© DR.
Soliste mondialement reconnu, fondateur de plusieurs festivals comme le Festival de Pâques de Deauville (avec Renaud Capuçon, Jérôme Ducros et quelques autres) ou "Les Vacances de Monsieur Haydn" à La Roche-Posay, Jérôme Pernoo incarne le type même de l'artiste généreux et accessible. La gloire n'intéresse guère ce passionné de musique de chambre, érudit, grand amateur de philosophie et de littérature. Car il réfléchit depuis longtemps à renouveler en profondeur le modèle du concert classique.
Il nous reçoit dans le petit palais néo-renaissance du 29 avenue de Villiers (prêté par la mairie) où il campe avec son équipe (très réduite) pour faire tourner le Centre de Musique de Chambre qu'il vient de créer. L'ancien conservatoire du XVIIe arrondissement a été vendu et, en avril, il faudra trouver d'autres "bureaux". Si la question n'était pas résolue le jour de l'interview (le 28 janvier, NDLR), ne croyez pas cependant qu'elle l'obsède. Dans un grand éclat de rire, Jérôme Pernoo me signifie qu'il doit en régler de plus urgentes.
Christine Ducq - En quoi votre centre est-il différent ?
Jérôme Pernoo - La musique de chambre me tient à cœur. Dans le Centre de Musique de Chambre de Paris (1), les mots d'ordre sont partage de la musique et convivialité. Le public, les musiciens, les compositeurs se retrouvent pour boire, manger, parler et faire de la musique. J'ai eu la chance de bénéficier d'une solide éducation musicale dans ma famille et de connaître tous ces compositeurs admirables comme Mozart, Beethoven ou de plus contemporains. Je veux offrir cela à mon tour au public.
J'ai très vite compris que leurs œuvres ne sont pas faites pour être appréciées par des spécialistes… mais par tout le monde. Nous nous approprions une œuvre d'art par la sensibilité, l'intelligence et l'émotion. En ce qui concerne la musique, nous pouvons l'apprécier et la comprendre par le biais d'une écoute renouvelée. Et en saisir à chaque fois un nouvel aspect et un autre niveau. Proust en parle merveilleusement bien quand il réfléchit à la relation entre la mémoire et la musique. Mon credo est donc que nous pouvons tous aimer la musique dite savante - il faut être savant pour l'écrire, non pour l'écouter.
Il nous reçoit dans le petit palais néo-renaissance du 29 avenue de Villiers (prêté par la mairie) où il campe avec son équipe (très réduite) pour faire tourner le Centre de Musique de Chambre qu'il vient de créer. L'ancien conservatoire du XVIIe arrondissement a été vendu et, en avril, il faudra trouver d'autres "bureaux". Si la question n'était pas résolue le jour de l'interview (le 28 janvier, NDLR), ne croyez pas cependant qu'elle l'obsède. Dans un grand éclat de rire, Jérôme Pernoo me signifie qu'il doit en régler de plus urgentes.
Christine Ducq - En quoi votre centre est-il différent ?
Jérôme Pernoo - La musique de chambre me tient à cœur. Dans le Centre de Musique de Chambre de Paris (1), les mots d'ordre sont partage de la musique et convivialité. Le public, les musiciens, les compositeurs se retrouvent pour boire, manger, parler et faire de la musique. J'ai eu la chance de bénéficier d'une solide éducation musicale dans ma famille et de connaître tous ces compositeurs admirables comme Mozart, Beethoven ou de plus contemporains. Je veux offrir cela à mon tour au public.
J'ai très vite compris que leurs œuvres ne sont pas faites pour être appréciées par des spécialistes… mais par tout le monde. Nous nous approprions une œuvre d'art par la sensibilité, l'intelligence et l'émotion. En ce qui concerne la musique, nous pouvons l'apprécier et la comprendre par le biais d'une écoute renouvelée. Et en saisir à chaque fois un nouvel aspect et un autre niveau. Proust en parle merveilleusement bien quand il réfléchit à la relation entre la mémoire et la musique. Mon credo est donc que nous pouvons tous aimer la musique dite savante - il faut être savant pour l'écrire, non pour l'écouter.
Jérôme Pernoo © DR.
Donc vous avez réfléchi à la possibilité de rendre possible ces écoutes répétées d'une même œuvre ?
Jérôme Pernoo - La question de la récurrence est en effet celle à laquelle nous avons tenté de répondre. Pour cela, nous donnons le même programme pendant trois semaines. Qui a aimé une œuvre peut - pour un prix modique - venir la réécouter à sa guise. Avec un abonnement annuel on peut assister à soixante-dix concerts pour cent euros. Le public peut également prendre une carte moins chère pour quelques soirées. L'argent ne doit pas être un problème. Revenir c'est aussi l'occasion de constater que les musiciens sont bien vivants sur scène et qu'ils ne jouent jamais deux fois de la même façon. Ils partagent des émotions entre eux et avec la salle, leurs mouvements sont beaux.
Les formats de concerts ont été pensés en fonction des œuvres du répertoire de chambre. Or elles durent entre trente, quarante minutes ou une heure.
