Trib'Une

Popeck : "C'est la dernière fois !"

La chronique d'Isa-belle L

"To be or not to be has been ? That is the question."
Pour les plus de 75 ans, traduction : "Être ou ne pas être dépassé ? Telle est la question".
Pour les moins de 15 ans, traduction : "Est-il mieux d’être dépassé de mode ou d’avoir son caleçon qui dépasse, à la Kev Adams ?"



© DR.
Je souris. Je ris, rigole, m’éclate, me tape une bonne tranche de rigolade. Aïe aïe aïe…
Je fais rire avec des gros clichés, j’écris mes textes à la pâte à modeler, j’ai loupé mon brevet et je lève le poing pour exister.

En attendant… Popeck résiste à tous ces nouveaux comiques. Respectant au mieux son public.

L’autre soir dans ce théâtre, il a failli ne pas jouer. Non pas qu’il ne le voulait pas, c’est son producteur qui a hésité. Le monde a changé. Le théâtre aussi. Je vous fais un résumé :
Popeck a quitté pour quelques soirées le théâtre Daunou pour la Province. Normal. Puis, il est revenu à la capitale. Dans la même salle. Et là : bizarrerie de la direction ou décision bien consentie : son décor et les pendrillons avaient disparu, le plateau était mal fichu. Changement radical. Un autre spectacle se jouait après le sien, plus rentable ? Sûrement. Popeck ne rapporterait-il pas assez de : kopeck ! Pour la direction de cette agence de spectacle immobilière ? Probablement.

N’est pas Kev Adams qui veut. On a affaire à Popeck. Vous savez celui que certains professionnels traitent de "has been". Popeck que les pros voudraient voir finir en discothèque au milieu des teenagers se déhanchant sur "Billy Jean" sans bretelles et sans élastiques, pour tenir leurs denim’s ! Popeck l’amuseur, le clown, le poète… peu vu à la télé ces dernières années cédant sa place aux comiques mal sapés.

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Has been Popeck ? Je réponds, en anglais : no, he is not has been.

Popeck a joué et la salle était pleine. J’y étais. Une chance. Popeck le roi de l’élégance dans son costume trois pièces et ses chaussures blanches. Il en a du style. À 76 ans.

76 ans et plus de 40 ans de carrière. Has been ?

Quand il a démarré dans les cabarets, ça se bousculait moins à l’entrée. Aujourd’hui, la télévision s’y est mise. Il y a tellement de nouvelles têtes qu’on ne sait plus à quel comique se vouer. "Comique", encore faut-il qu’ils nous fassent marrer. L’émission, qui justement se pose cette question, fait un carton. Elle fabrique à la semaine les nouveaux "show, surtout, men" qui viendront enfler les théâtres de Paris et le festival d’Avignon. Même les animateurs de radio explosent en tournée. Nous aurons bientôt droit aux journalistes du JT présentant leur spectacle comique sur les faits d’actualité. 30 Représentations exceptionnelles à la Comédie des Champs-Élysées.

Après "juste pour rire", on aura juste le droit de pleurer…

Avant, il y a 40 ans à peu près… Popeck démarrait. Le public venait pour passer une bonne soirée sans trop savoir à quelle sauce "humoristique" il serait mangé. Il riait ou pas. Se retournait ou pas. Applaudissait ou pas. Donnait ou pas. Et le comédien continuait. Ou pas. Popeck a continué. Pourtant ce n’est pas au métier "d’humoriste" qu’il se destinait. Il voulait être un comédien. Simplement. Et son humour, sa poésie ont pris les devants. C’est ainsi et c’est bien aussi.

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Aujourd’hui, on parle audience, rentabilité. Les théâtres enchaînent les spectacles, comptant d’abord leurs billets, avant de s’intéresser au sujet.

Ainsi va le monde, ainsi va la vie. Popeck l’a bien compris et il fait avec. Il n’est ni lassé, ni aigri. Il aime jouer la comédie. Il chante, il rit. Il est émouvant parfois, tordant le plus souvent.

Il parle de son métier, des rencontres qu’il a faites, de ses petites curiosités et pousse la chansonnette.

Il assure un spectacle de 90 minutes, sans entracte ou pause démesurée. Il ne se moque pas de son public, porte un micro casque et, bien qu’il y soit un peu "allergique", avoue grandement que "pour garder sa voix, sur la durée, c’est bien pratique."

"Sur la durée" il a dit. Oui. 40 ans de carrière. On peut le dire ou l’écrire. Il a duré. Il a une longue carrière, en effet. Il a prouvé qu’il avait du talent et un certain savoir-faire. Il a "surfé" sur les années. Il a donné. Il a "mouillé la chemise", il a assuré. Il a traversé des décennies. Quoiqu’on en dise.

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Popeck, un soir de février, s’est donné la peine de jouer. Un public très attentif l’attendait et l’a applaudi comme il le méritait. Des minutes et des minutes sans s’arrêter. Ah ! Ce qu’on a rigolé. Jamais de vulgarité, des bons mots, toujours bien placés.

On serait bien tous restés mais dans ce théâtre, il faut se dépêcher. Oui. Après il y a un autre spectacle. Je ne sais pas si lui aussi affichait complet.

Ce qu’il est gentil Popeck, c’est lui qui nous a demandé d’arrêter d’applaudir pour laisser la place aux artistes d’après. Il nous a remerciés. Les derniers claquements de mains se sont assagis, les lumières de la salle se sont rallumées, les applaudissements ont cessé. On n’allait pas désobéir à un grand artiste aux 40 ans de métier.

"On est pas des sauvages tout de même !"

"C'est la dernière fois !"

De et par Popeck.

Reprise du 1er mars au 14 avril 2013.
(A été joué au Théâtre Daunou de mi-octobre 2012 à mi-février 2013).
Vendredi et samedi à 19 h, dimanche à 15 h 30.
Théâtre de l'Archipel, salle 1 (bleue), Paris 10e, 01 48 00 04 05.
>> larchipel.net

Isabelle Lauriou
Vendredi 22 Février 2013
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