direction.