La musique de chambre permet de surcroît une réelle intimité.
Jérôme Pernoo - Absolument. Nous jouons dans cette très belle Salle Cortot (2) à l'acoustique extraordinaire, et où chaque spectateur est très près de la scène. C'est donc une très belle expérience qui ne peut être reproduite dans une grande salle ou à l'enregistrement.
Vous avez choisi Schubert pour ce mois de février, n'est-ce pas ?
Jérôme Pernoo - Oui. La troupe joue "La Truite" du jeudi au samedi. Le centre propose deux concerts chaque soir. Le premier à 20 heures est conçu pour durer une demi-heure environ. On peut donc y aller sur un coup de tête - nul besoin de réserver chez nous. Ensuite le public est invité à partager de délicieux plats en compagnie des musiciens - sinon il peut partir s'il a d'autres projets. En tout cas cette convivialité est au cœur de l'histoire que je voulais porter.
Un deuxième concert - différent - commence à vingt et une heures trente et ce, pour une durée d'une heure. Là encore on peut venir sur un coup de tête. Ce mois-ci, la troupe joue le quinzième quatuor de Beethoven.
Entre ces deux rendez-vous, je propose une petite surprise. J'ai appelé ce moment "Freshly composed". Ceux qui sont intéressés sont invités à se retrouver autour du piano pour découvrir une création interprétée par un jeune compositeur. S'ils sont séduits, ils peuvent ensuite participer à un financement participatif d'une nouvelle œuvre de ce compositeur pour l'année suivante. Il s'agit de placer le public en situation d'être à la fois mécène, programmateur et de participer à la vie du centre.
Jérôme Pernoo - La question de la récurrence est en effet celle à laquelle nous avons tenté de répondre. Pour cela, nous donnons le même programme pendant trois semaines. Qui a aimé une œuvre peut - pour un prix modique - venir la réécouter à sa guise. Avec un abonnement annuel on peut assister à soixante-dix concerts pour cent euros. Le public peut également prendre une carte moins chère pour quelques soirées. L'argent ne doit pas être un problème. Revenir c'est aussi l'occasion de constater que les musiciens sont bien vivants sur scène et qu'ils ne jouent jamais deux fois de la même façon. Ils partagent des émotions entre eux et avec la salle, leurs mouvements sont beaux.
Les formats de concerts ont été pensés en fonction des œuvres du répertoire de chambre. Or elles durent entre trente, quarante minutes ou une heure.
La musique de chambre permet de surcroît une réelle intimité.
Jérôme Pernoo - Absolument. Nous jouons dans cette très belle Salle Cortot (2) à l'acoustique extraordinaire, et où chaque spectateur est très près de la scène. C'est donc une très belle expérience qui ne peut être reproduite dans une grande salle ou à l'enregistrement.
Vous avez choisi Schubert pour ce mois de février, n'est-ce pas ?
Jérôme Pernoo - Oui. La troupe joue "La Truite" du jeudi au samedi. Le centre propose deux concerts chaque soir. Le premier à 20 heures est conçu pour durer une demi-heure environ. On peut donc y aller sur un coup de tête - nul besoin de réserver chez nous. Ensuite le public est invité à partager de délicieux plats en compagnie des musiciens - sinon il peut partir s'il a d'autres projets. En tout cas cette convivialité est au cœur de l'histoire que je voulais porter.
Un deuxième concert - différent - commence à vingt et une heures trente et ce, pour une durée d'une heure. Là encore on peut venir sur un coup de tête. Ce mois-ci, la troupe joue le quinzième quatuor de Beethoven.
Entre ces deux rendez-vous, je propose une petite surprise. J'ai appelé ce moment "Freshly composed". Ceux qui sont intéressés sont invités à se retrouver autour du piano pour découvrir une création interprétée par un jeune compositeur. S'ils sont séduits, ils peuvent ensuite participer à un financement participatif d'une nouvelle œuvre de ce compositeur pour l'année suivante. Il s'agit de placer le public en situation d'être à la fois mécène, programmateur et de participer à la vie du centre.
Souvenir de Florence © Émilie Fontes.
Vous proposez aussi au public de chanter ?
Jérôme Pernoo - Oui, un dimanche par mois, le public est invité à un "Bach and Breakfast". Après un solide petit-déjeuner - toujours la convivialité - un professeur de chant lui enseigne le choral du jour. Ensuite l'orchestre joue une cantate et ce choral chanté ensemble en constitue le final. J'ai été stupéfait de la qualité de ce chant - nul besoin de savoir lire la musique !
Le succès est-il au rendez-vous après deux mois de fonctionnement ?
Jérôme Pernoo - Le succès est énorme ! Il est unique de proposer, comme nous l'avons fait, "La Nuit transfigurée" de Schönberg avec de jeunes musiciens inconnus tout juste sortis du conservatoire et d'engranger mille entrées. Je tiens d'ailleurs à n'engager que de jeunes artistes car ils ont besoin de jouer alors qu'ils sont au sommet de leur art et de la maîtrise de leur instrument.
