© SCAM.
L'affiche et le suffrage universel masculin sont tous deux enfants de la 2e moitié du XIXe siècle. L'affiche électorale, qui voit le jour, n'a jamais eu de prétention artistique : presque toujours typographique, imprimée sur du papier de dernière qualité, elle avait pour seul but de faire connaître aux électeurs le programme du candidat - et l'indigence du discours politique ne date pas d'aujourd'hui !
Dans cet océan de médiocrité, on peut cependant trouver quelques bijoux d'insolence non conformiste. Nous en avons réuni ici quelques-uns qui forment un ensemble assez réjouissant.
Nous proposons une promenade chronologique pour parcourir l'exposition.
Le plus ancien document - et probablement le plus décalé - est la profession de foi de Paulin Gagne pour les élections de 1869 : "J'aspire à devenir le décrotteur du monde". C'était un authentique fou littéraire (1).
Dans cet océan de médiocrité, on peut cependant trouver quelques bijoux d'insolence non conformiste. Nous en avons réuni ici quelques-uns qui forment un ensemble assez réjouissant.
Nous proposons une promenade chronologique pour parcourir l'exposition.
Le plus ancien document - et probablement le plus décalé - est la profession de foi de Paulin Gagne pour les élections de 1869 : "J'aspire à devenir le décrotteur du monde". C'était un authentique fou littéraire (1).
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Vient ensuite le formidable coup de pied au cul donné à Badinguet - alias Napoléon III - donné par les pères fondateurs de la IIIe République. Un humour féroce et ironique qui caractérise l'époque et qui devient à Montmartre délirant, insolent et ravageur. Tous les marginaux s'y retrouvent et choisissent rapidement, pour donner une large diffusion à leurs canulars, l'affiche politique. En tête, bien sûr, Rodolphe Salis, fondateur du Cabaret du Chat Noir, inventeur auto-proclamé de Montmartre.
Dans son programme loufoque on trouve, à y regarder de près, quelques propositions intéressantes.
Alphonse Allais - rédacteur en chef du magazine "Le Chat Noir" - ne se présente pas directement mais par l'entremise d'un de ses personnages "Le captain cap" (2). Son programme anti-européen et anti-bureaucratique laisse rêveur. Narcisse Lebeau (joli pseudonyme), chansonnier et ami proche d'Alphonse Allais se moque avec une ironie grinçante du népotisme politique.
Toujours battant le pavé montmartrois, on trouve d'autres farfelus qui ne sont pas passés à la postérité : Marius Rety et Léon Hayard proposent deux candidats pour le prix d'un ! Les deux compères étaient des piliers des cabarets montmartrois. Le second, roi des camelots, était un prolifique éditeur de la littérature de trottoir. On ne saura sans doute pratiquement jamais rien de Jean-Mangetout, vidangeur… sa proposition de scrutin par rue, si elle vise des personnalités en vue, est simplement incompréhensible.
Mais il n'y a pas à Montmartre que des candidatures bidon : le grand chansonnier Aristide Bruant (3), prolifique compositeur de chansons sur la misère et la pègre parisiennes y va pour de vrai et trousse son affiche en forme de chanson. Le père peinard (4), publication anarchiste, ne présente bien sûr pas de candidats mais profite cependant des périodes électorales pour imprimer de virulents pamphlets.
Dans son programme loufoque on trouve, à y regarder de près, quelques propositions intéressantes.
Alphonse Allais - rédacteur en chef du magazine "Le Chat Noir" - ne se présente pas directement mais par l'entremise d'un de ses personnages "Le captain cap" (2). Son programme anti-européen et anti-bureaucratique laisse rêveur. Narcisse Lebeau (joli pseudonyme), chansonnier et ami proche d'Alphonse Allais se moque avec une ironie grinçante du népotisme politique.
Toujours battant le pavé montmartrois, on trouve d'autres farfelus qui ne sont pas passés à la postérité : Marius Rety et Léon Hayard proposent deux candidats pour le prix d'un ! Les deux compères étaient des piliers des cabarets montmartrois. Le second, roi des camelots, était un prolifique éditeur de la littérature de trottoir. On ne saura sans doute pratiquement jamais rien de Jean-Mangetout, vidangeur… sa proposition de scrutin par rue, si elle vise des personnalités en vue, est simplement incompréhensible.
Mais il n'y a pas à Montmartre que des candidatures bidon : le grand chansonnier Aristide Bruant (3), prolifique compositeur de chansons sur la misère et la pègre parisiennes y va pour de vrai et trousse son affiche en forme de chanson. Le père peinard (4), publication anarchiste, ne présente bien sûr pas de candidats mais profite cependant des périodes électorales pour imprimer de virulents pamphlets.
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Enfin, pour clore cette avant-guerre, un dernier canular pataphysique (et un candidat qui ne s'est jamais présenté) : le père Ubu, en personne !
Avec la grande guerre, cette forme d'humour disparaît. Les surréalistes auraient sans doute pu prendre la relève s'ils n'avaient pas pris la politique au sérieux. De candidatures fantaisistes, fort peu - ce pourquoi, bien qu'il ne s'agisse que d'une affichette, nous avons tenu à rendre hommage à Ferdinand Lop, candidat à toutes les élections, qui fit la joie des étudiants au quartier latin.
