© Festival Radio France.
L'histoire de "Kassya", opéra inachevé par le compositeur de "Lakmé" disparu deux ans avant sa création à l'Opéra Comique dans une version orchestrée par Massenet, est celle d'une série de rendez-vous manqués. C'est celle d'un concours effarant de circonstances défavorables ayant abouti à l'effacement d'une œuvre maudite, que le Festival Radio France contribue à faire redécouvrir au public d'aujourd'hui.
Et maudite, "Kassya" semble l'avoir été dès sa genèse. Après le triomphe international de "Lakmé" en 1883, Léo Delibes est un compositeur célèbre, très occupé, et qui ne songe qu'en 1885 à donner un autre succès à l'Opéra comique. Il récolte l'été suivant un matériau musical non négligeable au cours d'un voyage officiel effectué en Hongrie. Ces thèmes du folklore populaire d'Europe centrale ne contribueront pas peu au charme de la partition telle qu'on a pu la découvrir au Corum de Montpellier. L'incendie tragique de l'Opéra Comique le vingt-cinq mai 1887 interdit toute possibilité de la création de l'œuvre, prévue pour la saison 1887-1888. Découragés, Delibes et ses librettistes tardent à la terminer.
Malheur supplémentaire, la santé de Léo Delibes se dégrade dès 1886 et il n'achèvera la version chant-piano qu'en juin 1890. Le compositeur meurt brusquement en janvier 1891 à l'âge de cinquante quatre ans, n'ayant que partiellement orchestré son opéra comique (avec ses airs et ses dialogues parlés) mettant en scène, dans les montagnes des Carpathes, les amours contrariées de l'ambitieuse bohémienne Kassya et de Cyrille, un paysan à qui elle préfère le terrible et cruel Comte de Zévale. L'exotisme est une garantie de succès auprès du public de la Troisième République des années quatre-vingt. Mais cinq ans plus tard, tout a changé.
Et maudite, "Kassya" semble l'avoir été dès sa genèse. Après le triomphe international de "Lakmé" en 1883, Léo Delibes est un compositeur célèbre, très occupé, et qui ne songe qu'en 1885 à donner un autre succès à l'Opéra comique. Il récolte l'été suivant un matériau musical non négligeable au cours d'un voyage officiel effectué en Hongrie. Ces thèmes du folklore populaire d'Europe centrale ne contribueront pas peu au charme de la partition telle qu'on a pu la découvrir au Corum de Montpellier. L'incendie tragique de l'Opéra Comique le vingt-cinq mai 1887 interdit toute possibilité de la création de l'œuvre, prévue pour la saison 1887-1888. Découragés, Delibes et ses librettistes tardent à la terminer.
Malheur supplémentaire, la santé de Léo Delibes se dégrade dès 1886 et il n'achèvera la version chant-piano qu'en juin 1890. Le compositeur meurt brusquement en janvier 1891 à l'âge de cinquante quatre ans, n'ayant que partiellement orchestré son opéra comique (avec ses airs et ses dialogues parlés) mettant en scène, dans les montagnes des Carpathes, les amours contrariées de l'ambitieuse bohémienne Kassya et de Cyrille, un paysan à qui elle préfère le terrible et cruel Comte de Zévale. L'exotisme est une garantie de succès auprès du public de la Troisième République des années quatre-vingt. Mais cinq ans plus tard, tout a changé.
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En mars 1893, Léon Carvalho, redevenu directeur de l'Opéra Comique, met en scène cette "Kassya" dans une version que le grand Massenet a entièrement revue. S'il se peut que Delibes ait pu orchestrer le premier et une partie du deuxième acte, Massenet a, quant à lui, transformé l'opéra comique en un drame lyrique (avec récitatifs) davantage dans l'air du temps (et donc orchestré les trois autres actes). Ce n'est pas un des moindres plaisirs offerts par cette "Kassya" que de chercher dans la partition ce qui procède de l'art charmant de l'un (Delibes) et du riche métier de l'autre (Massenet).
