© Pierre Planchenault.
Mais qu'a-t-elle grand Diable de si maléfique en soi cette vulve honnie au point de disparaître encore en 1972 (cf. sonde spatiale Pioneer de la Nasa) de la représentation d'un homme (muni d'un sexe éloquent) et d'une femme (sans rien à montrer) gravés sur une plaque en aluminium à destination des extraterrestres ? Serait-ce parce que des détenteurs d'un savoir officiel (religieux, médecins, philosophes ; par hasard tous de sexe masculin…) l'ont stigmatisé en règle, cet organe féminin externe, en développant à son égard un rejet tel que les rapports entre hommes et femmes en sont profondément contaminés ?
Et c'est là qu'entrent en jeu les trublions contemporains de cette jeune génération d'artistes n'ayant pas froid aux yeux. S'emparant à bras le corps du sujet maudit, dans un flux ininterrompu de complicités ludiques (d'emblée l'actrice butant savoureusement sur l'interdit du mot sexe) et de danses endiablées, ils redonnent vie à ces risibles imposteurs au service d'eux-mêmes, et du patriarcat auquel ils doivent leur situation de dominant. Parmi eux, le célèbre docteur John Harvey Kellogg (incarné avec son paquet en mains) qui, en plus des cornflakes dont il est l'illustre inventeur, avait pour passe-temps favori l'étude obsessionnelle du sexe féminin à protéger… des femmes elles-mêmes, tentées d'y toucher inopinément.
Et c'est là qu'entrent en jeu les trublions contemporains de cette jeune génération d'artistes n'ayant pas froid aux yeux. S'emparant à bras le corps du sujet maudit, dans un flux ininterrompu de complicités ludiques (d'emblée l'actrice butant savoureusement sur l'interdit du mot sexe) et de danses endiablées, ils redonnent vie à ces risibles imposteurs au service d'eux-mêmes, et du patriarcat auquel ils doivent leur situation de dominant. Parmi eux, le célèbre docteur John Harvey Kellogg (incarné avec son paquet en mains) qui, en plus des cornflakes dont il est l'illustre inventeur, avait pour passe-temps favori l'étude obsessionnelle du sexe féminin à protéger… des femmes elles-mêmes, tentées d'y toucher inopinément.
© Pierre Planchenault.
L'onanisme féminin étant, selon cet éminent savant, la cause de toutes les déficiences mentales et physiques, il n'eut de cesse de vouloir préserver la gent féminine de son penchant diablement nuisible. Ses efforts aboutirent à la prescription d'un remède d'une efficacité reconnue : une application d'acide phénique pur sur le clitoris… L'homme de science mourut en 1943. Bien lui en a pris. Cela lui a évité d'entendre l'un des slogans des féministes de 2022 contre les violences sexistes : "Ne me touche pas ! Je m'en charge…".
D'autres tableaux tout aussi haut en couleur s'enchaînent. Ainsi le prêche d'un apôtre de la Sainte Église catholique, apostolique et romaine, le dénommé Saint-Augustin (magnifié par sa cape théologique) qui, après avoir confessé avoir pratiqué le sexe dans sa folle jeunesse, renoue avec la fable du péché originel élisant le sexe féminin comme lieu de la dépravation suprême. Sexe marque du diable affectionnant la succion de l'excroissance clitoridienne dans la satanée liturgie des "in-femmes" tentatrices, à la différence des fidèles avalant elles l'hostie consacrée avec la dévotion requise. Pas étonnant alors que la chasse aux sorcières ait conduit au bûcher nombre de ces impies, dotées d'une "mamelle" entre les cuisses, et ce, dans un but de pure prophylaxie chrétienne. Amen.
D'autres tableaux tout aussi haut en couleur s'enchaînent. Ainsi le prêche d'un apôtre de la Sainte Église catholique, apostolique et romaine, le dénommé Saint-Augustin (magnifié par sa cape théologique) qui, après avoir confessé avoir pratiqué le sexe dans sa folle jeunesse, renoue avec la fable du péché originel élisant le sexe féminin comme lieu de la dépravation suprême. Sexe marque du diable affectionnant la succion de l'excroissance clitoridienne dans la satanée liturgie des "in-femmes" tentatrices, à la différence des fidèles avalant elles l'hostie consacrée avec la dévotion requise. Pas étonnant alors que la chasse aux sorcières ait conduit au bûcher nombre de ces impies, dotées d'une "mamelle" entre les cuisses, et ce, dans un but de pure prophylaxie chrétienne. Amen.
© Pierre Planchenault.
Après le temps des Religions, vient le temps des Lumières. Changement de discours, mais effets similaires. La femme n'est certes plus un épigone de Satan, mais devient éduquée et instruite, un être "idéal" sans désirs sexuels... Et que penser de l'axiome de la binarité des sexes (scène d'anthologie de la fabrique du genre sur des poupées castrées à la chaîne) eu égard au cas de la Reine Christine de Suède, dont le tombeau fut ouvert en 1965 pour statuer sur son intersexuation, sa nature de pseudo-hermaphrodite ? Et du cas de la Princesse Marie Bonaparte, jugée elle frigide par le père de la psychanalyse, Sigmund Freud (cigare à la bouche), sous prétexte qu'elle n'atteignait pas l'orgasme vaginal lors des pénétrations assurées par le prince Georges de Grèce et du Danemark en personne… alors que l'orgasme clitoridien qu'elle se procurait par ses propres moyens lui apportait tout le plaisir souhaité ?