Maurice de Rothschild, lui, ne plaisante pas et ose, avec son slogan "mon nom est mon programme", l'affiche sans doute la plus culottée jamais conçue. La IVe République s'enferme dans le ronron d'affiches anti-communistes, gaullistes (ou anti) jusqu'à ce que tout explose en mai 68 où une jeune génération retrouve la férocité des dessinateurs de "L'Assiette au beurre" à la fin du XIXe siècle.
Les couvertures de "Charlie Hebdo" conçues comme des affiches, sont effectivement placardées dans les kiosques. Reiser, Gébé, Cabu et toute l'équipe s'en donnent à cœur joie pour dénoncer une république podagre ! Le premier, pour le P.S. en Bretagne, Alain le Quernec met en garde contre Le Pen ; quant à la candidature de Coluche, elle ne fait pas rire du tout la classe politique !
Plus près de nous, Sarkozy, obsédé qu'il est par le pouvoir, alors que l'affiche militante se meurt, a singulièrement celui d'inspirer quelques réactions bien venues. Gaspard Delanoë, enfin, doit être remercié pour avoir osé faire une affiche, pour rire, dans une époque où on ne rit (presque) plus.
En réunissant ces quelques affiches, pour beaucoup de fantaisie, nous ne nous doutions pas qu'avec la campagne électorale qui s'ouvre la réalité avait des chances de dépasser la fiction !
Avec la grande guerre, cette forme d'humour disparaît. Les surréalistes auraient sans doute pu prendre la relève s'ils n'avaient pas pris la politique au sérieux. De candidatures fantaisistes, fort peu - ce pourquoi, bien qu'il ne s'agisse que d'une affichette, nous avons tenu à rendre hommage à Ferdinand Lop, candidat à toutes les élections, qui fit la joie des étudiants au quartier latin.
Maurice de Rothschild, lui, ne plaisante pas et ose, avec son slogan "mon nom est mon programme", l'affiche sans doute la plus culottée jamais conçue. La IVe République s'enferme dans le ronron d'affiches anti-communistes, gaullistes (ou anti) jusqu'à ce que tout explose en mai 68 où une jeune génération retrouve la férocité des dessinateurs de "L'Assiette au beurre" à la fin du XIXe siècle.
Les couvertures de "Charlie Hebdo" conçues comme des affiches, sont effectivement placardées dans les kiosques. Reiser, Gébé, Cabu et toute l'équipe s'en donnent à cœur joie pour dénoncer une république podagre ! Le premier, pour le P.S. en Bretagne, Alain le Quernec met en garde contre Le Pen ; quant à la candidature de Coluche, elle ne fait pas rire du tout la classe politique !
Plus près de nous, Sarkozy, obsédé qu'il est par le pouvoir, alors que l'affiche militante se meurt, a singulièrement celui d'inspirer quelques réactions bien venues. Gaspard Delanoë, enfin, doit être remercié pour avoir osé faire une affiche, pour rire, dans une époque où on ne rit (presque) plus.
En réunissant ces quelques affiches, pour beaucoup de fantaisie, nous ne nous doutions pas qu'avec la campagne électorale qui s'ouvre la réalité avait des chances de dépasser la fiction !
© SCAM.
Toutes les affiches proviennent de la collection d'Alain Weill à l'exception de celles portant une pastille rouge qui ont été prêtées par Guillaume Zorgbibe que nous remercions ici.
(1) André Blavier. "Les fous littéraires" p. 687 et suivantes. Hengri Veyrier. Paris - 1982.
(2) On peut se régaler à la lecture de "Le captain cap" d’Alphonse Allais réédité dans la collection 10/18.
(3) Avec l’âge, il vire à un populisme nauséabond. Il recueille 525 voix et se retire dans son château de Courtenay.
(4) Animé par Émile Pouget, dans un style joyeusement argotique, "Le père peinard" paraît de 1889 à début 1894. Les "Lois scélérates" votées en 1893 contre les anarchistes l’obligent à s’exiler à Londres.
Exposition du 21 mars 2017 au 26 mai 2017 à la Scam,
5, avenue Vélasquez, Paris 8e - Métro Villiers.
Entrée libre sur présentation à l’accueil.
Du lundi au vendredi, de 10 h à 17 h 30.
Tél. : 01 56 69 58 58.
>> scam.fr/
(1) André Blavier. "Les fous littéraires" p. 687 et suivantes. Hengri Veyrier. Paris - 1982.
(2) On peut se régaler à la lecture de "Le captain cap" d’Alphonse Allais réédité dans la collection 10/18.
(3) Avec l’âge, il vire à un populisme nauséabond. Il recueille 525 voix et se retire dans son château de Courtenay.
(4) Animé par Émile Pouget, dans un style joyeusement argotique, "Le père peinard" paraît de 1889 à début 1894. Les "Lois scélérates" votées en 1893 contre les anarchistes l’obligent à s’exiler à Londres.
Exposition du 21 mars 2017 au 26 mai 2017 à la Scam,
5, avenue Vélasquez, Paris 8e - Métro Villiers.
Entrée libre sur présentation à l’accueil.
Du lundi au vendredi, de 10 h à 17 h 30.
Tél. : 01 56 69 58 58.
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