L'opéra en 1893, à la scénographie démodée, mal défendu par certains chanteurs, ne tiendra l'affiche que huit soirées pour disparaître dans les limbes du temps - jusqu'à son exhumation au festival. Non seulement le séisme wagnérien est passé par là mais les critiques de l‘époque n'ont pas eu de mots assez durs pour une œuvre qu'ils trouvent datée - avec ses nombreux numéros, ensembles et chœurs sans réelle fonction dramatique, son livret naïf et son pittoresque qui a vécu, selon eux. Plus d'un siècle après, donné au festival dans une version de concert réduite à quatre actes pour deux heures et demie de spectacle, l'opéra retrouve pourtant son charme et ses belles couleurs natives.
L'opéra en 1893, à la scénographie démodée, mal défendu par certains chanteurs, ne tiendra l'affiche que huit soirées pour disparaître dans les limbes du temps - jusqu'à son exhumation au festival. Non seulement le séisme wagnérien est passé par là mais les critiques de l‘époque n'ont pas eu de mots assez durs pour une œuvre qu'ils trouvent datée - avec ses nombreux numéros, ensembles et chœurs sans réelle fonction dramatique, son livret naïf et son pittoresque qui a vécu, selon eux. Plus d'un siècle après, donné au festival dans une version de concert réduite à quatre actes pour deux heures et demie de spectacle, l'opéra retrouve pourtant son charme et ses belles couleurs natives.
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La partition se révèle ainsi souvent superbe avec ses belles mélodies, sa fraîcheur et sa grâce, et son orchestration aux effets dramatiques efficaces ou au lyrisme passionné. Les Chœurs de la Radio Lettone et de Montpellier, et l'orchestre se révèlent magnifiques sous la baguette de leur directeur musical, Michael Schonwandt. Ce dernier dessine énergiquement mais non sans subtilité duos amoureux, climats contrastés et antagonismes douloureux en de très belles pages symphoniques, qui culminent avec génie dans les musiques de ballets du quatrième acte. Et, ce faisant, nous rappelle en une extraordinaire séquence que Léo Delibes a donné ses lettres de noblesse à la musique de ballet.
S'il est vrai que certaines scènes se révèlent plus faibles, sans enjeu réellement dramaturgique (à l'acte deux), la plupart déroulent avec brio le double conflit d'une héroïne qui évoque parfois Carmen - sans doute grâce à Henri Meilhac, l'un des deux librettistes. Femme fatale et manipulatrice, elle est incarnée par Véronique Gens, dont la tessiture de soprano falcon (entre soprano et mezzo) va comme un gant à cette ingrate qui préfère les bijoux et le titre de comtesse à l'amour sincère d'un paysan. Elle est une Kassya de grande classe - malgré un manque de rondeur dans les aigus.
S'il est vrai que certaines scènes se révèlent plus faibles, sans enjeu réellement dramaturgique (à l'acte deux), la plupart déroulent avec brio le double conflit d'une héroïne qui évoque parfois Carmen - sans doute grâce à Henri Meilhac, l'un des deux librettistes. Femme fatale et manipulatrice, elle est incarnée par Véronique Gens, dont la tessiture de soprano falcon (entre soprano et mezzo) va comme un gant à cette ingrate qui préfère les bijoux et le titre de comtesse à l'amour sincère d'un paysan. Elle est une Kassya de grande classe - malgré un manque de rondeur dans les aigus.
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Les deux personnages masculins qui se disputent ses faveurs sont défendus par deux de nos meilleurs chanteurs actuels. Cyrille Dubois est un Cyrille (le paysan) qui nous enchante à son habitude. L'art du récit, la délicatesse des sonorités au spectre large, l'élégance du phrasé et sa vocalité sensuelle font de chacune de ses interventions une fête qui suspend le temps et nous soustrait à nos tourments.