La scène reconstituant en direct le dialogue entre la susmentionnée Princesse, faussement effarée, et son Georges de Prince, imperturbable, relève d'un humour désopilant, l'un des points d'orgue de cette représentation qui ne manque jamais d'esprit facétieux pour faire rire des postures mâles consternantes. À l'égale de celle mettant en scène le père de l'existentialisme, Jean-Paul Sartre (regard divergent chaussé d'épaisses lunettes et pipe à la bouche), assurant dans "L'être et le néant" la nature "trouée" de la femme qui "de par la configuration de son sexe physiologique appelle une chair étrangère, la transformant en plénitude d'être par pénétration et dilution".
La scène reconstituant en direct le dialogue entre la susmentionnée Princesse, faussement effarée, et son Georges de Prince, imperturbable, relève d'un humour désopilant, l'un des points d'orgue de cette représentation qui ne manque jamais d'esprit facétieux pour faire rire des postures mâles consternantes. À l'égale de celle mettant en scène le père de l'existentialisme, Jean-Paul Sartre (regard divergent chaussé d'épaisses lunettes et pipe à la bouche), assurant dans "L'être et le néant" la nature "trouée" de la femme qui "de par la configuration de son sexe physiologique appelle une chair étrangère, la transformant en plénitude d'être par pénétration et dilution".
© Pierre Planchenault.
Est-ce à dire que toutes ces perles, enfilées avec l'assurance tranquille d'hommes bénéficiant de l'infaillibilité masculine, représentent l'ensemble des représentations du sexe féminin ? Que nenni, l'exception étant toujours là pour confirmer la règle… Sont projetées sur grand écran les statuettes de déesses grecques et égyptiennes exhibant fièrement leur vulve ou, plus près de nous, à Poitiers, ornant les colonnes médiévales d'un couvent, les sculptures de vulves offertes généreusement au toucher des passant(e)s. Et pour rappeler les mystères d'Éleusis où les femmes réunies dans le temple de Déméter se montraient joyeusement leurs parties intimes en dégustant des gâteaux en forme de vulve, les officiant(e)s distribuent au public, mis en appétit, des "vulvettes" à déguster sur place.
Alors pourquoi donc la vulve fut-elle ostracisée, pour ne pas dire frappée d'interdit, jusqu'à refuser de la nommer ? Peut-être parce que, située stratégiquement au cœur du plaisir sexuel féminin, elle détrône l'homme de ses pouvoirs fantasmés, magnifiant l'autonomie de la femme jusque dans sa jouissance, et lui rendant ainsi un statut d'égalité qui lui avait été dérobé. Un dernier épisode traitera - sur le même ton allègre - des représentations des menstruations dans l'imaginaire collectif, représentations une fois de plus ancrées "à l'encre rouge" par les stigmatisations de la culture patriarcale.
Alors pourquoi donc la vulve fut-elle ostracisée, pour ne pas dire frappée d'interdit, jusqu'à refuser de la nommer ? Peut-être parce que, située stratégiquement au cœur du plaisir sexuel féminin, elle détrône l'homme de ses pouvoirs fantasmés, magnifiant l'autonomie de la femme jusque dans sa jouissance, et lui rendant ainsi un statut d'égalité qui lui avait été dérobé. Un dernier épisode traitera - sur le même ton allègre - des représentations des menstruations dans l'imaginaire collectif, représentations une fois de plus ancrées "à l'encre rouge" par les stigmatisations de la culture patriarcale.
© Pierre Planchenault.
Ce qui ressort de cette immersion flamboyante dans le royaume des organes intimes féminins, c'est le plaisir libérateur d'être invité à la décapitation d'incongruités sur un plateau de théâtre en liesse. Être ainsi les témoins privilégiés de scènes dévoilant les mille et une vertus du sexe "difemmmé" a forte valeur pédagogique. Une leçon culte d'éducation sexuelle enjouée à partager joyeusement en famille comme l'on dit des productions grand public.
Spectacle vu le vendredi 2 décembre 2022 au Studio de création du TnBA à Bordeaux.
Spectacle vu le vendredi 2 décembre 2022 au Studio de création du TnBA à Bordeaux.
"L'origine du monde"
© Pierre Planchenault.
Librement inspirée de la bande dessinée éponyme de Liv Strömquist, publié en français chez Rackham éditions.
Adaptation et mise en scène : Claire-Aurore Bartolo/Compagnie Il fait belle.
Assistant à la mise en scène : Rémi Fransot.
Avec : Mathéo Chalvignac, Margot Delabouglise, Barthélémy Maymat-Pellicane, Danaé Monnot, Ariane Pelluet.
Lumières : Véronique Galindo.
Son : Léon Blomme.
Régie générale : Pierre Martigne.
Plateau : Margot Vincent.
Durée : 1 h.
Production Théâtre national de Bordeaux Aquitaine.
Projet accompagné par l’éstba dans le cadre du dispositif Culture Pro 2022 du ministère de la Culture.
Du 1er au 10 décembre 2022.
Du mardi au vendredi à 20 h, samedi à 14 h 30 et 19 h.
TnBA, Studio de création, Bordeaux, 05 56 33 36 80.
>> tnba.org
Adaptation et mise en scène : Claire-Aurore Bartolo/Compagnie Il fait belle.
Assistant à la mise en scène : Rémi Fransot.
Avec : Mathéo Chalvignac, Margot Delabouglise, Barthélémy Maymat-Pellicane, Danaé Monnot, Ariane Pelluet.
Lumières : Véronique Galindo.
Son : Léon Blomme.
Régie générale : Pierre Martigne.
Plateau : Margot Vincent.
Durée : 1 h.
Production Théâtre national de Bordeaux Aquitaine.
Projet accompagné par l’éstba dans le cadre du dispositif Culture Pro 2022 du ministère de la Culture.
Du 1er au 10 décembre 2022.
Du mardi au vendredi à 20 h, samedi à 14 h 30 et 19 h.
TnBA, Studio de création, Bordeaux, 05 56 33 36 80.
>> tnba.org