© Marie Clauzade.
La forme de chacun de ces spectacles est chaque fois singulière. Chacun de ces textes est porté par une comédienne incarnant la parole, en faisant disparaître tout côté conférence ou trop d'abstraction qui pourrait nuire. L'humain, l'humanité, l'identité même est ici mis en avant aussi bien par la metteuse en scène que par les autrices auxquelles cette dernière s'est adressée pour écrire chacun de ces épisodes. Des autrices de théâtre dont les œuvres sont pour la plupart ancrées dans la réalité sociale, des autrices engagées dans la création artistique contemporaine. Pour "MADAM#6", c'est à Magali Mougel qu'Hélène Soulié a passé commande. Un texte qui raconte l'extraordinaire périple, le combat violent et la prodigieuse transformation intérieure et philosophique d'une bergère.
Une bergère… Une bergère ? Pas de clin d'œil à des bergères connues, non, il s'agit ici d'une citoyenne de notre époque qui part faire la transhumance, l'été, dans les montagnes, avec un troupeau de moutons, de brebis, un chien, la solitude, la vie rude, sans confort, dans la nature, sous les étoiles, dans le vent, les odeurs, les reproductions, les naissances. Il s'agit d'un double arrachement : arrachement à la vie citadine, son agitation, ses rectitudes, mais surtout une manière de s'arracher à toute une pensée, carrée, pleine de frontières, cloisonnée, binaire et sexiste. La pensée dominante structurée par les mâles affublés du même adjectif.
Dans un premier temps, c'est directement sur elle que l'on jette le venin : c'est métier d'homme que d'emmener les troupeaux dans les alpages, elle devient vite dans les bouches la putain des fougères, mais là n'est pas le plus beau du spectacle, le plus à la fois abstrait et sensible. Le texte de Magali Mougel plonge dans le sang même de cette histoire, s'imprègne de cette vie qui s'abandonne à la nature solaire et la vision fait parler alors les spectres anciens des sorcières qui, elles aussi, avaient repris contact avec la nature, les plantes, les animaux et, qui elles, aussi avaient subi le châtiment.
"Et j'ai vu quelquefois ce que l'homme a cru voir !", Arthur Rimbaud, Le Bateau Ivre.
Une bergère… Une bergère ? Pas de clin d'œil à des bergères connues, non, il s'agit ici d'une citoyenne de notre époque qui part faire la transhumance, l'été, dans les montagnes, avec un troupeau de moutons, de brebis, un chien, la solitude, la vie rude, sans confort, dans la nature, sous les étoiles, dans le vent, les odeurs, les reproductions, les naissances. Il s'agit d'un double arrachement : arrachement à la vie citadine, son agitation, ses rectitudes, mais surtout une manière de s'arracher à toute une pensée, carrée, pleine de frontières, cloisonnée, binaire et sexiste. La pensée dominante structurée par les mâles affublés du même adjectif.
Dans un premier temps, c'est directement sur elle que l'on jette le venin : c'est métier d'homme que d'emmener les troupeaux dans les alpages, elle devient vite dans les bouches la putain des fougères, mais là n'est pas le plus beau du spectacle, le plus à la fois abstrait et sensible. Le texte de Magali Mougel plonge dans le sang même de cette histoire, s'imprègne de cette vie qui s'abandonne à la nature solaire et la vision fait parler alors les spectres anciens des sorcières qui, elles aussi, avaient repris contact avec la nature, les plantes, les animaux et, qui elles, aussi avaient subi le châtiment.
"Et j'ai vu quelquefois ce que l'homme a cru voir !", Arthur Rimbaud, Le Bateau Ivre.
© Marie Clauzade.
Difficile pour moi de rendre compte de ce que porte ce spectacle très fort, très investi. Marion Coutarel est d'une force inouïe, à soulever des montagnes, bondissant sur tout le plateau, donnant corps et âme à ce personnage en quête de vérité, de vrai. Mais ce texte, cette mise en scène, ce jeu d'actrice concourent ensemble à toucher à quelque chose de tabou. Difficile à exprimer. J'ai l'impression d'avoir entrevu dans ce spectacle une part totalement inconnue du masculin. Marion Coutarel parvient à évoquer avec ses mots, avec son jeu, une autre philosophie, un autre ordre qui porte mal ce nom, une manière d'aller d'un point à un autre en évitant la ligne droite, et qui est une perception du monde et de la vie loin, si loin du pragmatisme cartésien de nos cités. C'est profond, sensible, beau, charnel, complet, sans domination.
Comme pour ses autres Manuels D'Auto Défense À Méditer, Hélène Soulié adapte sa mise en scène au sujet traité, mais loin de tout réalisme, utilisant la vidéo soit en ouverture narrative, soit en incrustation sur les objets support au plateau avec deux dialogues passionnants, l'un avec une Marguerite Duras, l'autre avec Agnès Varda. Le texte de Magali Mougel, chargé à parts égales de pertinence et de poésie, est construit comme une avancée perpétuelle vers cette évasion dans la nature, loin des hommes et de leur civilisation à la vue si courte, si étroite. Ouvrez vos cœurs, vos sens et vos esprits semblent ainsi clamer "MADAM#6" !
Vu au Théâtre de la Reine Blanche à Paris
Comme pour ses autres Manuels D'Auto Défense À Méditer, Hélène Soulié adapte sa mise en scène au sujet traité, mais loin de tout réalisme, utilisant la vidéo soit en ouverture narrative, soit en incrustation sur les objets support au plateau avec deux dialogues passionnants, l'un avec une Marguerite Duras, l'autre avec Agnès Varda. Le texte de Magali Mougel, chargé à parts égales de pertinence et de poésie, est construit comme une avancée perpétuelle vers cette évasion dans la nature, loin des hommes et de leur civilisation à la vue si courte, si étroite. Ouvrez vos cœurs, vos sens et vos esprits semblent ainsi clamer "MADAM#6" !
Vu au Théâtre de la Reine Blanche à Paris
"MADAM#6"
Conception et Mise en scène : Hélène Soulié.
Texte : Magali Mougel.
Texte vidéo et interview : Hélène Soulié.
Avec : Marion Coutarel.
Durée : 1 h.
À partir de 14 ans.
Tournée
14 février 2023 : MADAM #3 - "Scoreuses" (Hélène Soulié/Mariette Navarro), Le Cratère - Scène Nationale, Alès (30).
17 mars 2023 : MADAM #5 - "Ça ne passe pas" (Hélène Soulié/Claudine Galéa), Centre Culturel Jérôme Savary, Villeneuve-lès-Maguelone (34).
15 avril : Intégrale (MADAM#1, #2, #3, #4, #5 et #6), Théâtre Molière - Scène nationale, Sète (34).
Texte : Magali Mougel.
Texte vidéo et interview : Hélène Soulié.
Avec : Marion Coutarel.
Durée : 1 h.
À partir de 14 ans.
Tournée
14 février 2023 : MADAM #3 - "Scoreuses" (Hélène Soulié/Mariette Navarro), Le Cratère - Scène Nationale, Alès (30).
17 mars 2023 : MADAM #5 - "Ça ne passe pas" (Hélène Soulié/Claudine Galéa), Centre Culturel Jérôme Savary, Villeneuve-lès-Maguelone (34).
15 avril : Intégrale (MADAM#1, #2, #3, #4, #5 et #6), Théâtre Molière - Scène nationale, Sète (34).