Dans le rôle du terrible Comte de Zévale, Alexandre Duhamel est son exact opposé mais non moins délectable. Le baryton sait donner une intensité effrayante à son personnage. Son timbre de bronze et la versatilité parfaite de son intonation en font un méchant d'anthologie. Grâce à lui, on se souvient que le livret est lointainement inspiré d'un roman de Sacher-Masoch.
Le reste de la distribution montre une belle homogénéité. Citons Anne-Catherine Gillet, une idéale jeune première, et la mezzo Nora Gubisch qui marque durablement la soirée avec sa bohémienne pittoresque. Elle est une diseuse d'aventures provocante au chant corsé, qui vole la vedette à une excellente troupe - malgré la brièveté de son rôle. On regrette vraiment que son personnage ne réapparaisse pas après l'entracte. Les seconds rôles masculins nous rappellent aussi qu'aucun opéra ne saurait être réussi sans le concours de leur talent.
Dans le rôle du terrible Comte de Zévale, Alexandre Duhamel est son exact opposé mais non moins délectable. Le baryton sait donner une intensité effrayante à son personnage. Son timbre de bronze et la versatilité parfaite de son intonation en font un méchant d'anthologie. Grâce à lui, on se souvient que le livret est lointainement inspiré d'un roman de Sacher-Masoch.
Le reste de la distribution montre une belle homogénéité. Citons Anne-Catherine Gillet, une idéale jeune première, et la mezzo Nora Gubisch qui marque durablement la soirée avec sa bohémienne pittoresque. Elle est une diseuse d'aventures provocante au chant corsé, qui vole la vedette à une excellente troupe - malgré la brièveté de son rôle. On regrette vraiment que son personnage ne réapparaisse pas après l'entracte. Les seconds rôles masculins nous rappellent aussi qu'aucun opéra ne saurait être réussi sans le concours de leur talent.
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Spectacle donné le 21 juillet 2018.
Disponible à l'écoute pendant plusieurs mois sur le site de France Musique.
"Kassya" (1893).
Opéra posthume en quatre actes achevé par Jules Massenet.
Musique de Léo Delibes (1836-1891).
Livret d'H. Meilhac et de P. Gille.
Version de concert.
Durée : 2 h 30 avec un entracte.
Véronique Gens, Kassya.
Cyrille Dubois, Cyrille.
Anne-Catherine Gillet, Sonia.
Nora Gubisch, Une Bohémienne.
Alexandre Duhamel, Le Comte de Zévale.
Renaud Delaigue, Kostska.
Jean-Gabriel Saint-Martin, Kolenati.
Rémy Mathieu, Mochkou.
Anas Seguin, Un sergent recruteur.
Luc Bertin-Hugault, Un Buveur, Un Vieillard, Premier Seigneur.
Chœur Opéra Montpellier Occitanie.
Noëlle Gény, cheffe de chœur.
Chœur de la Radio Lettone.
Sigvards Klava, chef de chœur.
Orchestre national Montpellier Occitanie.
Michael Schonwandt, direction.
Disponible à l'écoute pendant plusieurs mois sur le site de France Musique.
"Kassya" (1893).
Opéra posthume en quatre actes achevé par Jules Massenet.
Musique de Léo Delibes (1836-1891).
Livret d'H. Meilhac et de P. Gille.
Version de concert.
Durée : 2 h 30 avec un entracte.
Véronique Gens, Kassya.
Cyrille Dubois, Cyrille.
Anne-Catherine Gillet, Sonia.
Nora Gubisch, Une Bohémienne.
Alexandre Duhamel, Le Comte de Zévale.
Renaud Delaigue, Kostska.
Jean-Gabriel Saint-Martin, Kolenati.
Rémy Mathieu, Mochkou.
Anas Seguin, Un sergent recruteur.
Luc Bertin-Hugault, Un Buveur, Un Vieillard, Premier Seigneur.
Chœur Opéra Montpellier Occitanie.
Noëlle Gény, cheffe de chœur.
Chœur de la Radio Lettone.
Sigvards Klava, chef de chœur.
Orchestre national Montpellier Occitanie.
Michael Schonwandt, direction.