Nous avons eu encore plus de succès avec les trios de Schubert. Nous avons gagné notre pari puisque depuis le début de la saison nous avons fait plus de quatre mille entrées. Pour le musicien que je suis, vivre cette magnifique aventure est la réalisation d'un rêve que je portais depuis plus de vingt ans. Et elle répond à un questionnement intime : quelle est la place du musicien dans la cité ? Quelle est son utilité ? Qui sert-il ?
En tant que musicien, je suis là pour transmettre les œuvres et établir une vraie relation avec le public. Comme soliste, nous voyageons à travers le monde mais, dans cette course au succès, je me suis toujours senti frustré par le manque de pérennité d'un contact sincère avec mon public. Avec le centre, c'est tout le contraire, je le rencontre chaque jour et j'ai une vraie proposition artistique à lui offrir. J'en suis vraiment heureux. Nous sommes en discussion avec la Ferme du Buisson et la MC93 de Bobigny pour l'avenir.
Notes :
(1) Les concerts sont donnés Salle Cortot.
(2) Elle dispose de quatre cents places.
Jérôme Pernoo - Oui, un dimanche par mois, le public est invité à un "Bach and Breakfast". Après un solide petit-déjeuner - toujours la convivialité - un professeur de chant lui enseigne le choral du jour. Ensuite l'orchestre joue une cantate et ce choral chanté ensemble en constitue le final. J'ai été stupéfait de la qualité de ce chant - nul besoin de savoir lire la musique !
Le succès est-il au rendez-vous après deux mois de fonctionnement ?
Jérôme Pernoo - Le succès est énorme ! Il est unique de proposer, comme nous l'avons fait, "La Nuit transfigurée" de Schönberg avec de jeunes musiciens inconnus tout juste sortis du conservatoire et d'engranger mille entrées. Je tiens d'ailleurs à n'engager que de jeunes artistes car ils ont besoin de jouer alors qu'ils sont au sommet de leur art et de la maîtrise de leur instrument.
Nous avons eu encore plus de succès avec les trios de Schubert. Nous avons gagné notre pari puisque depuis le début de la saison nous avons fait plus de quatre mille entrées. Pour le musicien que je suis, vivre cette magnifique aventure est la réalisation d'un rêve que je portais depuis plus de vingt ans. Et elle répond à un questionnement intime : quelle est la place du musicien dans la cité ? Quelle est son utilité ? Qui sert-il ?
En tant que musicien, je suis là pour transmettre les œuvres et établir une vraie relation avec le public. Comme soliste, nous voyageons à travers le monde mais, dans cette course au succès, je me suis toujours senti frustré par le manque de pérennité d'un contact sincère avec mon public. Avec le centre, c'est tout le contraire, je le rencontre chaque jour et j'ai une vraie proposition artistique à lui offrir. J'en suis vraiment heureux. Nous sommes en discussion avec la Ferme du Buisson et la MC93 de Bobigny pour l'avenir.
Notes :
(1) Les concerts sont donnés Salle Cortot.
(2) Elle dispose de quatre cents places.
Salle Cortot, 78, rue Cardinet Paris 17e.
Tél. : 01 47 63 47 48.
>> centredemusiquedechambre.paris
Du 4 au 20 février 2016
Du jeudi au samedi à 20 h.
15e Quatuor à cordes de Ludwig Van Beethoven.
Quatuor Arod.
Du 4 au 20 février 2016
Du jeudi au samedi à 21 h 30.
"La Truite" de Franz Schubert.
Florian Hille, baryton.
Liya Patrova, violon.
Léa Hennino, alto.
Adrien Bellom, violoncelle.
Jérôme Pernoo, violoncelle.
Jean-Edouard Carlier, contrebasse.
Yedam Kim, piano.
Le dimanche 13 mars 2016 à 10 h 30.
"Bach and Breakfast".
Cantate BWV 4.
Du 10 au 25 mars 2016 à 20 h.
Quintette avec clarinette de W. A. Mozart.
Raphaël Sévère, clarinette.
Quatuor Ardeo.
Du 10 au 25 mars 2016 à 21 h 30.
Bœuf de Chambre.
Jérôme Pernoo, direction musicale.
Tél. : 01 47 63 47 48.
>> centredemusiquedechambre.paris
Du 4 au 20 février 2016
Du jeudi au samedi à 20 h.
15e Quatuor à cordes de Ludwig Van Beethoven.
Quatuor Arod.
Du 4 au 20 février 2016
Du jeudi au samedi à 21 h 30.
"La Truite" de Franz Schubert.
Florian Hille, baryton.
Liya Patrova, violon.
Léa Hennino, alto.
Adrien Bellom, violoncelle.
Jérôme Pernoo, violoncelle.
Jean-Edouard Carlier, contrebasse.
Yedam Kim, piano.
Le dimanche 13 mars 2016 à 10 h 30.
"Bach and Breakfast".
Cantate BWV 4.
Du 10 au 25 mars 2016 à 20 h.
Quintette avec clarinette de W. A. Mozart.
Raphaël Sévère, clarinette.
Quatuor Ardeo.
Du 10 au 25 mars 2016 à 21 h 30.
Bœuf de Chambre.
Jérôme Pernoo, direction musicale.